La direction de la Sécurité sociale (DSS) souhaiterait égaliser les marges des différents vaccins antigrippaux que les pharmaciens peuvent aujourd’hui dispenser. Une « mauvaise idée » dénoncée par les représentants de la profession, qui pourrait potentiellement s’appliquer lors de la prochaine campagne de vaccination.
Une « énième mauvaise idée », voilà comment Pierre-Olivier Variot, président de l’Union des syndicats de pharmaciens d’officine (USPO), résume l’ambition de la DSS d’égaliser les marges des vaccins antigrippaux que le pharmacien est autorisé à dispenser. Une idée évoquée lors d’une réunion de concertation le 22 novembre et qui fait réagir. Aujourd’hui, la marge n’est pas la même entre les vaccins hautement dosés et les autres (Vaxigrip, Influvac, Flucelvax). Un écart du simple au double, de 72 centimes pour les vaccins habituels à 1,40 euro pour Efluelda ou Fluad. « Pour éviter que les pharmaciens n’aillent dans une vaccination “forcée” avec les vaccins haute concentration, la DSS a décidé d’égaliser les marges entre les deux types de vaccins, ce qui est totalement aberrant. Ce serait la première fois en France que l’on ferait un accroc dans ce qu’est la marge dégressive lissée », alerte le président de l’USPO. « Le ministère ne semble pas assumer aujourd’hui le fait que ces vaccins hautement dosés soient mieux remboursés que les autres », résume de son côté Julien Chauvin, président de la commission Études et stratégies économiques de la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF).
Quant à la raison qui justifierait ce projet de la DSS, le président de l’USPO pense qu’il y a « une volonté de certains industriels d’égaliser les marges pour qu’il n’y ait pas de volonté du pharmacien d’aller conseiller tel ou tel vaccin. L’erreur, c’est de se dire que le conseil du pharmacien prévaut sur les recommandations de la Haute Autorité de santé (HAS), analyse-t-il. Celles-ci définissent le cadre dans lequel ces vaccins peuvent être utilisés donc nous n’allons pas nous amuser à prescrire Efluelda ou Fluad à des patients qui n’entreraient pas dans les recommandations », souligne-t-il. « S’il y a un problème ou des recommandations à changer sur l’utilisation de ces vaccins hautement dosés, soit, mais le pharmacien ne doit pas servir de variable d’ajustement », prévient Julien Chauvin. En effet, la stratégie imaginée par la DSS démontre qu’un doute existe chez certains décideurs concernant la pertinence des recommandations actuelles au sujet des vaccins Fluad et Efluelda. Avec peut-être en tête l’idée de restreindre leur utilisation à un public plus ciblé que ce qui est prévu aujourd’hui par la HAS. « D’un côté, l’objectif est d’augmenter la couverture vaccinale, mais de l’autre, on voudrait nous inciter à moins utiliser ces vaccins qui doivent être privilégiés pour certains patients. S’ils ne sont pas plus efficaces que les autres, alors il fallait négocier des prix plus bas avec les fabricants et ne pas les rembourser au tarif actuellement en vigueur », souligne Julien Chauvin.
Pour l’instant, le projet de la DSS n’est pas encore acté et ne pourra pas être mis en place, quoi qu’il arrive, avant la prochaine campagne de vaccination, en 2026-2027. « Le projet d’arrêté est déjà écrit, précise tout de même Pierre-Olivier Variot. C’est donc une idée mature ». Comme l’admet Julien Chauvin, « il sera sans doute difficile de faire annuler complètement ce projet ». Une autre réunion aura lieu prochainement. « Nous verrons à ce moment-là quel est le degré de probabilité d’application de cette mesure. Le ministère a encore le temps, au moins jusqu’à la fin du premier trimestre 2026 », anticipe-t-il. Selon le représentant de la FSPF, le manque à gagner pour le réseau pourrait atteindre une dizaine de millions d’euros. « Si les marges sont égalisées, peu de pharmaciens vont accepter d’immobiliser des stocks de vaccins qui pèseront deux fois plus lourd sur leur trésorerie. Si la DSS va au bout de ses intentions, cela obère donc l’avenir des vaccins hautement dosés. Cela ouvre aussi la porte à la mise en place d’un système de forfaitisation qui pourrait, pourquoi pas, s’appliquer aussi aux médicaments, avec une marge unique qui serait imposée pour une classe de médicaments donnée », avertit Julien Chauvin.
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