L’Union des syndicats de pharmaciens d’officine (USPO) a présenté ce 23 mai plusieurs mesures visant à lutter contre la financiarisation du secteur. Des propositions contenues dans un rapport dont une synthèse a été remise cette semaine à plusieurs instances.
Remise en cause de l’indépendance du pharmacien dans son exercice professionnel, déstabilisation du maillage pharmaceutique et donc menace sur l’accès aux soins… la financiarisation des pharmacies d’officine s’accompagne de plusieurs risques importants. Comme le définit l’USPO, la financiarisation c’est « le processus par lequel des acteurs privés, non directement professionnels de santé, ayant la capacité d’investir de façon significative, entrent dans le secteur de la santé avec comme finalité première, voire exclusive, de rémunérer fortement l’investissement ». Un phénomène qui n’est pas nouveau mais qui semble s’amplifier et est aujourd’hui difficile à quantifier. « L’USPO se bat contre la financiarisation depuis la création du syndicat il y a 25 ans, explique son président Pierre-Olivier Variot. Il y a une entrée croissante d’acteurs extérieurs qui sont là pour la rentabilité uniquement. Ces dernières années, nous nous sommes rendu compte que lorsque des pharmacies avaient mal facturé à l’assurance-maladie, pour des TROD ou des médicaments chers par exemple, il y avait souvent un financeur extérieur au monde de la santé derrière », introduit-il.
Céder aux propositions de ces investisseurs extérieurs peut être tentant, notamment pour de jeunes pharmaciens qui ont besoin d’aide pour s’installer. Certains ne prennent pas toujours la mesure du système dans lequel ils s’engagent. « La financiarisation, c’est premièrement la perte d’indépendance du pharmacien, avec des investisseurs qui vont imposer des conditions contraignantes, rappelle Pierre-Olivier Variot. L’obligation de passer par tel comptable ou tel fournisseur… Se voir imposer un plafond pour ses dépenses… » rappelle-t-il. Au-delà des conséquences sur le métier même de pharmacien d’officine, le phénomène de la financiarisation peut remettre en cause l’organisation générale du système de soins. « Ce que veulent ces acteurs, c’est un retour sur investissement. Ils vont viser les pharmacies de grande taille, puis vont chercher à “manger” les pharmacies qui sont autour, décrit le président de l’USPO. On pourrait donc déstabiliser encore plus le maillage car ce système favorise les officines qui font une certaine taille et ont une certaine rentabilité avec, pour conséquence, un risque de voir apparaître des déserts pharmaceutiques. L’autre danger c’est une hausse du coût des soins pour les patients sur le long terme, ces derniers seront incités à consommer davantage, à dépenser de plus pour des actes ou des produits pris en charge ou non. »
Quels leviers d’action ?
Dans une synthèse de ce rapport, remise cette semaine au ministère de la Santé, à l’assurance-maladie, à la direction générale des entreprises (DGE), à la Cour des comptes ou encore à l’Inspection générale des affaires sociales (IGAS), l’USPO met en avant plusieurs propositions pour lutter contrer la financiarisation. « On ne parle pas de régulation mais bien d'interdiction. La financiarisation, il faut la combattre », assure Pierre-Olivier Variot. Parmi la quinzaine de solutions proposées par le syndicat : le développement de boosters d’apport sains sur le modèle de ce que propose déjà la CAVP, promouvoir le parrainage et les aides éthiques entre officinaux, notamment pour encourager des professionnels plus expérimentés à aider et conseiller leurs confrères en début de carrière, ou encore mettre en place un observatoire régional et national dédié à l’analyse et au suivi de la financiarisation des officines. L’USPO préconise aussi de mettre en place un référentiel de formation sur la gestion d’entreprise pour les étudiants en pharmacie, souvent approchés par ces structures lors des salons ou à la sortie des amphis. Sur un plan plus juridique, le syndicat estime qu’il faut interdire la signature de toute convention qui conduirait le pharmacien à être privé du contrôle de sa société. L’USPO exige aussi « la transparence des montages financiers lors de l’inscription des sociétés auprès de l’Ordre des pharmaciens » et demande à « inverser la charge de la preuve en cas de conflit pour obliger les investisseurs extérieurs à prouver l’indépendance des pharmaciens ». Une liste de solutions qui n’est pas exhaustive. « Nous refusons de dire que la financiarisation de la pharmacie d’officine est inéluctable, affirme Guillaume Racle, conseiller économie et offre de santé pour l’USPO. Avec ce rapport, nous voulons mettre en lumière certaines pratiques, qui ne sont pas conformes aux dispositions du Code de la santé publique. On espère qu’en mettant le doigt dessus, on va pousser ces acteurs extérieurs à rebrousser chemin », précise-t-il.
Le rapport complet, lui, doit être remis en mains propres au ministre de la Santé, Yannick Neuder, le 17 septembre, avant d’être rendu public. Néanmoins, ce document a vocation à être étoffé au fil du temps car les pratiques de ces financeurs évoluent continuellement. « Aujourd’hui, on commence à voir d’autres formes de financiarisation, plus silencieuses. Investissements dans l’immobilier de la structure, prestations de conseil imposés à des montants très élevés… », explique notamment Guillaume Racle. « Ces investisseurs extérieurs ne se cachent plus, ils communiquent sur ce qu’ils proposent… Il faut que tout cela soit plus transparent car si l’on continue à aller vers ce modèle cela nuira aux patients », résume le pharmacien.
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