Phobies

Le virtuel, pour chasser une peur bien réelle

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Publié le 27/05/2022
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Alors que les vacances d'été arrivent, nombreux sont vos clients à rêver de partir. Mais si le transport aérien est le mode privilégié des amateurs d'exotisme, la peur de l'avion empêche certains d'embarquer. Et si la solution venait du virtuel ?
34 % des Français déclarent avoir peur de l'accident d'avion

34 % des Français déclarent avoir peur de l'accident d'avion
Crédit photo : VOISIN/PHANIE

La phobie de l'avion, ou l'aviophobie désigne la peur panique que certains – ou certaines — ressentent lorsqu'ils se retrouvent à voyager par les airs, ou parfois même, rien qu'à l'idée d'embarquer. Elle toucherait, selon les estimations, entre 2,5 et 6,5 % de la population. Même sans aller jusqu'à la phobie, la peur de l'avion est très répandue. Selon un sondage IFOP datant de 2015, 34 % des Français déclarent avoir peur d'un accident, et selon un autre de l’association internationale du transport aérien (IATA), environ 20 % des voyageurs ressentent une certaine forme d'anxiété en avion.

La réalité virtuelle en renfort

S'il existe depuis plusieurs décennies des stages de thérapie très efficaces organisés par les grandes compagnies aériennes, leur prix et les longues listes d'attente peuvent s'avérer rédhibitoires. Mais depuis quelques années, une nouvelle offre a vu le jour : la thérapie par réalité virtuelle. Et c'est très sérieux. « La thérapie par réalité virtuelle exploite le concept d’exposition en thérapie cognitive et comportementale », explique Alexandre Dussaud, psychologue chez C2Care, une entreprise qui développe des logiciels thérapeutiques en réalité virtuelle. « Nous exposons la personne à la situation qui génère de l’anxiété. Cette anxiété va inévitablement descendre avec le temps, car elle ne peut pas rester en permanence au même niveau. Une fois redescendue, un phénomène d’habituation à la situation se crée et, à force d’exposition, la phobie disparaît. »

On pourrait croire que le virtuel ne sera jamais à la hauteur du réel, mais notre cerveau est en réalité assez facile à tromper. « Nous avons une réponse émotionnelle similaire en situation réelle car ce sont les mêmes circuits neuronaux qui vont s’activer », reprend Alexandre Dussaud. En clair, l'illusion, même à la pleine connaissance du sujet, est parfaite… « La réalité virtuelle est bien plus immersive que les autres médias, car le sujet est actif dans un environnement en 3D », confirme Fanny Levy, médecin psychiatre chez MyReve et auteure de « La thérapie par la réalité virtuelle dans la prise en charge des troubles anxieux ».

Une expérience sur-mesure

L'avantage de la réalité virtuelle, c'est aussi qu'elle est entièrement malléable, et que les méthodes sont variées. Le patient peut être laissé en totale autonomie pour se confronter à ses peurs après entretien avec un psychiatre, ou suivre des séances régulières (généralement 2 à 3 par mois sur 3 à 7 mois), à distance et à son domicile, accompagné d'un psychologue, qui contrôle l'environnement en temps réel : lumières, intensité des turbulences, degré de remplissage de l'avion, regard des autres passagers, et bien plus encore. Ainsi, pas besoin de réserver 15 billets d'avion pour s'exposer au vol, on peut enchaîner les décollages ou des situations spécifiques, et éviter de se ridiculiser en public. Si les prix varient, ils se rejoignent sur un point : ils sont notablement inférieurs à ceux des stages contre la phobie de l'avion proposés par les compagnies aériennes…

Une technologie en progression constante

Si la réalité virtuelle en tant qu'outil, notamment de divertissement, n'est connue du grand public que depuis quelques années, son utilisation dans le traitement des phobies est bien plus ancienne. « Nous avons beaucoup de recul sur l'efficacité du soin des pathologies avec la réalité virtuelle : les premières publications sur le sujet remontent aux années quatre-vingt-dix, et certains hôpitaux utilisent les thérapies en VR depuis plus d'une décennie, bien avant son accessibilité au grand public », rappelle Fanny Levy. Outre la peur de l'avion, la peur du vide, de la foule, de l'enfermement, et de nombreux autres troubles anxieux sont traitables par cette même technologie. Vous savez quoi faire…

 

 

François Tassain

Source : Le Quotidien du Pharmacien