Les pharmaciens ont défilé, ce 1er juillet, pour protester contre la volonté du gouvernement de baisser le plafond de remise des génériques, mesure qui pourrait avoir de graves conséquences sur leurs revenus. Ils espéraient être entendus par le ministère de la Santé, point de chute de la manifestation. Reportage.
Peu avant 15 heures, les syndicats de professionnels de santé du collectif #soignantstrahis (pharmaciens, kinés, médecins spécialistes ou encore dentistes) ont été reçus par le ministère de la Santé, sous les hourras d’environ 2 000 manifestants. Ils ont vite déchanté. Aucune avancée n’a été obtenue après une heure d’entrevue avec la directrice adjointe du cabinet du ministre chargé de la santé et de l’accès aux soins, Lise Alter, puis une vingtaine de minutes avec le ministre de la Santé, Yannick Neuder. Les professionnels de santé présents se sont donc donné rendez-vous « très vite » pour poursuivre la mobilisation.
Côté pharmacien, Philippe Besset, président de la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF), et René-Pierre Clément, vice-président de l’Union des syndicats de pharmaciens d’officine (USPO), étaient présents lors des échanges avec le gouvernement. Pas d’avancée significative donc, mais Yannick Neuder a déclaré avoir signé, le 30 juin, un nouvel arrêté qui va prolonger celui du 14 mai. Le plafond de 40 % sur les remises génériques va donc être maintenu provisoirement, pour donner du temps aux négociations, mais pour combien de temps ? « Jusqu’à la fin de l’été, sans précision, mais on le saura lorsque l’arrêté paraîtra au Journal officiel », évoque Philippe Besset. En revanche, le sujet de fond, soit le niveau auquel sera abaissé le plafond de remise sur les génériques (le gouvernement envisagerait un taux entre 20 et 25 %), n’a pas été abordé. « En raison d’un désaccord entre les ministères de la Santé et de l’Économie, l’arbitrage revient au Premier ministre », explique Philippe Besset, qui va donc demander à rencontrer le Premier ministre.
Cette journée de mobilisation devait également permettre d’alerter les parlementaires, pour qu’ils fassent pression sur le gouvernement. Et ils sont d’ailleurs nombreux à être passés, sous les tilleuls des Invalides, pour rencontrer les représentants des syndicats et des groupements. On a notamment vu Agnès Firmin-Le Bodo, ex-ministre de la Santé et députée de Seine-Maritime, et Corinne Imbert, secrétaire de la commission des affaires sociales du Sénat, toutes deux pharmaciennes de profession. « Ce que le gouvernement s’apprête à faire est insupportable, dénonce Corinne Imbert. Si l’économie des pharmacies se portait bien, cela se saurait. L’accord avec le Leem et la baisse des remises génériques vont conduire à la fermeture d’officines, à leur concentration et vont accroître le risque de financiarisation du secteur. Saluer d’un côté l’aménagement du territoire et l’intérêt du maillage pharmaceutique et, de l’autre, ne pas les soutenir, c’est paradoxal. J’attends qu’on retrouve la raison. Il n’est pas acceptable de ne pas respecter l’accord conventionnel. »
Toute la matinée, les pharmaciens se sont réunis sous des tentes blanches, vêtus d’un T-shirt siglé « Nous sommes des pharmaciens trahis » et tenant des pancartes « 800 pharmacies menacées : bientôt la vôtre ? #trahis. », quelle que soit leur appartenance syndicale ou leur affiliation à un groupement. « Les pharmaciens sont unis pour défendre l’économie de la pharmacie », a affirmé René-Pierre Clément, enterrant au moins pour la journée les désaccords entre FSPF et USPO sur la signature de l’avenant conventionnel. La baisse des remises sur les génériques constitue « une vraie déclaration de guerre, face à laquelle nous ne nous laisserons pas abattre sans réagir », promet Laurent Filoche, président de l’Union des groupements de pharmaciens d’officine (UDGPO).
Tenant des ballons rouges estampillés du slogan « des tarifs décents pour une santé de qualité », au milieu de kinés aux casquettes violettes, les pharmaciens ont crié leur colère tout au long du cortège. Une démonstration de force improvisée en quelques jours, mais qui a fait du bruit. « Je suis déterminé », a conclu Philippe Besset, avant de donner le signal de la dispersion des manifestants, avenue de Ségur. Pour déterminer la suite de cette mobilisation et de nouvelles actions, un conseil d’administration de la FSPF est prévu ce mardi 2 juillet. La grève des gardes illimitée, elle, est maintenue et suscite une forte adhésion. Objectif : maintenir la pression pour conserver un taux de 40 % sur le plafond de remise sur les génériques et des conditions satisfaisantes sur les remises biosimilaires (le gouvernement envisageant pour l’instant un plafond à 15 % pour ces derniers). Philippe Besset, lui, veut poser la question suivante : « le gouvernement veut-il vraiment préserver le maillage officinal en France ? »
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