Pour les pharmaciens, la remise dans le circuit des médicaments non utilisés (MNU), c’est non ! Le Conseil national professionnel (CNP) de la pharmacie exprime son opposition à cette mesure venue du gouvernement dans un long courrier envoyé au Sénat, juste avant le début de l’examen du projet de loi financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2026 au Palais du Luxembourg.
Inenvisageable il y a encore plusieurs mois, la réutilisation des médicaments non utilisés (MNU) en pharmacie intéresse fortement le gouvernement, qui veut faire des économies. Dans son projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2026, il prévoit en effet une expérimentation, sur trois ans maximum, de la collecte et de la re‑dispensation des MNU (non ouverts et non périmés) pour une nouvelle dispensation, dans le but de réduire le gaspillage, avant même les résultats de la première analyse qualitative et quantitative des médicaments rapportés en pharmacie. Si, dans son texte, le gouvernement réserve cette expérimentation aux établissements de santé, des députés ont pensé l’étendre à l’officine. À date, l’article (le 32e) inscrivant cette pratique n’a pas eu le temps d’être voté à l’Assemblée nationale en première lecture, mais il a été transmis au Sénat.
Du côté de la profession, la réutilisation des MNU fait l’unanimité contre elle. Le Conseil national professionnel (CNP) de la pharmacie a pris les devants et a envoyé un long courrier aux sénateurs, qui examinent le PLFSS à partir du 19 novembre. Il demande purement et simplement la suppression de cette mesure « inadaptée », arguments à l’appui.
Tout d’abord, la pratique soulève la question de la traçabilité et de la sécurité des MNU ainsi distribués. « Les médicaments collectés auprès des patients peuvent avoir été exposés à des conditions de stockage inappropriées (variations de température, humidité, etc.), altérant ainsi leur efficacité et leur innocuité », justifie le CNP. D’autant que les pharmaciens ne disposent pas des outils permettant de vérifier l’absence de contamination ou de falsification. De plus, la réutilisation des MNU est incompatible avec le dispositif de sérialisation, imposé par l’Europe.
Autres arguments contre : une charge additionnelle en matière de logistique (collecte, tri, stockage et re-dispensation) « sans formation spécifique ni ressources allouées, au détriment de leurs missions principales d’accompagnement thérapeutique et de conseil », regrette le CNP, soulignant un risque accru d’erreurs dans un contexte de surcharge de travail déjà marqué par la gestion des pénuries récurrentes des produits de santé.
Pour quelle efficacité ? Pour le CNP, cette expérimentation ciblera moins de 10 % des volumes gaspillés. C’est limité. Quant aux effets sur l’environnement et l’économie, ils sont jugés « pervers » : « La collecte et le transport généreraient des émissions de carbone supplémentaires, contredisant les objectifs de durabilité. Économiquement, les économies attendues (quelques millions d’euros) sont négligeables face aux coûts de mise en œuvre (formation, équipements, contrôles) et potentiellement contrebalancées par des litiges ou des rappels », estime encore le CNP, qui reproche au gouvernement une absence de concertation avec les premiers concernés.
Il y aurait bien d’autres mesures à appliquer pour éviter le gaspillage, conclut le CNP. À commencer par l’adaptation des conditionnements par les industriels, la réduction des MNU grâce à un meilleur accompagnement pharmaceutique, notamment par les entretiens, la conciliation médicamenteuse ou l’accès au DMP qui doit être amélioré. Enfin, le CNP mise sur la pharmacie clinique.
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