Une réforme prévue à la loi de financement de la Sécurité sociale pour 2024, applicable au 1er janvier 2025 et restée jusqu’à présent indolore. Pourquoi ? La raison en est simple, elle ne sera appliquée qu’en 2026 sur les revenus de 2025. En effet, ceux-ci n’étant connus qu’en juillet 2026, à l’issue de la déclaration annuelle, la baisse de CSG-CRDS découlant de ce changement d’assiette ne sera effective qu’à cette date, comme l’explique la Caisse d’assurance vieillesse des pharmaciens (CAVP). « Afin de faire coïncider la baisse de CSG-CRDS et le prélèvement des cotisations sociales, celui-ci ne sera pris en compte qu’au moment de la régularisation des cotisations sociales 2025, soit également en juillet 2026. »
Ce texte, qui prévoit une refonte des modalités de calcul de l’assiette des cotisations et des contributions sociales (CSG-CRDS) des travailleurs indépendants, va-t-il pénaliser un pharmacien sur quatre ? C’est en tout cas ce qu’avaient prédit les représentants de la profession lorsque du passage en force, par la voie d’un 49.3, du projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2024 ? À l’examen final, cette réforme pourrait être une opération neutre pour les titulaires d’officine, comme l’analyse Philippe Berthelot, président de la Caisse d’assurance-vieillesse des pharmaciens (CAVP).
Une assiette plus large que l’assiette actuelle
Retour sur les principes de cette réforme. Celle-ci simplifie le calcul des prélèvements sociaux et les rend plus prévisibles, promet la Direction de la Sécurité sociale (DSS). Un seul calcul suffit pour établir l’assiette de cotisations. Autre avantage, selon le législateur, cette assiette unique est supérieure à l’assiette actuelle de cotisations et inférieure à l’assiette actuelle de la CSG-CRDS. Par conséquent, selon cette logique, les cotisations finançant un risque contributif – retraite de base et retraite complémentaire- auront plus de poids.
L’État n’en serait qu’au mi-parcours de sa réforme s’il ne relevait pas le taux de cotisation vieillesse de base à 8,73 %, contre 8,53 % actuellement.
Le législateur a ainsi conçu une nouvelle assiette de cotisations qui revient à un « superbrut ». Là où aujourd’hui les cotisations sont calculées sur un montant composé de la CSG non déductible, de la CRDS, de l’IR et du revenu net, le « superbrut » sera, lui, constitué du chiffre d’affaires auquel seront soustraites les charges autres que les prélèvements sociaux. Y sera ensuite appliqué un abattement de 26 % (plafonné à 130 % du PASS (1) ).
La mise en place de cette réforme ne se traduit pas une hausse du taux de la cotisation vieillesse de base à 8,73 %, contre 8,53 % actuellement. Une augmentation de 0,5 point de cotisation qui s’avérera sans doute bénéfique à terme. Le pharmacien, de facto plus contributif, verra ainsi sa retraite du régime de base augmenter (2) « Cela permettra l’acquisition de 557 points au maximum par an », confirme Philippe Berthelot. Les pharmaciens titulaires devraient logiquement sortir gagnants de cette réforme. Tout au moins lorsqu’ils auront fait valoir leurs droits à la retraite. En contrepartie, afin d’amortir la perte de CSG, la majorité des titulaires subira une hausse de ses cotisations à l’assurance-maladie de 6,5 % à 7,7 %, voire à 8,5 %. Seront impactés par cette mesure les pharmaciens dont le revenu dépasse respectivement 200 % du PASS (soit 92 736 euros) et 300 % du PASS (soit 139 104 euros). Il s’agit donc d’une nouvelle contribution majorée, mais sans que cette fois celle-ci ouvre des droits supplémentaires.
L’État nous a demandé de compenser cette baisse des prélèvements sociaux par une hausse équivalente de nos cotisations au régime complémentaire par répartition (RCR)
Philippe Berthelot, président de la CAVP
Neutralité financière
Pour autant, en raison d’une forte diminution de la CSG équivalente à 61 millions d’euros (chiffre 2025), la profession reste bénéficiaire au bout du compte. À hauteur de 10 millions d’euros, comme l’annonce Philippe Berthelot, qui en fait la démonstration : « le nouveau calcul de l’assiette sociale et les nouveaux barèmes d’assurance vieillesse de base et d’assurance-maladie induisent, pour les pharmaciens, une hausse des cotisations sociales de 51 millions et, par conséquent, un solde positif de 10 millions d’euros, résultant de la diminution nette des prélèvements sociaux pour 2025. »
Pas question cependant d’octroyer ce cadeau à la profession. En tout cas pas directement, puisque cela reviendrait, de la part de l’État, à trahir l’esprit de sa réforme. « Pour assurer la neutralité financière de cette réforme, l’État nous a demandé de compenser cette baisse des prélèvements sociaux par une hausse équivalente de nos cotisations au régime complémentaire par répartition (RCR) », explique Philippe Berthelot, indiquant que le Conseil d’administration a voté l’affectation de cette somme au profit du Régime complémentaire par répartition (RCR). « Nous allons instituer un taux d’appel de 105,4 %. Le taux de cotisation au RCR augmentera ainsi de 5,4 % à partir du 1er janvier 2026. La cotisation passera ainsi de 7 115 euros actuellement à 7 500 euros », expose Philippe Berthelot, indépendamment des autres revalorisations qui seraient votées par les administrateurs à la fin de l’année ajoutant que « cette mesure permettra de garantir la soutenabilité de notre régime fragilisé par une démographie professionnelle incertaine ». Cette réforme qui promet de simplifier le calcul des prélèvements sociaux et d’ouvrir davantage de droits sociaux aurait-elle pour autre corollaire celui de pérenniser le régime de retraite de la profession ? L’avenir le dira.
(1) Plafond annuel de Sécurité sociale. 47 100 euros au 1er janvier.
(2) La pension servie par la CAVP se compose pour 29,8 % par le régime de base, pour 33,9 % par la retraite complémentaire par répartition (RCR) et pour 36,3 % par la retraite complémentaire par capitalisation (RCC).
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