L’Union des syndicats de pharmaciens d’officine (USPO) appelle les officinaux à fermer leurs établissements le samedi 16 août pour protester contre l’arrêté sur les remises génériques et exprimer le ras-le-bol plus général d’une profession épuisée et inquiète pour son avenir. Selon les chiffres du syndicat et un sondage mis en ligne sur le site du « Quotidien du pharmacien », le mouvement s’annonce suivi.
« Fermer un jour pour ne pas fermer pour toujours », c’est le slogan choisi par l’USPO, qui appelle depuis plusieurs jours les pharmaciens à baisser le rideau le samedi 16 août. Une action décidée en réaction à la décision du gouvernement d’abaisser le plafond de remise sur les génériques, mesure confirmée par un arrêté publié dans le « Journal officiel » du 6 août. « La fermeture du samedi 16 août s’impose comme une nécessité », juge aujourd’hui l’USPO. « L’accès limité aux pharmacies du jeudi soir (14 août) au lundi matin (18 août) vise à illustrer auprès du grand public et des décideurs politiques l’impact que représenterait la disparition des pharmacies de proximité. Cette journée symbolique doit alerter sur l’impact concret d’un désert pharmaceutique, sans pénaliser les patients : l’objectif est politique, pas punitif », résume le syndicat, qui insiste sur le fait que cette journée de fermeture « n’est pas une grève », au moins sur le plan juridique et administratif. L’USPO appelle tout de même les pharmaciens qui vont décider de fermer ce jour-là à « prévenir les maires » de leur commune via une lettre type et bien sûr à en informer leurs patients, notamment grâce à une affiche dédiée.
« Entre 80 et 90 % des pharmacies fermées en PACA »
Partie du local, des départements, cette initiative reprise depuis au niveau national par l’USPO va-t-elle être suivie ? Sur les 260 répondants au sondage mis en ligne le 1er août sur le site du « Quotidien du pharmacien », ils sont 80 % à se dire prêts à fermer le 16 août. Des chiffres qui rejoignent ceux de Cyril Colombani, président de l’USPO des Alpes-Maritimes et titulaire à Roquebrune-Cap-Martin. « Pour la région Provence-Alpes-Côte d’Azur, entre 80 et 90 % des pharmacies seront fermées le 16 août selon les chiffres que j’ai à ma disposition », précise-t-il. Le week-end du 15 août est un jour de grande affluence pour les pharmacies situées dans des villes balnéaires, pourtant « sur les 22 pharmacies situées en bord de mer entre ma commune et la frontière italienne, elles seront toutes fermées sauf une, qui ne m’a pas encore confirmé sa réponse », affirme Cyril Colombani. Pour le pharmacien, cette action ne doit pas seulement permettre de rappeler la colère de la profession contre la baisse du plafond de remise sur les génériques. « Les franchises médicales, le déremboursement envisagé des médicaments pris en charge à 15 %, les nouveaux tarifs sur les fauteuils roulants, maintenant la volonté de réutiliser les MNU… Les mauvaises idées et les problèmes s’accumulent et deux corporations, les pharmaciens mais aussi les grossistes, se retrouvent en grande difficulté. Que ferait-on sans nous ? », interroge-t-il. Montrer à quel point un nombre réduit de pharmacies entraîne des difficultés d’accès aux soins et aux traitements, c’est justement l’idée de cette fermeture du 16 août. « C’est peut-être une grosse journée pour certaines pharmacies mais si l’on ne fait rien, on perdra beaucoup plus. Les décisions du gouvernement vont aussi augmenter les ruptures, déjà nombreuses. Il ferait mieux d’agir sur les médicaments chers, car ce sont eux qui mettent véritablement en difficulté le système de santé », estime le pharmacien azuréen.
Une action qui ne fait pas l’unanimité
En réponse à notre sondage, certains pharmaciens confient leurs espoirs sur cette journée du 16 août, qui va permettre de sensibiliser l’opinion, espèrent-ils. « Toutes les autres actions menées depuis plusieurs semaines n’ont pas eu beaucoup d'effet et je ne suis pas sûr que la population soit vraiment au courant et concernée à ce jour », estime par exemple Dominique. « Peut-être que la fermeture de plusieurs jours, si tous les pharmaciens participent, va les éveiller car s’ils doivent aller à l'hôpital, cela risque de les gêner un peu plus », poursuit-il. L’idée de cette journée de fermeture au lendemain d’un jour férié et à la veille d’un dimanche ne fait toutefois pas l’unanimité. « Je pense que la date est très mal choisie, elle sera assimilée au pont du 15 août, donc aucune sensibilisation du motif réel, bien au contraire », écrit ainsi Maryse. De fait, et contrairement aux actions prévues en septembre, la journée de fermeture du 16 août n’a pas été relayée officiellement par la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF), même si certains pharmaciens adhérents de ce syndicat y participeront. « Dans le dernier communiqué de l’intersyndicale, il est écrit que nous soutenons “toute action locale dès ce mois d’août qui vise à obtenir le soutien de nos patients”. Donc si cette journée du 16 août permet d’obtenir le soutien des patients alors on pourra dire qu’elle est valable », résume Philippe Besset, qui n’est toujours pas convaincu par le choix de cette date. Le président de la FSPF est déjà tourné vers le mois de septembre et l’objectif prioritaire à ses yeux : convaincre les députés d’annuler l’arrêté sur les remises génériques.
Pas de démarches officielles à effectuer pour les pharmaciens qui veulent fermer le 16 août
Comme d’autres pharmaciens, Philippe Besset avait prévu de longue date de fermer son établissement le 16 août. Les fermetures d’officines ce jour-là ne seront pas toutes motivées par la volonté de protester contre le gouvernement, comme l’admet Delphine Chadoutaud, présidente de l’USPO de l’Essonne et de l’URPS Pharmaciens d’Île-de-France. « Dans mon département, environ 70 % des pharmacies seront fermées le 16 août. Je n’ai pas eu de réponse de tout le monde mais sur celles qui ferment une bonne moitié avait déjà prévu de le faire avant », reconnaît-elle. Cette fermeture des officines sera bien plus suivie dans certains départements que dans d’autres, comme l’observe par ailleurs Pierre-Olivier Variot, président de l’USPO et titulaire en Côte d’Or. « Dans mon département il n’y aura que quatre officines ouvertes le 16 août. En revanche, dans la Nièvre, le mouvement est peu suivi », explique-t-il, ajoutant ne pas avoir de chiffres au niveau national. « Il y aura un service d’astreinte le samedi à partir de 19 heures. Pour la journée, les pharmaciens qui veulent fermer n’ont aucune démarche officielle à faire, nous sommes une profession libérale et nous pouvons fermer quand nous le voulons », affirme-t-il ensuite. Le président de l’USPO n’appelle pas les pharmaciens à s’organiser pour qu’un service minimum soit assuré auprès des patients. « Ceux qui veulent fermer fermeront et ceux qui ne veulent pas resteront ouverts. Les patients ont été prévenus en amont. Le jour même, ils pourront se rendre aux urgences ou consulter leur médecin généraliste. L’idée de cette action c’est justement de faire prendre conscience aux patients de ce qui les attend si le nombre de pharmacies diminue à cause des décisions du gouvernement », conclut-il.
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