Selon le rapport du GIEC (groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat), il n’est pas trop tard pour agir et limiter le réchauffement climatique, mais le temps presse. Dans cette course contre la montre, l'engagement des industriels, dont les entreprises du médicament et des produits de santé, à réduire leur empreinte environnementale est décisif.
La transition écologique devient réalité
Et c'est possible ! Dans la lignée des accords de Paris pour le climat et fidèle aux actions engagées depuis son origine, le groupe Pierre Fabre s’est ainsi fixé l’objectif de réduire de 30 % les émissions de CO2 et de 25 % la consommation d’énergie d’ici 2025. Pour relever ces défis, il a créé en 2019 l’entité Green Mission portant les dynamiques naturalité, biodiversité et RSE (responsabilité sociale et environnementale), et développement durable. « La nature ne fait pas de déchets. Notre objectif est d’appliquer du mieux possible ce principe à notre activité. Green Mission intervient de façon transversale auprès de toutes les activités du groupe pour soutenir nos engagements en faveur du développement durable, de la culture des plantes à l’emballage des produits finis », explique Florence Guillaume, directrice du département Green Mission au sein du groupe Pierre Fabre. Et si déchets il y a, ils sont valorisés. « Sur notre site de production dermocosmétique de Soual, le chauffage (locaux et eau) est assuré par une chaudière biomasse qui fonctionne avec les résidus d’extraction des plantes provenant de notre usine de Gaillac, toute proche. Les cendres produites par la chaudière sont ensuite réutilisées pour amender les sols. » Autre objectif, avoir au moins 50 % de produits socio-éco-conçus sur l'ensemble du catalogue du groupe, d’ici 2023 : « pour évaluer le niveau de socio-éco-conception, nous nous appuyons sur le Green Impact Index, un système de cotation que nous avons lancé en juin 2021 et dont la méthodologie est cautionnée par AFNOR certification. À terme, seuls les produits notés A ou B seront retenus. »
Ne pas laisser d'empreinte
Comme Pierre Fabre, d’autres laboratoires de produits de santé relèvent le défi de la transition écologique et dévoilent les uns après les autres leur stratégie de réduction d’émission des gaz à effet de serre pour les dix ou vingt ans à venir. D’autant plus que cette démarche écologique est loin d’entraver la prospérité économique, bien au contraire. Pour concrétiser les concepts d'écoconception et d'écoproduction, des solutions innovantes émergent à toutes les étapes de la chaîne pharmaceutique. Au niveau de la synthèse des principes actifs par exemple, comme l'illustre le procédé développé par la start-up Separative : basé sur la chromatographie multicapillaire haute performance, il permet de produire une insuline avec un taux d'émission de gaz à effet de serre réduit de plus d'un tiers par rapport à une méthode standard.
Face à l'urgence, il faut une dynamique collective
Vu de l’extérieur pourtant, la mise en œuvre des actions concrètes peut paraître insuffisamment rapide. « Ceci s’explique par des processus de production des médicaments complexes, qu’on ne peut pas transformer du jour au lendemain. En outre, les transformations mises en place pour réduire l'empreinte carbone ne doivent pas compromettre la mise à disposition pérenne d’un médicament, qui est notre première mission », note le docteur Thomas Borel, directeur recherche, innovation, santé publique et engagement sociétal au sein du LEEM. Autre constat, l'engagement pour la transition écologique apparaît inégal dans le secteur pharmaceutique, d’où l’idée du LEEM de proposer une dynamique collective en créant un plan d’engagement sociétal. Baptisé PACTES, ce dispositif a vocation à permettre aux entreprises volontaires de s’inscrire dans la démarche RSE. « Il s'agit d'un système d’auto-évaluation pour aider les acteurs à entrer plus activement dans une dynamique de réponse aux principales attentes sociétales. Il est construit autour de six axes pour lesquels nous avons défini des engagements et des indicateurs de maturité associés. Par exemple, pour l'axe environnement, un des engagements est de rester sous le seuil de 1,5 °C de réchauffement climatique, conformément aux accords de Paris, à l'horizon 2040. Le premier niveau de maturité associé est, pour chaque entreprise, de réaliser un bilan carbone. Pour faciliter ce travail, nous proposons un outil de recueil dédié. » En 2021, trente-quatre entreprises se sont mobilisées pour documenter les indicateurs fixés par le PACTES, soit plus de la moitié du chiffre d’affaires des entreprises du médicament.
Transition écologique : l'affaire de tous
Certains laboratoires comme Pierre Fabre ont choisi d'embarquer les pharmaciens d’officine dans une démarche commune. Avec le programme des Pharmacies Engagées Green (réalisé avec la société Primum non nocere, spécialiste RSE), les pharmaciens participant (45 en 2022) évaluent leur niveau d’engagement RSE, et mettent en place des actions d’amélioration pour décrocher le label THQSE (très haute qualité sanitaire, sociale et environnementale). De même, la nouvelle génération de pharmaciens devrait alimenter cette dynamique collective en faveur de la transition écologique dans le secteur pharmaceutique. En 2018, Clara Mourgues, étudiante en pharmacie et actuelle vice-présidente en charge de la transition écologique et santé environnementale au sein de l’ANEPF a signé le manifeste pour un réveil écologique, initié par des étudiants et des jeunes diplômés d'horizons divers : « le message de ce manifeste est fort : notre choix de travailler ou de ne pas travailler pour une entreprise est aujourd'hui déterminé par son niveau d'engagement dans la transition écologique. Cette liberté peut être un levier pour convaincre des entreprises de passer à l’action. »
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