Un décret impose désormais des obligations plus strictes aux entreprises pharmaceutiques qui envisagent d'arrêter la commercialisation de médicaments d’intérêt thérapeutique majeur (MITM). Une mesure qui vise à garantir la continuité d'approvisionnement.
Dès la déclaration de cessation ou suspension de la commercialisation d'un médicament classé comme étant d’intérêt thérapeutique majeur (MITM), les groupes pharmaceutiques devront désormais joindre un plan de mesures visant à garantir la continuité d’accès au traitement « pendant le délai nécessaire à la mise en place des solutions alternatives », précise ce décret publié dans le « Journal officiel » du 5 août. Les laboratoires sont aussi tenus de détailler l’impact pour les patients et les alternatives disponibles auprès de l'Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM), qui dispose ensuite d’un délai de deux mois pour estimer si les alternatives thérapeutiques sont suffisantes. Si ce n’est pas le cas, la société pharmaceutique qui détient ou exploite l'autorisation de mise sur le marché (AMM) du médicament devra alors « mettre tous les moyens en œuvre pour trouver un repreneur ». Selon le texte réglementaire, l’ANSM peut même aller jusqu’à demander à un laboratoire de céder « à titre gracieux et pour une période temporaire » les droits de fabrication et d’exploitation du médicament à « une structure pharmaceutique publique » pour continuer d'approvisionner le marché français. « Quand il y a un arrêt de commercialisation ou une tension sur un MITM, l’ANSM demande déjà aux industriels d’appliquer certaines mesures comme ne plus approvisionner en direct ou stopper les exportations, décrypte Lucie Bourdy-Dubois, présidente de la commission Métier pharmacien de la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF). Ce décret, qui reprend des mesures de police sanitaire introduites dans la loi de financement de la Sécurité sociale pour 2024, permet en fait à l’ANSM d’imposer des mesures et non plus seulement de les demander », complète-t-elle.
Fin 2024, plus de 8 000 médicaments (antibiotiques, anticancéreux, traitements pour maladies rares, etc.) étaient inscrits sur la liste des MITM. Lorsque des ruptures ou risques de ruptures concernent ces médicaments essentiels, les laboratoires doivent les déclarer. Depuis 2021, ils sont aussi tenus de constituer deux mois de stocks de sécurité pour les MITM et même quatre mois pour les MITM qui ont déjà fait l’objet de ruptures de stock ou de risques de ruptures de stock réguliers sur les deux dernières années.
Ce même décret prévoit par ailleurs une autre mesure : permettre au ministère de la Santé d’autoriser lui-même par arrêté la réalisation de préparations spéciales en officine à titre exceptionnel et temporaire. Des préparations qui sont uniquement destinées aux patients du médecin prescripteur. « Jusqu’à présent, ces arrêtés étaient pris par la direction générale de la santé (DGS), rappelle Sébastien Gallice, titulaire à Marseille et président des Pharmaciens des préparatoires de France (PREF). Désormais ce sera le ministère qui s’en chargera, mais cela ne changera pas grand-chose en pratique », analyse-t-il.
L’officinal espère surtout que les discussions avec l’assurance-maladie vont enfin avancer pour éviter des situations comparables à ce qui l’on a observé avec la sertraline il y a quelques semaines. Si certaines officines ont été autorisées à réaliser des préparations magistrales pour faire face aux tensions d’approvisionnement sur ce médicament, les tarifs fixés par l’arrêté étaient tellement faibles que de nombre d’entre elles ont préféré y renoncer. « Nous avons des solutions pour faire face à ces pénuries, nous savons fabriquer et nous savons le faire vite. Pour cela, il nous faut plus de flexibilité et que l’assurance-maladie propose des tarifs conformes à la réalité que nous vivons. Sur la sertraline, la négociation sur les tarifs était totalement hors-sol, la CNAM n’avait apparemment pas conscience que les pharmaciens doivent payer des charges, des salaires… », se désole-t-il. Sébastien Gallice rappelle l’aussi l’importance d’éviter à tout prix un système à deux vitesses si des préparations ne sont pas prises en charge et espère donc la reprise d’un dialogue constructif avec l’assurance-maladie, car le problème des ruptures n’est pas près d’être réglé… « Au contraire, avec les baisses de prix qui sont envisagés, on risque de voir d’autres produits en rupture de stock dans les prochains mois », prévient-il.
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