Le Quotidien du pharmacien. - Quelles sont les principales difficultés rencontrées par les pharmaciens engagés dans la dispensation à domicile ?
Jean-Didier Bardet. - Si on met de côté celles purement liées à la période du confinement, on rencontre surtout trois difficultés. La première est la phase de recueil d’informations. Dans un contexte de dispensation à domicile, le pharmacien n’a pas - au moment de la demande -, de contact direct avec le patient. Le contact devient différé, là où le pharmacien est habitué au « spontané », avec des patients présents à l'officine. Cela requiert du pharmacien qu'il modifie ses habitudes de travail et de gestion. Un autre facteur tient dans le fait que c’est souvent le pharmacien lui-même qui assure le portage, or comme on le sait, sa présence est aussi nécessaire à l'officine. Ce qui pose un problème pour les petites pharmacies. Il y a aussi le fait que cette activité de dispensation prend du temps, qui n’est pas rémunéré.
Comment les pharmaciens peuvent-ils lever ces obstacles ?
Pour compenser le contact différé avec le patient, la validation de l’ordonnance doit se faire en deux étapes : la première à l’officine, la seconde, au domicile du patient. Tout ceci demande une grande adaptation de la part des pharmaciens, qui vont devoir gérer les problématiques identifiées au domicile du patient. On a pu voir que les tests antigéniques ont, au début, désorganisé les petites officines, qui ont dû s'adapter. De la même façon, les officines devront revoir leur organisation pour préparer les ordonnances en amont des portages, et intégrer une nouvelle façon de fonctionner.
Vous pensez qu’il y a une prise de conscience à déclencher chez les pharmaciens pour qu’ils s'engagent sur cette mission ?
Oui. La profession veut aller vers de nouvelles missions. Elle l’a montré avec la vaccination et les TAG. Mais la dispensation à domicile, tout comme les accompagnements cancer avant eux, nécessite de refondre une partie de l’organisation du travail de l’officine. Un partage d’expérience sur la façon de gérer et d’organiser l’officine pour intégrer ces nouvelles missions serait le bienvenu.
Pensez-vous qu’il faudrait rémunérer l’acte ou en modifier la réglementation ?
Le plus important est de valoriser l’expertise du pharmacien. Au sens de l’expression commune qui veut que tout travail mérite salaire. C’est un acte véritablement complémentaire de ce qu’on peut apporter au comptoir, et qui nécessite donc une rémunération spécifique. Au niveau réglementaire, les critères d’éligibilité sont un vrai frein au développement de l’activité. À l’étranger, les critères pour être inclus dans le dispositif sont très larges, afin d’ouvrir le service et de permettre au plus grand nombre de patients en difficulté d’accéder à leur traitement. En France on a tendance à le restreindre, avec des critères qui ne sont pas toujours pertinents.
* Pharmacien adjoint et maître de conférences associé à l’Université Grenoble Alpes.
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