Dans une pharmacie, les patients ne souhaitent pas que l’on connaisse la raison de leur venue, et le pharmacien, lui, est tenu de respecter le secret professionnel. D’où la nécessité de mettre en œuvre un espace de confidentialité, au sein de l’officine, dans lequel le patient pourra parler librement de son traitement et poser ses questions en toute discrétion au professionnel de santé. Pour répondre à ce besoin, les agenceurs et aménageurs multiplient les propositions et composent avec des espaces variés, souvent contraints, où le moindre mètre carré compte. Chaque zone doit être pensée de manière à optimiser le parcours client, faciliter les interactions avec l’équipe officinale en garantissant l’intimité, le tout sans impacter la performance commerciale.
Isolation phonique : le bon choix des matériaux
« Notre mission, en tant qu’agenceur, est d’apporter des réponses concrètes aux problématiques rencontrées par les pharmaciens dans leur environnement de travail. C’est pourquoi nos commerciaux réalisent d’abord un audit pour identifier précisément les attentes, puis nous proposons plusieurs dispositifs sur mesure », explique Jorys Bloyet, président-directeur général d’Ergon-JBCC, groupe spécialisé dans l’agencement.
Par exemple – lorsque la superficie l’autorise – pour accueillir un local dédié ou une petite pièce isolée, plusieurs besoins peuvent être traités simultanément. « Les pharmacies développent aujourd’hui de nouvelles prestations de service, comme la vaccination, l’orthopédie ou différents types d’entretien. Nous cherchons à regrouper ces activités dans des espaces santé : une zone ou une pièce, incluant une petite salle d’attente, où les patients peuvent être reçus dans un cadre adapté et confidentiel », détaille Philippe Plessis, président de ProExpace.
Si cette pièce existe ou est prévue dans un projet d’aménagement, c’est tant mieux – la moitié du chemin est déjà parcourue. Pour aller plus loin, « nous pouvons recourir à des matériaux de construction offrant de bonnes performances phoniques », précise Yann Borvon, responsable commercial et partenariats chez Ecoor, entreprise spécialisée dans l’aménagement de pharmacies. Ce peut être des cloisons et plafonds conçus en plaques de plâtre phoniques, des portes pleines avec affaiblissement acoustique, ou encore des panneaux acoustiques qui vont absorber le son. Pour améliorer encore l’isolation et limiter la propagation des ondes sonores, il est possible d’intégrer des rupteurs acoustiques dans les plafonds, qui « interrompent la transmission des ondes. Ce qui permet de réduire considérablement, voire supprime, la continuité des bruits entre deux locaux », expose Yann Borvon.
Une discrétion qui est aussi visuelle
Assurer la confidentialité passe également par l’image, ou plutôt l’absence d’image. « Il est essentiel que le patient se sente protégé non seulement des oreilles indiscrètes, mais aussi des regards, souligne Yann Borvon. Une personne qui vient essayer des bas de contention à l’écart doit pouvoir le faire en toute intimité [même si l’officine ne dispose pas de pièce à l’écart N.D.L.R.]. Or, certains locaux disposent de baies vitrées donnant sur l’extérieur. Dans ce cas, nous pouvons installer un vitrage sablé ou un adhésif translucide qui laisse passer la lumière tout en préservant l’intimité. » Mais cette approche peut parfois entrer en collision avec l’objectif commercial de l’officine. Les vitrines offrent, en effet, un réel avantage marketing : les passants ont une vue directe sur l’intérieur de l’officine et les produits mis en avant, créant une perspective attractive qui incite à entrer. Là encore, il faudra peser le pour et le contre.
Quoi qu’il en soit, parmi les possibilités qui leur seront proposées par les agenceurs, les titulaires choisiront celle qu’ils estiment être la plus adaptée à leur situation mais aussi à leur portefeuille. Car toutes ces options techniques présentent une limite : leur coût. Et beaucoup de pharmaciens privilégieront le facteur économique, selon Yann Borvon. « Si l’on se contente d’un local simple avec des cloisons en plaques de plâtre classiques, cela peut amplement suffire. Et de toute façon, l’équipe ne va pas crier dans ces locaux », plaisante-t-il.
Garantir l’intimité au comptoir
Il existe également des solutions moins onéreuses et plus simples à mettre en œuvre. Lorsque l’espace le permet, la plus efficace reste souvent l’installation d’un comptoir simple légèrement à l’écart. « C’est le scénario idéal, car cela crée naturellement une zone de confidentialité », souligne Jorys Bloyet.
Ce type d’aménagement présente un autre avantage : il facilite la gestion des flux au quotidien, en le réservant, par exemple, aux patients souhaitant rester discrets sur les raisons de leur venue et à ceux munis d’une ordonnance. « Contrairement aux locaux, cabines ou pièces déportées, c’est un espace continuellement utilisé », relève également Jorys Bloyet.
Le bémol : toutes les officines ne disposent pas de suffisamment de place. Dans ce cas, les agenceurs recommandent généralement d’installer des séparations entre les comptoirs afin de garantir la discrétion des échanges. Là encore, ce type de mobilier présente l’avantage de bloquer le son et la vue, du moins pour les modèles opaques. « Il crée aussi une relation plus directe avec le titulaire et instaure un climat de confiance », avance Philippe Plessis. Limitant ainsi tout sentiment de gêne. « Ces comptoirs présentent aussi un intérêt commercial : ils peuvent augmenter les volumes de vente, puisqu’ils font également office de présentoirs. » En pratique, ils ont aussi vocation à déclencher des achats d’impulsion. Un marquage au sol peut, en outre, garantir un éloignement suffisant entre le patient au comptoir et ceux dans la file d’attente.
Au-delà des simples séparations, la forme du mobilier peut également être repensée. Une configuration arrondie, par exemple, rapproche naturellement le titulaire du patient. Contrairement à un angle qui pourrait gêner, elle invite ce dernier à se placer sur le côté et à se rapprocher. « Cette disposition favorise la proximité et, par conséquent, renforce le sentiment de confidentialité », pense Yann Borvon. Pour limiter la perception des conversations, il peut être utile d’introduire un fond sonore discret, comme de la musique diffusée à volume modéré. « Cela réduit naturellement la perception des conversations alentours », ajoute-t-il.
Des cabines multifonctions
Pour les petites surfaces, certains agenceurs disposent de solutions plus originales. « Nous avons également de boxes modulaires : des cloisons amovibles ou paravents qui créent un espace de confidentialité temporaire, le temps d’un entretien ou pour réaliser une nouvelle mission. Une fois celui-ci terminé, la cabine peut être repliée pour restituer la surface à la vente. C’est une alternative intéressante, mais très peu retenue », reconnaît Jorys Bloyet. Cette faible demande peut s’expliquer par plusieurs facteurs : le coût bien sûr, la surface mobilisée – car le pharmacien n’aura pas forcément le réflexe, ni même le temps, de les ranger systématiquement après chaque utilisation…
C’est pourquoi, au-delà de leur fonction première, ces boxes, et plus généralement les zones de confidentialité, sont à penser plus largement dans le cadre de l’activité quotidienne du pharmacien, et notamment des nouvelles missions. Qu’il s’agisse d’une cabine, d’une salle dédiée ou de paravents disposés dans un coin, toutes constituent une opportunité pour accompagner l’évolution de la profession.
La cabine acoustique : simple, esthétique et efficace, mais…
Autre produit disponible, mais encore relativement peu répandu en pharmacie : la cabine acoustique. On les retrouve aujourd’hui plutôt dans les bureaux ou espaces de coworking, pour téléphoner au calme ou organiser des réunions. Le pharmacien peut très bien y recevoir ses patients qui souhaitent aborder des sujets plus intimes. Elle sera généralement installée à proximité des comptoirs afin de garder un œil sur la file d’attente et s’assurer qu’elle ne s’allonge pas trop.
Fermées ou semi-fermées, elles sont souvent très esthétiques et déclinées en de nombreux modèles pour s’adapter à un maximum de configurations, moyennant quelques milliers d’euros, voire quelques dizaines de milliers d’euros pour les moutures les plus haut de gamme. « Ce sont des solutions très émergentes, simples à mettre en œuvre, contrairement à des travaux qui sont, de fait, bien plus lourds », souligne Yann Borvon. Et pas nécessairement plus chères, en fonction du projet.
Au-delà du prix, c’est aussi le manque de mètres carrés et des configurations pas toujours adaptées à un usage médical (en fonction des modèles) qui limitent leur développement. Une autre option consiste à utiliser une cabine de téléconsultation médicale : certaines, totalement fermées peuvent servir d’espace de confidentialité lorsqu’elles sont inoccupées.
L. B.
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