Référent sécurité auprès du Conseil national de l’Ordre des pharmaciens, Gildas Bernier espère que l’instauration possible d’un délit d’outrage sur les professionnels de santé provoquera une prise de conscience dans le grand public. En marge de la présentation du dernier bilan de l’Ordre sur la sécurité des pharmaciens, il veut aussi rappeler à ses confrères et consœurs que des solutions existent pour les aider à face aux vols et aux agressions.
Le Quotidien du pharmacien :- La proposition de loi visant à renforcer la sécurité des professionnels de santé va être examinée au Sénat en mai. Elle prévoit notamment la création d’un délit d’outrage spécifique aux professionnels de santé, qu’est-ce que cela pourrait changer ?
Gildas Bernier. - Ce délit d’outrage c’est avant tout un message fort envoyé au grand public : on n’agresse pas un professionnel de santé. Est-ce que cela aura un véritable impact ? C’est difficile à prédire mais cette proposition de loi montre en tout cas que le législateur s’est saisi du problème. Le délit d’outrage, ce n’est que la partie émergée de l’iceberg. Ce texte (déjà adopté à l’Assemblée nationale) comprend une batterie de mesures. Il prévoit plus globalement d’alourdir les peines encourues en cas de vol ou d’agressions sur un professionnel de santé libéral ou travaillant dans un établissement de santé. Avec une gradation des peines, notamment si un vol est commis dans le but d’alimenter un trafic de médicaments par exemple. Il est aussi question de permettre aux professionnels de santé de déposer plainte de manière anonymisée (en déclarant comme domicile l'adresse de l’ordre professionnel, du commissariat ou de la gendarmerie), afin d’éviter d’éventuelles représailles.
Quelles solutions sont déjà à disposition des pharmaciens pour prévenir le risque de vols à l’étalage, de cambriolages ou d’agressions ?
Les forces de l’ordre, police ou gendarmerie selon le secteur, proposent aux pharmaciens des « consultations de sûreté » gratuites. Leur existence est encore assez méconnue alors qu’elles sont très utiles. Le référent sûreté de la police ou de la gendarmerie effectue un audit complet de la pharmacie (système d’alarme, éclairage, vidéosurveillance) et délivre ensuite des conseils pour aboutir à une stratégie de mise en sûreté. C’est un vrai service qui est proposé aux pharmacies. On peut aussi évoquer un autre dispositif que peu de pharmaciens connaissent aujourd’hui. Il est aujourd’hui possible de demander aux forces de l’ordre l’inscription de sa pharmacie sur un fichier : l’application Opération tranquillité entreprises et commerces (OTEC) en zone gendarmerie ou le logiciel Pégase en zone police. Le numéro de téléphone fixe de la pharmacie ou le numéro de portable de l’officinal est enregistré et, en cas d’appel, la police ou la gendarmerie sait directement qu’il provient d’un établissement ou d’un professionnel qui a prioritairement besoin d’aide. Cela favorise une intervention plus rapide de la police ou de la gendarmerie.
Des formations sont aussi proposées aux pharmaciens pour les aider à savoir gérer au mieux les situations conflictuelles. Elles peuvent être proposées en formation continue, dans le cadre du DPC, ou par des entreprises privées (avec des sessions animées par des anciens membres du RAID ou des forces de l’ordre). En formation initiale, des universités, comme celle d’Angers, travaillent aussi à la mise en place prochaine de cours pour former les étudiants à la « désescalade », soit comment faire en sorte qu’une situation ne dégénère pas avec un patient, quelles choses doit-on dire ou pas pour éviter le conflit…
Justement, comment un pharmacien peut-il empêcher qu’une situation ne s’envenime avec un patient potentiellement agressif ?
Le pharmacien est amené à gérer la frustration de patients qui vont avoir une réponse négative à leur demande. Refuser, cela fait partie de notre travail. Beaucoup de situations de conflit ont pour origine un refus de délivrance. Il est premièrement important d’écouter et de comprendre les besoins du patient. Puis, lui expliquer notre décision, faire preuve de pédagogie. Ne pas élever le ton, ne pas s’opposer frontalement au patient, rester cordial, même si ce n’est pas toujours simple.
Les pharmaciens font aussi face à des insultes et des menaces sur les réseaux sociaux, comment réagir face à cela ?
J’ai eu récemment le cas d’un patient qui a publié des commentaires menaçants à mon égard après un refus de délivrance pour un substitut de stupéfiant. Sur les réseaux, j’ai répondu à son message en lui demandant de me confirmer de quel médicament il s’agissait. Le patient ne m’a pas répondu. Mon conseil aux pharmaciens, c’est de répondre à ces commentaires, systématiquement. Avec courtoisie mais aussi avec fermeté, pour ne pas laisser un seul son de cloche se faire entendre.
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