Ce qu’ils en disent

Il y a urgence à changer de modèle

Publié le 28/10/2013
Article réservé aux abonnés
En conclusion des travaux de la 14e Journée de l’économie de l’officine organisée par « le Quotidien », nombreux sont les participants à réclamer d’urgence un nouveau mode de rémunération dégagé de la contrainte des volumes et des prix. Très critiques à l’égard des pouvoirs publics, ils en appellent à une refondation rapide du modèle économique. Morceaux choisis.
PIERRE FRANCOIS CHARVILLAT  JOURNEE DE L' ECONOMIE DE L' OFFICINE DU QUOTIDIEN DU PHARMACIEN 2013

PIERRE FRANCOIS CHARVILLAT JOURNEE DE L' ECONOMIE DE L' OFFICINE DU QUOTIDIEN DU PHARMACIEN 2013
Crédit photo : S TOUBON

Willy Hodin

Willy Hodin
Crédit photo : S. TOUBON

Bruno Métairie

Bruno Métairie
Crédit photo : S. TOUBON

CHRISTIAN GRENIER  JOURNEE DE L' ECONOMIE DE L' OFFICINE DU QUOTIDIEN DU PHARMACIEN 2013

CHRISTIAN GRENIER JOURNEE DE L' ECONOMIE DE L' OFFICINE DU QUOTIDIEN DU PHARMACIEN 2013
Crédit photo : S TOUBON

ALBIN DUMAS  JOURNEE DE L' ECONOMIE DE L' OFFICINE DU QUOTIDIEN DU PHARMACIEN 2013

ALBIN DUMAS JOURNEE DE L' ECONOMIE DE L' OFFICINE DU QUOTIDIEN DU PHARMACIEN 2013
Crédit photo : S TOUBON

WILLY HODIN (PHR) : ambition et volontarisme

« Je suis consterné par les propos qu’a pu tenir la ministre de la Santé. Ils reflètent sa méconnaissance totale du métier, et donc des problématiques des pharmaciens. Marisol Touraine en est restée à une image des années quatre-vingt, comme tendrait à le démontrer sa proposition de généraliser le tiers payant. Je crains par ailleurs que des vieilles lunes ne soient remises sur le devant de la scène, à l’instar du dossier médical partagé (DMP) qu’elle entend relancer. Je suis également très sceptique sur l’ambition affichée pour développer la prévention, dans la mesure où la ministre dit vouloir s’appuyer sur les médecins généralistes, alors même que de moins en moins de jeunes ne s’installent en libéral et que les déserts médicaux sont de plus en plus nombreux. Il me semble, en effet, contradictoire d’imaginer faire porter une véritable politique de prévention par une population qui diminue ! C’est d’autant plus regrettable que l’économie de l’officine nécessite de faire preuve d’imagination. Alors même que nous sommes incontestablement arrivés au bout du système des génériques, je déplore ainsi qu’aucune mesure valable n’ait encore été proposée par le cabinet de la ministre. Pire ! Je regrette que les syndicats n’aient d’autres alternatives que de trouver, dos au mur, une solution à cette crise. Car il ne faudrait pas que, dans l’urgence, une solution préjudiciable à l’ensemble du réseau soit trouvée au seul profit d’une minorité. Il faut donc mettre en place, au plus vite, une information visant à sensibiliser les confrères sur l’impossibilité de demeurer sur le seul mode marchand sans que la valeur ajoutée de l’acte intellectuel ne soit prise en compte. À défaut, aucune richesse ne sera développée et, restant à périmètre constant, l’officine courra à sa perte. En clair, il faut être beaucoup plus ambitieux et volontariste dans la recherche d’un nouveau mode de rémunération qui serait totalement indépendant des volumes et des prix. Et dans cette optique, je reste convaincu que le modèle d’organisation à travers des enseignes présente un réel intérêt. »

CHRISTIAN GRENIER (Népenthès) : changer rapidement de modèle

« Je regrette que la ministre ait encore une fois oublié les pharmaciens et qu’ils ne soient pas au cœur de la stratégie nationale de santé. Bien qu’elle soit coutumière du fait, cette omission systématique me semble totalement aberrante. Et de constater que les professions de santé dans leur ensemble ont été négligées par la ministre n’est en rien une consolation. Bien au contraire ! J’espère juste que Marisol Touraine finira par se rappeler que les officinaux existent, comme elle s’est souvenue que les médecins, puis les industriels avaient un rôle à jouer. En tout cas, elle ne doit pas s’étonner, dès lors, que la profession rechigne à s’asseoir à la table des négociations. D’autant que les syndicats semblent clairement se faire balader par le cabinet de la ministre… Mais je reste convaincu que c’est une attitude délibérée de la part du gouvernement qui espère ainsi pouvoir présenter le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2014 sans avoir eu véritablement à négocier au préalable. Je ne peux donc que louer la création de l’intersyndicale, qui présente l’avantage d’opposer un front uni et une cohésion de la profession. C’est fondamental à l’heure où le monopole est encore une fois attaqué et où les prix, les volumes, et donc la marge, baissent, sans que les nouvelles missions ni les contrats de coopération commerciale ne suffisent à compenser les pertes enregistrées. Et la perspective de voir les génériques se développer à grande échelle n’est pas faite pour nous rassurer, puisqu’elle augure la mise en place d’une politique de prix. D’autant que la fin des contrats de coopération commerciale et l’éventuelle libéralisation des remises s’accompagneront très probablement de l’instauration d’une nouvelle taxe. Autant de bonnes raisons pour inciter les pharmaciens à changer rapidement de modèle économique et à se dégager de la contrainte des prix et des volumes… en espérant que la GMS ne s’empare pas de segments de marchés essentiels pour l’officine. »

BRUNO MÉTAIRIE (Cofisanté) : une approche dogmatique à l’encontre des libéraux

« Il est affligeant que les pharmaciens soient exclus de la stratégie nationale de santé, alors que la prévention y occupe une place centrale. Ne vouloir s’appuyer que sur les seuls médecins généralistes révèle une totale méconnaissance, à la fois des enjeux d’une politique préventive efficace, et du métier d’officinal ; car le pharmacien est le seul professionnel de santé à être disponible en permanence pour les patients. C’est d’autant plus aberrant que la loi Hôpital, patients, santé et territoires (HPST) permet aux pharmaciens de disposer des outils nécessaires pour prendre en charge les patients chroniques et éviter le développement de ces pathologies. J’ajouterai, en outre, qu’une telle politique va à l’encontre des accords conventionnels qui ont prévu, entre autres, de mettre en place des entretiens pharmaceutiques pour améliorer la prise en charge des patients sous anticoagulants oraux (ACO) et sous antiasthmatiques. Et c’est d’autant plus regrettable que les pharmaciens doivent investir en temps et aménager leur officine pour mener à bien ces nouvelles missions. La ministre aurait voulu décourager les meilleures intentions qu’elle ne s’y serait pas prise autrement ! Je suis d’autant plus écœuré que nombre d’officines sont aujourd’hui confrontées à de graves difficultés économiques. Or les nouvelles rémunérations auraient dû apporter une bouffée d’oxygène salvatrice. Et un an après, force est de constater que nous sommes quasiment au point mort. Au point que je suis convaincu, aujourd’hui, que les pouvoirs publics souhaitent faire baisser la rémunération des pharmaciens, comme tendrait à le démontrer le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) 2014. Pire ! Je crains que le gouvernement ne soit motivé par une approche dogmatique à l’encontre des libéraux. Et, en particulier, des pharmaciens, qui jouent le rôle de boucs émissaires au nom de médicaments soit disant trop chers ou inutiles. Il me semblerait plus opportun d’aller chercher des sources d’économie du côté de l’hôpital. Mais encore faudrait-il faire preuve de courage politique… »

PROPOS RECUEILLIS PAR STÉPHANE LE MASSON

Source : Le Quotidien du Pharmacien: 3041