Les pharmaciennes, qu’elles soient titulaires ou adjointes, bénéficient de droits spécifiques en matière de congé maternité et de couverture sociale. Les récentes évolutions législatives ont harmonisé ces droits entre salariées et indépendantes. Nos deux spécialistes reviennent sur les détails de ces changements.
Le Quotidien du pharmacien.- Quelle est la durée légale du congé maternité pour les pharmaciennes titulaires, y a-t-il une différence avec les adjointes ?
Bertrand Cadillon.- Depuis 2019, les pharmaciennes titulaires, en tant qu’indépendantes, bénéficient d’un congé maternité aligné sur celui des salariées, soit une durée totale de 16 semaines (112 jours) pour la naissance du premier ou second enfant. Ce congé est réparti de la manière suivante : 6 semaines avant la date présumée de l’accouchement (congé prénatal) et 10 semaines après (congé postnatal). La cessation d’activité professionnelle est obligatoire pendant au moins 8 semaines, dont 6 après l’accouchement.
Quelles sont les évolutions récentes du congé maternité en matière d’indemnisation pour les professionnelles libérales de santé ?
Frédéric Filippi.-Le décret n° 2023-790 du 17 août 2023 a introduit une modification significative concernant les conditions d’accès aux indemnités journalières pour les professionnelles libérales de santé en cas de maternité. Cette réforme vise à faciliter l’accès aux prestations maternité pour les indépendantes, notamment les primo-accédantes. Avant l’entrée en vigueur de ce décret, les professionnelles libérales devaient justifier d’une affiliation à la Sécurité sociale d’une durée minimale de dix mois pour prétendre aux indemnités journalières lors de leur congé maternité. Désormais, cette durée a été réduite à six mois. Cette mesure permet aux pharmaciennes récemment installées de bénéficier plus rapidement d’une protection sociale en cas de maternité.
Pourriez-vous nous donner un exemple concret !
Frédéric Filippi.- Prenons l’exemple de Sophie, une pharmacienne qui a débuté son activité libérale le 1er janvier 2025. En appliquant les dispositions antérieures, elle aurait dû attendre jusqu’au 1er novembre 2025 pour atteindre les dix mois d’affiliation nécessaires à l’obtention des indemnités journalières en cas de congé maternité. Avec la nouvelle réglementation, dès le 1er juillet 2025, soit après six mois d’affiliation, Sophie est éligible aux indemnités journalières si elle décide de prendre un congé maternité.
À quelles indemnités pourra prétendre Sophie pendant son congé de maternité ?
Frédéric Filippi.- Les pharmaciennes titulaires ont droit à deux types de prestations :
L’allocation forfaitaire de repos maternel : versée en deux fois, pour moitié au début du congé et pour moitié à la fin de la période obligatoire de cessation d’activité de 8 semaines. Son montant est égal à la valeur mensuelle du plafond de la sécurité sociale en vigueur à la date du premier versement, soit 3 925 euros au 1er janvier 2025.
A cela peut s’ajouter les indemnités journalières forfaitaires d’interruption d’activité : versées pendant la durée de l’arrêt, à condition de cesser toute activité professionnelle pendant au moins 8 semaines. Le montant journalier de ces indemnités est fixé par la législation en vigueur. Leur montant est calculé en fonction des revenus cotisés par la pharmacienne. Il ne peut être supérieur à 1/730 de la valeur annuelle du plafond de la sécurité sociale en vigueur à la date prévue du premier versement, soit 64,52 euros au 1er janvier 2025 par jour d’interruption d’activité.
À noter que des dispositions particulières s’appliquent pour les pharmaciennes dont le revenu serait inférieur à 10 % du plafond de la sécurité sociale. Un simulateur est mis à disposition sur le site ameli.fr (Simulateur d'indemnités journalières - Accueil | ameli.fr | Assuré
Quelles sont aujourd’hui les spécificités de la couverture sociale pour les pharmaciennes titulaires ?
Bertrand Cadillon.- Les pharmaciennes titulaires relèvent du régime des travailleurs indépendants pour leur couverture sociale. Elles cotisent à ce titre pour l’assurance maladie, la maternité, la retraite et l’invalidité-décès. Il est important de noter que les prestations servies peuvent différer de celles des salariées, notamment en matière d’indemnités journalières en cas d’arrêt maladie. Il est donc conseillé aux pharmaciennes dirigeantes de compléter leur protection sociale par des assurances prévoyance privées adaptées à leurs besoins spécifiques dans le cadre de contrats dits Loi Madelin qui peuvent être pris en charge par leur officine.
Comment s’organiser dans une officine lors de l’absence pour maternité d’une pharmacienne adjointe ?
Bertrand Cadillon.- En cas d’absence d’une pharmacienne adjointe pour congé maternité, le titulaire doit assurer la continuité du service pharmaceutique. Cela peut impliquer le recrutement d’un pharmacien remplaçant sous contrat à durée déterminée ou la réorganisation des horaires de l’équipe existante. Il est essentiel de respecter les obligations légales en matière de présence pharmaceutique et de veiller à ce que l’officine soit toujours sous la supervision d’un pharmacien diplômé. Si l’absence dépasse une certaine durée (généralement 8 jours), une déclaration doit être faite auprès de l’Agence Régionale de Santé (ARS) et du Conseil régional de l’Ordre des pharmaciens (CROP), en précisant le nom et la qualité du remplaçant.
Lorsque la pharmacie est gérée par une association, en particulier si les titulaires sont en âge d’avoir des enfants, il est également conseillé de prévoir cette hypothèse de remplacement ainsi que les modalités dans le règlement intérieur.
En conclusion, peut-on dire que la protection de pharmacienne titulaire s’est améliorée ?
Frédéric Filippi.- Cette réforme représente une avancée notable pour les femmes exerçant en libéral dans le secteur de la santé. Elle leur offre une meilleure protection sociale dès le début de leur activité professionnelle, réduisant ainsi la période pendant laquelle elles ne pouvaient prétendre aux indemnités journalières en cas de maternité. Cela contribue à une plus grande équité entre les professionnelles libérales et les salariées en matière de droits liés à la maternité. Une bonne compréhension de ces dispositions légales permet d’assurer une gestion plus sereine de l’officine pendant les périodes d’absence pour maternité. C’est une bonne nouvelle pour les pharmaciennes qui, rappelons-le, représentaient 56 % des titulaires en exercice début 2024.
Propos recueillis par Marie Bonte
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