Équiper l’officine

Apprendre à choisir entre tous les possibles

Par
Publié le 21/04/2016
Les technologies digitales et leurs applications donnent un nouvel élan à la PLV. Les perspectives de développer le merchandising et la PLV sont désormais considérables grâce aux technologies digitales et connectées qui multiplient les possibilités d’interagir avec patients et clients. Mais toutes n’ont pas la même efficacité et le débat est vif entre les différents acteurs du marché sur la pertinence de tel ou tel système. Beaucoup en sont d’ailleurs au stade de prototypes et de phases de tests pour en évaluer la faisabilité. Des linéaires digitaux aux hologrammes en passant par les bornes multi-services ou les technologies radio fréquence, petit tour d’horizon de la PLV du futur.
Une autre façon de montrer le produit

Une autre façon de montrer le produit
Crédit photo : Gollmann Zwick

Toutes celles et tous ceux qui se sont rendus à PharmagoraPlus l’ont constaté : l’offre digitale connaît un véritable bond en avant qui a sans doute amené nombre de visiteurs à se poser la question de savoir, mais quoi faire avec tout ça ?

Partant du principe que l’information animée est plus efficace que celle statique de l’affichage traditionnel papier, il est facile de se projeter dans des scénarios où ces nouveaux produits misant sur la digitalisation des écrans et l’interconnexion avec différentes données peuvent révolutionner la communication à l’intérieur de l’officine, et particulièrement tout ce qui concerne la promotion.

La révolution de la PLV par le digital en quelque sorte. Imaginer est facile, réaliser l’est moins. Parmi ceux présentés à PharmagoraPlus, beaucoup de produits sont encore à l’état de prototypes, les prestataires veulent en éprouver la faisabilité avant de se lancer. Certes l’affichage dynamique et interactif est, a priori, plus efficace, mais compte tenu des diverses possibilités offertes par les nouvelles technologies, autant saisir d’emblée ce qui peut marcher ou pas dans l’officine. Ce choix-là n’est pas facile.

Un poster digital

Si l’on raisonne à partir de ce qui existe déjà dans le domaine de la PLV, l’affichage dynamique par le biais des écrans fait partie du paysage depuis plusieurs années, avec notamment Futuramédia, le prestataire le plus connu qui fonctionne en régie publicitaire, et Digital Konnect, dont les produits sont plus spécifiquement faits pour les vitrines des officines.

Des dalles formées avec des LED, préférées aux écrans LCD pour leur luminosité et leur durée de vie, composent ces vitrines conçues sur-mesure et susceptibles de diffuser un contenu lui aussi réalisé sur mesure. Digital Konnect a présenté à Pharmagora un prototype de « poster digital » susceptible de faire son apparition dans l’espace de vente des officines.

« Un magasin de vêtements nous a demandé de l’animation pour l’intérieur des linéaires », raconte Michel Benizri, gérant de la société. C’est un écran d’une épaisseur nettement moindre que ceux placés en vitrine, seulement 3 à 4 cm au lieu de 16, grâce à un système de refroidissement différent ». Le prestataire entend en faire un système d’information susceptible d’aider l’acte d’achat, pas de donner des informations générales type astro ou météo. Il est pour l’instant en phase de test.

Ce n’est cependant pas encore de la PLV digitale permettant un échange avec les clients. Celle-ci est potentiellement incarnée par les linéaires digitaux qui ont fait leur apparition l’année dernière en officine. Ils sont aujourd’hui placés derrière les comptoirs mais tendent à venir s’installer dans l’espace de vente. « Un de nos clients pharmaciens a pour projet de sortir une partie de l’OTC hors des comptoirs, avec une sortie robots, mais pas loin de telle sorte que l’équipe officinale puisse venir aider le patient si nécessaire », évoque Tangi Caron, directeur régional grand Ouest du fabricant allemand de robots Gollmann Zwick.

Il suffit pour les clients circulant dans l’espace de vente de toucher l’image du produit affiché sur l’écran pour obtenir différentes informations le concernant, et par arborescence, des informations sur d’autres produits. Le Pharma Touch d’Omnicell (ex Mach 4) permet par exemple d’afficher également des vidéos promotionnelles et donne la possibilité aux clients de rechercher les produits par pathologie.

Notons toutefois que les linéaires digitaux tels qu’ils existent aujourd’hui derrière les comptoirs permettent aussi d’animer l’espace de vente compte tenu de leur visibilité, comme le montre Bernard Darnois, titulaire de la pharmacie de l’Alhambra à Montauban (voir témoignage ci-contre), sans que le client ait quelque action à entreprendre. Les fabricants testent cependant d’autres systèmes qui permettent de franchir le pas plus résolument, dont la technologie de base est identique, écran tactile qui permet d’interagir avec les clients, mais dont le package est différent, agrémenté d’autres services.

Alimenter les bases de données

C’est ainsi que Becton Dickinson (ex ARX) a montré à Pharmagora son Rowa V point, un système qui outre les possibilités de s’informer sur l’écran tactile autorise le paiement ; celui-ci effectué, le client va récupérer sa commande à un comptoir dédié. Actuellement en test en Allemagne, ce produit devrait être commercialisé en France l’année prochaine.

HMY a lui aussi présenté son système. Quick Touch est un dispositif doté d’un écran digital, avec en plus la possibilité de mettre à jour sa carte Sésame Vitale. « Il s’agit d’un prototype », tempère Régis Cao, directeur marketing de l’agenceur. « Nous estimons que ce système permet d’attirer plus volontiers l’attention des clients avec un écran, un affichage dynamique donc, et offre différentes fonctions en un seul lieu, ce qui est une réponse à la recherche permanente d’espace dans les officines. Mais nous ne le lancerons que si nous sommes sûrs de savoir où nous allons, une enquête menée à PharmagoraPlus auprès de pharmaciens et en cours de dépouillement devrait nous y aider. »

Des coûts de développement importants doivent trouver en effet un modèle économique adapté, d’autant que se pose la question de la façon d’alimenter régulièrement les bases de données qui se trouvent derrière ces systèmes. Pour chaque produit affiché, il faut une photo de qualité et une notice, d’où un travail qui est loin d’être négligeable et que seul le prestataire peut assumer. Ce qui est fait aujourd’hui pour l’OTC devra être fait pour la para demain si ces systèmes s’imposent dans l’espace de vente. Se pose également la question de la communication de ces données avec le stock de la pharmacie et de ses propres bases de données produits.

Il existe donc des freins qui devront être levés, et peut-être sont-ils plus importants qu’on ne se l’imagine. Certes, ces technologies ont quelque chose de remarquable, mais elles ne font pas l’unanimité quant à leur efficacité. David Godest, dirigeant de la société Dolmen Technologies, dresse un bilan plutôt sombre de l’affichage dynamique et prédit un avenir limité au digital.

« Quand on observe les commerces de la manière la plus distanciée, on constate que les systèmes d’affichage dynamique n’ont aucun impact sur le chiffre d’affaires global, d’autant qu’il est très difficile de générer des contenus de qualité capables de tourner en boucle, à tel point qu’aujourd’hui certaines enseignes de l’alimentaire retirent tout ou partie des écrans installés quelques années plus tôt. Il ne faut jamais oublier que lorsqu’un client vient dans un espace commercial, ce n’est pas pour " regarder la télé " mais acheter un produit et dialoguer avec un commerçant. En pharmacie, il vient par obligation et dispose d’un temps limité, y compris en para. » Pire encore, le digital serait selon lui une fausse bonne idée. « C’est encore une affaire de temps, chez soi, on a tout le loisir de naviguer sur Internet, dans un commerce et plus encore dans une pharmacie, on n’a pas ce temps-là et de plus, les clients n’aiment pas trop être regardés navigant sur un écran interactif. »

En prise directe avec l’univers physique de la pharmacie

Ce constat glaçant signifie-t-il qu’il n’y aucun espoir pour le digital dans l’espace de vente ? Non, il y a bien une façon de faire que Dolmen Technologies, dont le marketing digital est le métier, permet d’utiliser ces technologies à bon escient. « Il lui faut trouver un élément de prise avec l’univers physique de la pharmacie, et se positionner comme une aide directe à la vente », estime David Godest. « Le personnel au comptoir est souvent pris au dépourvu quand le patient ou le client vient avec ses connaissances acquises sur Internet », ajoute-t-il.

Qu’est-ce qu’une aide directe à la vente ? Tout ce qui permet de faciliter l’acte d’achat sans que le client n’ait à entreprendre quoique ce soit ou alors, une action très courte. Dolmen Technologies met en avant sa propre méthode qu’il propose à des groupements consistant à établir des profils déclaratifs permettant aux bornes connectées de créer le rapport immédiat souhaité avec le client.

C’est aussi ce vers quoi tend la société Think & Go, spécialisée dans les écrans connectés. « Les technologies apportent un vrai service dans le domaine de la parapharmacie, affirme Vincent Berge, fondateur, elles peuvent préconiser tel ou tel produit à tel profil de client ». Mais pas question de présenter des écrans tactiles, « finalement assez difficiles à utiliser ».

La société a tâtonné avant de trouver la solution. « Nous avions réalisé une application mobile qui permettait de donner des informations en posant le smartphone sur des produits, mais c’était assez lourd, il aurait fallu taguer tous les produits », raconte-t-il. Aujourd’hui, grâce à un partenariat avec CA Publishing, spécialiste de la PLV, l’entreprise propose un écran qui interagit avec tout produit possédant une puce NFC, à commencer par le smartphone, mais cela peut être aussi une carte bancaire, un pass Navigo ou d’autres supports… « Imaginons une promotion sur un nombre limité de produits annoncée par l’écran, il suffit d’approcher son smartphone de cet écran et l’on bénéficie immédiatement de cette promotion enregistrée en caisse, le client vient avec l’image du coupon récupérer son produit », décrit Vincent Berge.

C’est de la PLV on ne peut plus directe, avec un temps d’action très court pour le client. C’est une application qui permet aussi le dialogue rêvé par Think & Go, par exemple, proposer des produits cosmétiques adaptés à la peau de chacun des clients, pourvu que le pharmacien ait créé d’une manière ou d’une autre une base de données de profils.

RFID et hologrammes

Certains prestataires utilisent une autre technologie radio fréquence que le NFC, la RFID, d’une portée beaucoup plus importante. C’est le cas de HMY qui a présenté à Pharmagora une borne de ce type, aujourd’hui commercialisée. Mais son usage est circonscrit à des univers précis en utilisant des échantillons, il est en effet impossible de taguer tous les produits de parapharmacie, le coût en serait trop élevé.

L’avantage est de pouvoir passer le produit sur une borne, ce qui déclenche un affichage sur un écran, là aussi, l’immédiateté est de mise. Il reste à définir pour quels produits cela convient le mieux. Le groupement PHR utilise aussi la RFID dans ses pharmacies digitales pour par exemple présenter des objets connectés de santé.

Autre innovation intéressante, signée encore HMY décidément très impliqué dans l’agencement digital, celle d’une borne hologramme. « C’est une autre façon de capter l’attention, de communiquer », explique Régis Cao. « Il est possible de l’intégrer partout, en vitrine ou à l’intérieur, et dans ce dernier cas, soit c’est le produit lui-même qui est montré en image 3D, soit le produit réel est présenté, et l’hologramme est constitué de textes et d’images. » Pour David Godest, l’imagerie 3D peut avoir un impact direct sur les clients. Gageons que dans ce maelström de possibles, la PLV numérique trouvera sa voie.

Hakim Remili

Source : Le Quotidien du Pharmacien: 3259
Sommaire du dossier