Dans une interview accordée au « Parisien-Aujourd’hui en France », la ministre du Travail et de la Santé, Catherine Vautrin, s’est dite favorable à l’idée de remettre sur le marché des médicaments non utilisés pour limiter le gaspillage et faire des économies. Une idée qui est loin de convaincre les pharmaciens…
C’est un sujet récurrent, notamment évoqué par l’assurance-maladie ces dernières années. Comment diminuer le nombre de médicaments non utilisés et comment envisager de les remettre en circulation, sous certaines conditions ? Médicaments inutilisés qui finissent par périmer au domicile des patients, ou tout simplement jetés à la poubelle… le gaspillage des médicaments représente en effet un coût estimé de 1,5 milliard d’euros par an en France. Dans le cadre du grand plan d’économies lancé par le gouvernement dans le secteur de la santé, Catherine Vautrin, sans donner de nombreux détails, propose donc « d’examiner les médicaments rapportés en pharmacie pour qu’ils soient reconditionnés ».
Remettre certains médicaments en circulation nécessiterait alors de vérifier s’ils n’ont pas été altérés, obligerait aussi à remettre une notice, à en informer les patients… Si l’idée peut paraître attirante, le travail à mener semble donc très fastidieux. Est-ce donc réellement réalisable et rentable en pratique ? Interrogé à ce sujet sur « RMC », Philippe Besset, président de la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF), estime cette mesure inenvisageable pour les médicaments les moins chers. « Un comprimé d’antibiotique vaut 20 centimes, compte tenu du prix de la manutention, du contrôle, de la remise à disposition… cela ne vaut pas le coup », souligne-t-il. Il ouvre en revanche la porte à une remise en circulation de certains médicaments onéreux, évoquant notamment le cas de certains anticancéreux. « Certains coûtent plus de 10 000 euros la boîte. Quand un patient malheureusement décède, il est dommage qu’une boîte de médicaments aussi chère soit détruite. En le donnant à l’hôpital, des procédures de contrôle peuvent être faites et le médicament peut être réutilisé », admet Philippe Besset.
De son côté, Pierre-Olivier Variot, président de l’Union des syndicats de pharmaciens d’officine (USPO), se montre encore plus réticent envers une idée qu’il juge à la fois irréalisable et potentiellement dangereuse. « On a arrêté d’envoyer des médicaments non utilisés dans des pays pauvres parce qu’on n’avait pas de garanties sur le respect de la chaîne pharmaceutique. Si je suis pharmacien, en ville ou à l’hôpital, et qu’on me demande d’évaluer un médicament non utilisé en vue de le réutiliser, comment vais-je être sûr que le médicament a été conservé comme il faut, ou qu’il n’est pas frelaté ? Qui serait prêt à assumer une telle responsabilité sur un médicament ? », expose-t-il. Concernant les médicaments chers, le président de l’USPO estime que la meilleure solution pour faire des économies sur ces spécialités serait avant tout « de modifier leurs prix, qui sont absurdement élevés aujourd’hui ». Enfin, le président de l’USPO pose une autre question : est-ce que les patients accepteraient d’utiliser des médicaments non utilisés qui ont été remis sur le marché ? « Il faudrait forcément les en informer comme on le fait par exemple avec les appareils électroniques qui ont été reconditionnés. Si j’étais patient, je le refuserais, je n’aurais pas envie de prendre des médicaments “au rabais” », souligne-t-il.
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