Chaque année, le réseau pharmaceutique français perd environ 300 officines. Si la situation n’est pas encore aussi dramatique qu’avec les médecins, l’apparition de déserts pharmaceutiques, dont nous semblions être préservés jusqu’à présent, est devenue un risque concret. Aujourd’hui, un pharmacien sur deux estime que le maillage officinal est menacé selon une enquête réalisée pour « Le Quotidien du pharmacien » par CallMedicall auprès de plus de 1 000 pharmacies (voir article page 31). Aides de 20 000 euros par an accordées à un nombre restreint de pharmacies sélectionnées car localisées dans des territoires dits fragiles, création par voie expérimentale d’antennes de pharmacies pour pallier la fermeture d’officines dans quelques villages… les solutions qui se mettent en place sont des initiatives d’une ampleur trop limitée pour pouvoir répondre à la problématique plus générale qui se pose aujourd’hui. Comment garantir un avenir et un équilibre économique sur le long terme à ces “petites” officines sises dans des zones rurales, au chiffre d’affaires inévitablement inférieur à la moyenne nationale et qui auront plus de difficultés à s’adapter à la transformation du métier ? Un enjeu auquel il faudra savoir répondre dans les années à venir, pour l’avenir de la profession, mais aussi pour garantir un accès aux soins suffisant à des patients déjà frappés de plein fouet par la désertification médicale.
L’octroi d’aides financières aux pharmacies installées dans des territoires identifiés comme fragiles par les agences régionales de santé (ARS) a été négocié avec l’assurance-maladie lors de la signature de l’avenant 1 à la convention pharmaceutique, en juin 2024. Pour en bénéficier, les officinaux doivent répondre à un certain nombre de critères : la pharmacie doit être la seule de sa commune, le titulaire ne doit pas avoir été condamné pour fraude, l’officine doit présenter un chiffre d’affaires inférieur au million d’euros TTC l’année de la demande et, bien sûr, celle-ci doit se trouver dans l’un des territoires fragiles définis par les ARS. « Nous partagions avec la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF) (seul syndicat à avoir signé cet avenant) l’urgence qu’il y avait à mettre en place un dispositif de protection du maillage officinal, explique tout d’abord Marguerite Cazeneuve, directrice déléguée de la Caisse nationale de l’assurance-maladie (CNAM). Pour l’assurance-maladie, c’est un engagement qui est extrêmement clair. Nous sommes déjà confrontés aux déserts médicaux, qui vont encore s’aggraver, l’idée était donc d’avoir un filet de sécurité pour prévenir la désertification pharmaceutique. L’objectif est simple : faire en sorte qu’il ne puisse pas y avoir de fermetures d’officines lorsque celles-ci sont les dernières de leur commune. Autrement dit, assurer la pérennité du maillage officinal », et préserver aussi la qualité du service proposé aux assurés sociaux.
L’aide en question est donc un soutien financier qui a vocation à être « ponctuel » pour le moment. Plafonnée à 20 000 euros par an et par officine, renouvelable sur une durée maximale de trois ans, cette aide devait servir à 1 000 pharmacies à travers le territoire, comme accepté par l’assurance-maladie. Problème, le travail d’identification mené par les ARS, n’a finalement permis de retenir que 200 officines environ. Certaines d’entre elles ont été directement contactées pour bénéficier de ce soutien financier, d’autres ont également postulé par elles-mêmes. Il est d’ailleurs encore possible de le faire, le dépôt de candidatures étant ouvert jusqu’au 15 octobre. « Pour des raisons juridiques, il nous est impossible d’aller plus loin que ces 200 pharmacies aujourd’hui, admet Marguerite Cazeneuve. L’objectif c’est de corriger cela et, pour ce faire, nous avons besoin d’une modification législative qui nous permettra de revenir aux critères conventionnels. Nous avons justement des opportunités législatives qui vont se présenter et que nous allons tenter de saisir pour que 1 000 officines puissent être aidées », s’engage-t-elle. Comme elle le concède par ailleurs, ce dispositif encore balbutiant est aujourd’hui à un stade « expérimental ». Son impact, comme son avenir sur le long terme, est aujourd’hui incertain. « Cela permet d’injecter immédiatement de l’argent à des pharmacies qui sont aujourd’hui en difficulté, défend-elle. Nous avons retenu l’idée de 20 000 euros pour 1 000 officines mais peut-être qu’à l’avenir il faudra accorder plus d’argent à moins d’officines… C’est une réflexion à avoir, mais la question qui va surtout se poser c’est celle de la pérennisation de cette aide. Il n’y a pas de raison que les officines aujourd’hui en difficulté économiquement retrouvent un équilibre dans les cinq ans, donc la question d’ancrer de manière plus durable cette aide se pose déjà », explique Marguerite Cazeneuve.
Nous ne voulons pas d’une « politique agricole commune » appliquée à la pharmacie
Pierre-Olivier Variot, président de l’USPO
Ces aides sont une idée certes imparfaite, nous allons réfléchir à la suite, mais pendant ce temps ces aides ont été accordées et des pharmacies n’ont pas fermé
Philippe Besset, président de la FSPF
… mais qui ne font pas l’unanimité au sein de la profession
Cette idée de “subventionner” ces pharmacies vulnérables ne satisfait pas tous les représentants de la profession cependant. L’Union des syndicats de pharmaciens d’officine (USPO), qui avait décidé de ne pas signer l’avenant introduisant ces aides, juge sévèrement ce dispositif. « Nous ne sommes pas favorables à cette idée de perfuser les pharmacies. De plus, la maille qui a été choisie n’était pas la bonne, comme nous le voyons tous aujourd’hui, souligne Pierre-Olivier Variot, président de l’USPO, en référence aux quelque 200 officines identifiées par les ARS contre les 1 000 attendues au départ. Si l’on veut redonner de la confiance, il faut plutôt modifier le mode de rémunération des pharmaciens, pour que les officines puissent être rentables. Nous ne voulons pas d’une « politique agricole commune » appliquée à la pharmacie », métaphorise-t-il pour expliquer la position de son syndicat. « Certaines pharmacies ont d’autres besoins que simplement recevoir de l’argent. Ce n’est pas cette aide qui va faire venir des médecins, ni permettre à une officine de trouver un repreneur, fait-il également remarquer. Dans les territoires fragiles, il faut pouvoir répondre au cas par cas. Il faut plus généralement redonner confiance dans le métier, notamment aux jeunes, pour que notre profession devienne intellectuellement et économiquement attractive. Si l’on y parvient, alors nous aurons une chance de maintenir des pharmacies dans les territoires », résume Pierre-Olivier Variot, appelant donc à des mesures plus globales.
Toujours selon le sondage CallMedicall mené pour « Le Quotidien du pharmacien », le principe et les critères choisis pour attribuer ces aides ne convainquent pas non plus les pharmaciens en exercice. Ils sont en effet 44 % à juger ces aides « insuffisantes eu égard aux besoins du réseau » et 39 % pensent qu’elles sont réparties « de façon inadaptée ». Pire, 13 % des sondés redoutent même qu’elles ne « déstabilisent l’activité des officines voisines »… Pourtant, Philippe Besset, qui a poussé fortement pour que ces aides soient inscrites dans l’avenant, tient à défendre leur existence. « Ces 20 000 euros ne sont pas une subvention, veut-il préciser. C’est une explication à un modèle économique particulier. Il faut prendre en compte la spécificité de l’exercice dans ces zones-là. Ces aides sont une idée certes imparfaite, nous allons réfléchir à la suite, mais pendant ce temps ces aides ont été accordées et des pharmacies n’ont pas fermé. Il faut continuer à réfléchir, mais nous avions besoin d’une action immédiate et simple », justifie-t-il.
L’idée d’avoir moins de rémunération indexée sur le volume et davantage sur la dispensation, c’est un mouvement déjà engagé depuis plusieurs années
Marguerite Cazeneuve, directrice déléguée de la CNAM
Nouvelles missions : peut-on réellement aller plus loin ?
Renforcer l’attractivité des pharmacies d’officine pourrait passer également par de nouvelles “nouvelles missions”. Ces dernières ont considérablement modifié l’image du métier et donné une place de choix aux pharmaciens au cœur du système de santé. « Plus le pharmacien acquiert de nouvelles compétences, mieux le système de santé se porte. Les pharmaciens sont déjà extrêmement investis sur ces nouvelles missions, on le voit avec la vaccination ou le dépistage du cancer colorectal », veut souligner Marguerite Cazeneuve, très satisfaite de voir les pharmaciens gagner en compétences. Néanmoins et comme elle le souligne, aller encore plus loin demande réflexion. « Des nouvelles missions données aux pharmaciens, il y en a déjà eu beaucoup. Le métier s’est déjà énormément transformé et le pharmacien reste, avant tout, le seul expert du médicament », rappelle-t-elle, Il faut donc aussi, et peut-être avant tout, aider les pharmaciens à exercer au mieux leur mission principale, qui est donc leur expertise sur le médicament. « Ces nouvelles missions, elles sont là, elles apportent énormément à la population mais pour la pharmacie d’officine, elles ne sont pas forcément rentables, abonde Pierre-Olivier Variot. Une formation pour la prescription des vaccins coûte 500 euros donc quand vous devez former plusieurs membres de votre équipe, il faut quelques vaccins pour que cela soit rentable. Des pharmaciens se restreignent à injecter, se refusent à prescrire à cause de cela et cela est particulièrement dommage », regrette-t-il. Complétant le dernier point abordé par Marguerite Cazeneuve, le président de l’USPO souligne lui aussi que si « ces nouvelles missions doivent être mieux rémunérées, il faut avant tout revaloriser l’action qui est au cœur du métier, soit la dispensation du médicament ». De son côté, l’assurance-maladie ne se dit pas fermée à l’idée de travailler sur une évolution du mode de rémunération de la pharmacie, loin de là. « L’idée d’avoir moins de rémunération indexée sur le volume et davantage sur la dispensation, c’est un mouvement déjà engagé depuis plusieurs années, répète Marguerite Cazeneuve. Ce mouvement de transformation ne se fait pas brutalement, il se fait au contraire très progressivement », décrit-elle. Une évolution progressive, qui doit notamment permettre aux pharmaciens d’être moins dépendants du prix du médicament. Une transformation souhaitée et souhaitable, notamment pour répondre aux objectifs en matière de bon usage, mais qui nécessite donc du temps pour se mettre définitivement en place. Un temps précieux dont de nombreuses pharmacies ne disposeront pas forcément…
Du côté de l’Union nationale des pharmacies de France (UNPF), on avance aussi une autre idée pour aider les pharmacies des zones rurales, si indispensables pour le maillage. « Le réseau officinal apporte énormément au système de santé du point de vue économique, commence par rappeler Christophe Le Gall, président de l’UNPF. L’officine a un rôle primordial et il faut que cela puisse continuer. Ce n’est pas en les perfusant qu’on va donner envie aux jeunes de s’installer, estime-t-il, rejoignant ici la position de l’USPO. Tous les actes pharmaceutiques devraient être payés au moins 15 euros. Nous proposons également la mise en place d’un coefficient, un multiplicateur comme cela existe en outre-mer, pour reconnaître la valeur du travail de ces pharmacies de proximité et compenser les volumes moindres qu’elles dispensent par une rémunération à la hauteur du service qu’elles accomplissent », soumet Christophe Le Gall. Le président de l’UNPF insiste sur un autre point : l’importance pour les officinaux de s’appuyer sur les groupements, « pour se libérer du temps sur les achats, la logistique et continuer à faire ces belles missions qui nous sont confiées aujourd’hui ».
Tous les actes pharmaceutiques devraient être payés au moins 15 euros
Christophe Le Gall, président de l’UNPF
Les pharmacies : « un réseau France Santé » déjà en place
Il y a peu, le nouveau Premier ministre, Sébastien Lecornu, a annoncé, lors d’une visite en Saône-et-Loire, son intention d’ouvrir 5 000 centres France Santé sur tout le territoire d’ici à 2027. Comme résumé sur le site « info.gouv.fr », l’idée est de construire un « réseau de soins de proximité assurant, a minima par bassin de vie, une offre à environ 30 minutes autour de chez soi, à l’image de ce que proposent les maisons France services ». À l’image aussi de ce qu’offre le réseau officinal qui, lui, existe déjà et continuera à exister si on lui donne les moyens de survivre. En France, on dénombre par exemple 5 475 communes disposant d’une seule officine. Des pharmacies essentielles pour l’accès aux soins et qui sont aujourd’hui les premières menacées de disparition. Lorsqu’elles baissent le rideau, ce sont tous les habitants d’une commune et parfois ceux de nombreux villages alentour qui perdent un accès de proximité à leurs traitements et au conseil du pharmacien. Depuis le début de l’année, 25 villes ou villages ont vécu cette douloureuse expérience en perdant leur unique officine. « Il faut s’assurer que les officines soient attractives dans les territoires, mais aussi qu’il y ait à côté l’ensemble des professionnels nécessaires, en premier lieu les médecins », commence par affirmer Philippe Besset, président de la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF). « Ces propos du Premier ministre sur les territoires santé sont fondamentaux mais il y a un maillage qui existe déjà, qui ne demande qu’à prendre en main différentes missions, mais il faut lui donner les moyens de le faire. Pourquoi le détruire pour construire autre chose ? », interroge Pierre-Olivier Variot. Ces structures annoncées par le Premier ministre nécessiteront en effet la présence de médecins, lesquels, ce n’est pas un secret, sont déjà trop peu nombreux dans ces territoires et risquent de le rester dans les années à venir. « Le Premier ministre l’a dit, il est attaché à la liberté d’installation des libéraux mais il a aussi dit que l’État devait assurer le service si ces derniers venaient à faire défaut. C’est donc un avertissement envoyé aux libéraux pour qu’on fasse le travail », analyse Philippe Besset, en réponse à la question de soutenir plus fortement des mesures visant à limiter la liberté d’installation des praticiens.
Antennes de pharmacie : un concept cible de violentes critiques
Autre solution déjà en place pour préserver le maillage, les antennes de pharmacie. À ce jour, quatre sont déjà opérationnelles, en Corse, en Lozère, dans l’Aveyron et dans le Gers, sous la forme d’expérimentations qui dureront au maximum trois ans afin de vérifier si elles peuvent être rentables et si elles offrent un service suffisamment intéressant à la population. Les quelques projets d’antennes validés par les ARS concernent aujourd’hui des communes dont l’unique officine a fermé relativement peu de temps avant le lancement du projet d’antenne. Des établissements qui ont un point commun : ils ont tous dû fermer faute de repreneur. Si le principe de l’antenne peut sembler parfaitement adapté à la situation de certains villages isolés qui ne semblaient pas avoir d’autre option pour conserver un établissement pharmaceutique, l’idée ne plaît pas à tout le monde, c’est un euphémisme.
Parmi les plus farouches opposants à l’antenne de pharmacie, on retrouve Philippe Besset, président de la FSPF. « Ce concept, c’est n’importe quoi, critique-t-il sans détour. Quelle est cette idée saugrenue qui consiste à dépenser des dizaines voire des centaines de milliers d’euros pour mettre une antenne à un endroit où il y avait une pharmacie ? Faisons en sorte qu’elles ne ferment pas, qu’elles soient attractives et qu’elles permettent un accès aux soins », propose-t-il plutôt, refusant donc l’idée de voir l’antenne de pharmacie comme un système à développer. « Le maillage territorial existe déjà, il ne faut pas en créer un autre », appuie-t-il.
Un avis tranché que ne partage pas Pierre-Olivier Variot qui estime, lui, que le modèle des antennes peut au contraire être intéressant. « Aujourd’hui, nous sommes au stade de l’expérimentation, il y a des projets qui sont plus ou moins bien faits, mais pour nous c’est un concept qui est valable, car si une antenne existe c’est parce qu’une pharmacie, qu’elle remplace, n’a pu être transmise. Les antennes peuvent être une vraie solution pour qu’une pharmacie, dans un territoire donné, puisse apporter un accès aux soins », pense-t-il au contraire. Pour Christophe Le Gall, qui ne porte pas de jugement définitif sur les antennes, ce principe reste, quoi qu’il en soit une solution « précaire ».
Pour les pharmaciens interrogés dans le cadre du sondage CallMedicall, l’antenne ne suscite pas non plus un enthousiasme débordant. Près d’un tiers du panel juge le dispositif « difficile à mettre en œuvre », un quart redoute qu’il ne « déstabilise l’activité des pharmacies voisines », 20 % le trouvent « mal adapté aux réalités du terrain » et seulement 6 % en ont une opinion plutôt positive… Marguerite Cazeneuve l’affirme de toute façon, l’assurance-maladie n’entend pas généraliser le modèle de l’antenne. « Notre objectif n’est pas de mettre des antennes partout en France », confirme-t-elle. Pour l’instant, avec un nombre maximal de douze expérimentations dans six régions (total qui risque de plus de ne pas être atteint), force est de constater que nous ne sommes en effet pas près de voir des antennes éclore partout sur le territoire.
Susciter des installations en zone rurale en « Racontant des histoires de vie »
Toujours dans l’idée de défendre le maillage, la FSPF a récemment relancé l’association Pharmacie rurale. « Sa première mission a été de faire un état des lieux, une cartographie, pour voir notamment quelle population est desservie par une pharmacie donnée, quelles sont les officines qui ferment avec des focus sur celles qui sont les seules de leur village… Ce que nous voulons aussi c’est raconter des histoires, celles des pharmaciens, des équipes, des patients, des villages et aussi se projeter sur l’avenir. » Contrairement à l’idée que l’on pourrait avoir au regard de la situation et de l’actualité, entre difficultés économiques et fermetures qui s’accélèrent, Philippe Besset estime que l’avenir n’est pas si sombre, bien au contraire. « L’avenir est plutôt rose, pense-t-il étonnamment. Selon un sondage que nous avons mené, sur 1 800 des quelque 5 000 titulaires seuls dans leur commune, 85 % sont heureux de leur exercice, n’iraient pas s’installer ailleurs et conseillent aux jeunes de venir s’y installer », tient-il à souligner.
Dans certains coins de France, ce passage de témoin s’opère déjà. « Dans les villages de l’Aude, département où j’exerce, l’ensemble des officines ont été transmises ces dernières années. Les pharmaciens qui sont dans ces communes ont entre 30 et 40 ans. L’aspect “sud” attire peut-être mais il n’est pas en tout pas exact de dire que ces pharmacies rurales n’intéressent personne. Il faut donc reprendre le sujet, trouver un modèle économique convenable le temps des trois ans durant lesquels le dispositif d’aides sera en place et un modèle pérenne qui donne confiance en l’avenir pour les jeunes. Cela dit, le modèle économique n’est pas la seule donnée à considérer, il faut aussi raconter des histoires de vie, expliquer ce qu’est notre métier au quotidien, ce que l’on fait concrètement, pour donner envie de venir s’y installer », résume-t-il. Le but désormais, pour le président de la FSPF, c’est en effet de faire en sorte que ces officinaux ruraux, satisfaits de leur métier et de la mission qui est la leur, deviennent de véritables ambassadeurs auprès des jeunes qui songeraient à s’installer dans ces territoires mais, qui, pour diverses raisons, hésitent à franchir le pas. Philippe Besset insiste également sur le fait qu’une autre profession essentielle dans le paysage pharmaceutique, les préparateurs, sont pour beaucoup « des jeunes issus des territoires, de nos villages. Ils ont été formés localement et il y a une appétence des jeunes formés dans les territoires à y rester ». Le président de la FSPF salue également la réforme, encore à achever, du troisième cycle des études de pharmacie, qui prévoit notamment l’organisation d’un stage à effectuer pour les étudiants dans une zone rurale. « Cela donnera aussi l’envie aux jeunes de s’installer », se félicite-t-il.
Sauver le maillage : une nécessité qui se heurte au contexte économique actuel
La question de l’avenir des pharmacies rurales ne peut enfin être détachée de celle des territoires ruraux dans leur ensemble, de ces villages qui se désertifient, se dépeuplent depuis plus d’un siècle, à quelques exceptions notables. « Les gens qui vivent dans leurs villages y sont en tout cas très attachés, observe Philippe Besset. Si l’on veut que cela perdure, il faut garder des structures fondamentales », insiste-t-il en pensant, bien évidemment, aux pharmacies. Des acteurs, du monde politique pour ne pas le citer, ont-ils cependant intérêt à ne pas défendre ce maillage qui est aujourd’hui l’une des principales forces du système de santé français ? C’est ce que de récentes décisions ou projets gouvernementaux (vente en ligne, arrêté sur les remises génériques, franchises directement récupérées au comptoir…) peuvent légitimement faire croire. « Il est possible que, dans certains milieux économiques, l’idée de passer d’un maillage de 20 000 à un réseau de 14 000 officines permettrait de faire des économies d’échelle et donc de coûter moins cher à l’assurance-maladie », confirme Philippe Besset. Une volonté qui, si elle se concrétise, sera combattue avec force par la profession, mais aussi par les patients eux-mêmes, toujours prompts à défendre leur officine de proximité lorsque celle-ci est menacée.
Parmi les soutiens affirmés à la profession, il y a aussi l’assurance-maladie, veut rappeler Marguerite Cazeneuve. « Nous sommes l’institution qui est la plus convaincue de l’importance du rôle des pharmaciens », insiste-t-elle. Toutefois, si la CNAM est résolument engagée à soutenir le réseau, elle se trouve aujourd’hui dans une situation économique « catastrophique », du propre aveu de Marguerite Cazeneuve. « L’assurance-maladie va très mal et on va tous finir par le ressentir. La préparation du projet de loi de financement de la Sécurité sociale s’annonce difficile pour tout le monde, ajoute-t-elle. Nous n’aurons sans doute pas des enveloppes conventionnelles démesurées. Nous n’aurons pas deux milliards d’euros à mettre sur la table. En 2026, je ne pense pas non plus que nous aurons un énorme avenant pharmaceutique. Il faut donc être réaliste et pragmatique, il faut prendre tout ce qui peut aider ceux qui sont en le plus besoin dès qu’on le peut », conclut-elle.
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