L'avenant 15, signé le 6 décembre 2018 à la Convention nationale des pharmaciens titulaires d’officine, a offert la possibilité aux officinaux de pratiquer la télémédecine.
Si en février 2020, la téléconsultation frôlait à peine 0,1 % du total des consultations, elle a connu une accélération notable en l'espace de six mois, atteignant désormais 6 % des rendez-vous entre professionnels de santé et patients, selon les données de GERS Data. Une étude menée en mai dernier par MAIIA (entreprise dédiée à la télémédecine) a, quant à elle, révélé que près d'un tiers des Français a eu recours à la téléconsultation au cours des 12 derniers mois et trois quarts d'entre eux souhaitent y recourir à nouveau. « Par rapport au mois d'avril (premier confinement), la téléconsultation a diminué, en volume, d'un facteur trois. L'enjeu, aujourd'hui - pour pérenniser cette pratique au-delà de la crise - c'est de faire en sorte que la consultation digitalisée ait la même valeur, aux yeux du patient, que la consultation présentielle », souligne David Syr, directeur général adjoint de Gers Data. Pour cela, le pharmacien a un rôle décisif à jouer : en accompagnant le patient lors d'une téléconsultation dans un espace confidentiel, il humanise cette dernière. « Le pharmacien doit représenter le trait d'union entre le médecin et son patient. Il doit le sécuriser. Certaines personnes peuvent, en effet, être inquiètes d'être seules face à un écran », ajoute-t-il.
Délais de consultation et interprofessionnalité
Le maillage officinal et l'amplitude horaire importante des pharmacies sont, par ailleurs, des atouts pour ancrer la téléconsultation en officine dans les nouvelles habitudes de soins. La proximité du pharmacien permet aux personnes âgées, peu mobiles ou vivant dans des déserts médicaux, mais aussi à l'ensemble de la population, d'accéder plus rapidement à une consultation médicale. Et cela, tout en étant accompagné d'un professionnel de santé équipé de dispositifs médicaux connectés facilitant le diagnostic. « La téléconsultation doit s'adresser à tous les patients, tous les médecins et sur tout le territoire. Ce qui est nouveau, c'est que la consultation présentielle ne peut plus s'envisager sans la téléconsultation. Car elle met, à disposition des patients, du temps médical disponible. Sur notre plateforme, nous avons mobilisé des médecins libéraux, remplaçants, salariés à temps plein ou partiel, jeunes retraités pour améliorer l'accès aux soins », indique le Dr Alexandre Maisonneuve, co-fondateur et Directeur médical de Qare, entreprise dédiée à la téléconsultation. Autre enjeu de la téléconsultation : l'interprofessionnalité. « Aujourd'hui, 500 000 téléconsultations sont effectuées, chaque semaine, en France. 80 % concernent le généraliste. Le déploiement à grande échelle de la téléconsultation, au-delà de la crise, passera par une ouverture plus large de cette pratique aux professionnels de santé et aux auxiliaires médicaux. Les outils numériques devront, par ailleurs, favoriser la collaboration et le partage des données entre eux pour améliorer le suivi du patient, notamment chronique », note Marie-Laure Saillard, CEO de MesDocteurs.
Renforcer la relation avec le patient
Depuis l'arrêté paru au JO le 18 mai dernier dans le cadre du Covid-19, les officinaux peuvent accompagner, à distance (par vidéotransmission) les patients sous anticoagulants oraux directs ou antivitamines K, sous antiasthmatiques par corticoïdes inhalés et réaliser les bilans partagés de médication (BPM). Mis en place dans l'urgence, le télésoin reste balbutiant. « Mais il est voué à un avenir prometteur. Le BPM à distance, par exemple, permet à une personne âgée polymédiquée d'être suivie par son pharmacien pour limiter les risques d’iatrogénie tout en restant à son domicile. Cela apporte un vrai bénéfice à ces patients », précise Marie-Laure Saillard. Le suivi effectué via le télésoin permet aussi de renforcer la relation avec le patient et de le fidéliser. D'après MAIIA, le télésoin en officine est en pleine expansion. « Nous enregistrons une progression de 500 % des demandes depuis juillet. Les pharmaciens sont très sollicités (prolongations d'ordonnance, notamment). Nous leur proposons un agenda digital afin qu'ils puissent noter les rendez-vous avec les patients. Dans les faits, le télésoin attire une population un peu moins âgée que la téléconsultation en officine. Car avec le télésoin le patient reste chez lui : il doit être à l'aise avec les nouvelles technologies », conclut Eric Roussin, MAIIA.
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