Déterminé à mener à bien son objectif d’économies dans le secteur de la santé, le gouvernement a activé le mode bulldozer et semble résolu à aller jusqu’au bout de ses intentions. Au lendemain de la parution de l’arrêté modifiant les plafonds de remise sur les génériques, on apprend que l’exécutif veut accélérer sur un autre dossier brûlant : celui des franchises médicales.
Deux euros au lieu d’un euro sur les boîtes de médicament, quatre euros au lieu de deux sur les consultations médicales… le gouvernement compte bien doubler le montant et le plafond des franchises médicales, mais aussi ceux des participations forfaitaires. « Ce sont des chiffres qui sont proposés dans la feuille budgétaire », dévoilée à la mi-juillet par le Premier ministre, a rappelé le ministre de la Santé, Yannick Neuder, ce 7 août dans la matinale de « TF1 ». « Cela s’accompagne surtout d’un grand plan de lutte contre la fraude et le gaspillage. Il y a beaucoup de gaspillage de dispositifs médicaux et de médicaments, beaucoup de fraudes sociales, cela représente 13,5 milliards d’euros », a-t-il ensuite ajouté. « Concernant ce doublement des franchises médicales qui est proposé dans les discussions, l’idée est surtout de faire prendre conscience à tout le monde que la santé n’a pas de prix mais qu’elle a un coût », argumente le ministre. Pas question cependant de « stigmatiser les malades. Cela ne concernera pas non plus les femmes enceintes, les mineurs, les personnes qui ont des revenus modestes », a-t-il assuré. « Il est important que l’on puisse aborder ces sujets à l’heure où les comptes de la Sécurité sociale sont très dégradés », insiste Yannick Neuder, qui a ensuite affirmé que ce serait au « Parlement de décider » si ce doublement des franchises médicales doit être appliqué ou non. Pourtant, et contrairement a ce que dit le ministre, le gouvernement n’est pas pas obligé d’en passer par les députés et les sénateurs pour modifier le montant des franchises médicales…
En augmentant une nouvelle fois les franchises médicales payées par les patients mais aussi le montant des participations forfaitaires (lesquelles ont déjà été doublées en 2024), avec des plafonds qui passeraient dans les deux cas de 50 euros à 100 euros par an, le gouvernement espère réaliser deux milliards d’euros d’économies (sur les 5,5 milliards d’économies espérées sur le secteur de la santé en 2026), selon un chiffre donné par « Les Échos ». Le journal économique affirme également que l’exécutif « a transmis pour avis des décrets concernant les franchises médicales aux caisses de la Sécurité sociale » le mercredi 6 août. Toujours selon « Les Échos », le gouvernement souhaiterait aller vite, très vite même, sur ce dossier « en publiant certains décrets dès la rentrée, afin que le doublement de ces plafonds annuels entre en vigueur dès novembre et non pas début 2026 ».
En effet, pour augmenter le montant des franchises et leurs plafonds, « le gouvernement peut agir par décret, sans passer par la loi donc, comme il l’a fait avec le plafond de remise sur les génériques », explique Philippe Besset, président de la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF). « En agissant ainsi, le gouvernement prendrait toutefois un gros risque, celui que le Parlement dise non ensuite. Or, sur les franchises médicales, comme sur les remises génériques, nous avons bien l’intention de convaincre le Parlement de revenir en arrière », souligne-t-il. « Concernant le mode de récupération de ces franchises, il est en revanche impossible pour le gouvernement d’agir par voie réglementaire, cela devra passer obligatoirement par la loi, précise Philippe Besset. Si l’on demande aux professionnels de santé de s’assurer eux-mêmes de cette collecte, la question du tiers payant se posera alors. Les médecins, les kinés, les pharmaciens disent tous la même chose, si l’on nous oblige à récupérer nous-mêmes cette franchise, nous arrêterons le tiers payant. Cela serait trop complexe à gérer, il est impossible pour nous de savoir quand un patient va dépasser ou non le plafond », détaille le président de la FSPF.
Cette mesure sur les franchises médicales suscite la vive opposition des associations de patients. Elle est aussi violemment critiquée par les professionnels de santé et notamment par les représentants des pharmaciens, opposés sur le fond mais aussi furieux de devoir assurer eux-mêmes la collecte de cette franchise sur les boîtes de médicaments directement au comptoir, tel que l’envisage la ministre du Travail et de la Santé, Catherine Vautrin. Dans leur communiqué commun envoyé le 6 août en réponse à la publication de l’arrêté sur les remises génériques, les organisations représentatives de la profession (FSPF, USPO, UNPF, UDGPO, Federgy) ont promis de « combattre » cette mesure sur les franchises médicales, qui « constitue une nouvelle attaque contre l’accès au médicament de nos patients » selon eux.
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