Au lendemain d’un week-end marquant pour la profession, avec une fermeture massive des officines le 16 août, l’Union des syndicats de pharmaciens d’officine (USPO) demande solennellement au ministère de la Santé « le retrait immédiat » de l’arrêté du 4 août fixant de nouveaux plafonds de remise sur les génériques à partir du 1er septembre. Si la profession s’accorde sur un même objectif, faire annuler les dispositions prévues dans ce texte, des différences existent sur la stratégie à adopter pour gagner la bataille.
Un succès médiatique, un mouvement très suivi, « historique » même, selon les mots de l’USPO… l’appel à fermer les pharmacies le 16 août a été une incontestable réussite pour le syndicat, qui a soutenu au niveau national cette idée initialement lancée par des pharmaciens de Provence-Alpes-Côte d’Azur. « Le grand public nous soutient. Les patients nous encouragent à nous battre. Il y a un sentiment d’hostilité grandissant envers ce gouvernement au sein de la population », observe Patrick Raimond, président de l’USPO des Bouches-du-Rhône. En PACA, le mouvement a été particulièrement suivi, avec 8 à 9 pharmacies sur 10 fermées selon le syndicat, y compris dans des grandes villes comme Marseille, des stations balnéaires comme Cassis ou même dans des centres commerciaux. « C’est la plus forte mobilisation de la profession au cours des vingt dernières années, l’Ordre des pharmaciens ou l’agence régionale de santé l’ont eux-mêmes reconnu, rapporte Patrick Raymond. C’est une action qui n’est pas neutre, à titre personnel fermer le 16 août m’a coûté 4 000 euros de trésorerie », confie-t-il, espérant désormais que la profession récoltera les fruits de cet engagement. « Nous avons marqué un essai, maintenant il faut le transformer », métaphorise-t-il.
Comme l’explique Patrick Raimond, son syndicat espère que le succès de la mobilisation permettra de convaincre l’exécutif de faire machine arrière au plus vite. « Nous aimerions éviter l’aléa parlementaire », admet en effet le président de l’USPO des Bouches-du-Rhône. Une ambition affirmée par le syndicat ce 18 août dans un communiqué. Désirant surfer sur le « succès indéniable » du week-end, l’USPO demande « le retrait immédiat de l’arrêté destructeur », qui va fixer un plafond de remise à 30 % sur les génériques au 1er septembre, avant même un passage à 20 % en 2027… Dans ce même texte, le syndicat demande une nouvelle fois « l'ouverture d'un avenant 2 à la convention » et le début de « négociations permettant une profonde modification de la rémunération des pharmaciens, indépendante des prix et des volumes des produits de santé ».
Il y a quelques jours, l’USPO avait également annoncé son intention de saisir la justice pour contester l’arrêté, à travers « un recours pour inaction en matière d'accès aux soins » devant le tribunal administratif. Le syndicat affirmait aussi sa volonté de solliciter le Conseil constitutionnel, via une Question prioritaire de constitutionnalité (QPC), afin de démontrer « le caractère inconstitutionnel de cet arrêté issu de la LFSS 2025, pris sans étude d’impact, sans justification sanitaire ni économique, et dont les conséquences mettent en péril l’accès aux soins dans de nombreux territoires », argumente le syndicat.
De son côté la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF), qui n’avait pas relayé l’appel à fermer le 16 août au niveau national, ne dévie pas de sa ligne. Pour effacer les conditions prévues par l’arrêté du 4 août, deux options sont à privilégier selon le syndicat. La voie parlementaire, en convainquant des députés de faire passer un amendement dans le prochain Projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) ou, option encore plus radicale, « changer de gouvernement », comme l’avait déjà évoqué le président du syndicat, Philippe Besset. Quant à l’appel au retrait immédiat de l’arrêté, Frank Basque, secrétaire général de la FSPF et président de la commission vie syndicale, n’y croit pas une seconde. « Il est facile d’être dans l’incantation, mais il faut se souvenir de deux choses, souligne-t-il. Sur l’arrêté en lui-même, il y a eu un arbitrage entre le ministère de la Santé et celui de l’Économie et des Comptes publics et ce n‘est pas le premier cité qui a gagné. De plus, je ne me souviens pas avoir vu ce gouvernement reculer aussi facilement, nous l’avons vu avec la réforme des retraites », rappelle-t-il. La FSPF étudie de tout même la possibilité d’attaquer l’arrêté en justice. « Quant aux parlementaires, c’est un travail qui est déjà en cours. Nous en avons déjà sollicité plus d’une centaine depuis la manifestation du 1er juillet. Nous travaillons pour porter cet amendement et faire annuler cette mesure inacceptable, qui n’est qu’un cadeau fait à l’industrie pharmaceutique pour absorber de futures baisses de prix. C’est un travail de fourmi », synthétise-t-il.
Si le plafond à 30 % sur les remises génériques n’est appliqué officiellement qu’au 1er septembre, les conséquences économiques pour l’officine, elles, sont déjà visibles. « Quand on prive une entreprise de 30 % de ses revenus, il y a forcément de la casse, un tiers du réseau va décrocher, notamment les officines qui ont des crédits à rembourser, prévient Patrick Raimond. Les trésoreries s’enfoncent alors même que l’arrêté n’est pas encore effectif… À mon niveau, j’ai été contraint de pas renouveler les CDD de deux adjoints dont j’aurai grandement eu besoin ces prochains mois. L’un est parti en août, le deuxième l’a appris la semaine dernière », déplore-t-il. Un cas sans doute loin d’être isolé.
Vous pouvez répondre à notre sondage en ligne : « Remises génériques et difficultés économiques : redoutez-vous des licenciements dans les mois à venir ? », en cliquant sur ce lien.
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