L’usage de la cocaïne en France est en augmentation forte et continue depuis 2010. Une évolution portée par la hausse importante de la production mondiale et des importations européennes, entraînant une plus grande accessibilité du produit à mesure que son prix a diminué. Cette « démocratisation », qui touche des classes d’âge et des milieux sociaux de plus en plus large, n’est pas sans conséquence : triplement des passages aux urgences, hausse des hospitalisations et des demandes de prise en charge auprès des services d’addictologie.
La production mondiale de cocaïne a doublé entre 2014 et 2020 pour culminer à 1982 tonnes en 2020, alors que l’Europe est devenue « un débouché et un nœud de transit » de cette drogue. L’expansion, facilitée par un prix plus accessible, a été renforcée par les réseaux sociaux et le développement des livraisons à domicile par des filières de trafic locales, ainsi que par l’installation de sites de productions dans l’espace européen. Dans un rapport fouillé élaboré avec Santé publique France et le réseau d'addictovigilance, l’Observatoire français des drogues et des tendances addictives (OFDT) constate une hausse de la consommation chez les adultes de plus de 25 ans : l’Europe compte 3,5 millions d’usagers dans l’année, dont 600 000 en France.
En conséquence, les signaux sanitaires s’aggravent dans l’Hexagone. Santé publique France fait état d’un triplement des recours aux urgences pour usage de cocaïne entre 2010 et 2022, passant de 8,6 à 21,2 pour 100 000 habitants. Sur cette période, ce sont 23 335 passages aux urgences pour cocaïne qui ont été identifiés, concernant majoritairement des hommes (75 %) dont l’âge médian est de 32 ans. Soit en moyenne « 72 passages aux urgences » pour cocaïne par semaine en 2022. Les diagnostics posés se répartissent entre intoxication (65 %), dépendance (13 %) et sevrage (7,5 %) et sont majoritairement associés à une autre intoxication : à l’alcool (33 %), aux benzodiazépines (9,6 %), au cannabis (9,6 %) ou aux opioïdes (4,8 %). Les usagers se plaignent notamment de manifestations cardiaques (douleur thoracique, palpitations, tachycardie) et psychiatriques (agitation, dépression, anxiété, schizophrénie), qui sont les « complications les plus fréquentes de la consommation de cocaïne ».
Si toutes les régions françaises sont touchées, certaines enregistrent des taux de recours aux urgences très élevés comme en Guyane (44,1/100 000) et en PACA (40,8) et beaucoup signalent de fortes augmentations telles l’Auvergne-Rhône-Alpes où le taux de recours est passé de 1,2/100 000 habitants en 2010 à 22,9 en 2022, la Bretagne (de 4,3 à 34,4), la Nouvelle-Aquitaine (de 3 à 20,6) ou encore le Grand Est (de 8,7 à 19,9). Santé publique France insiste aussi sur une montée en charge des hospitalisations pour intoxication à la cocaïne, dont le nombre est passé de 4 832 en 2010 à 20 198 en 2021. Une augmentation qui « pourrait s’expliquer notamment par la circulation depuis une dizaine d’années d’une cocaïne dont la teneur en principe actif augmente, ou encore par l’émergence de nouveaux produits de synthèse (NPS) plus puissants et toxiques que la molécule dont ils imitent les effets ».
Quant aux demandes de traitement pour usage de cocaïne auprès des services d’addictologie*, elles ont bondi de 2 613 en 2010 à 5 907 en 2020. Mais, souligne l’OFDT, « les soignants témoignent des moyens d’accompagnement et de prise en charge limités dont ils disposent, en raison notamment de l’inexistence de produits de substitution efficaces pour la cocaïne, dans un contexte où les demandes de soins ne faiblissent pas ». En 2020, la France a rapporté 130 décès directement liés à la cocaïne, à comparer avec les 473 signalés dans 20 pays de l’Union européenne.
* CSAPA : Centres de soin, d'accompagnement et de prévention en addictologie.
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