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L’aventure du DP continue

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Publié le 26/02/2018
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Si le dossier pharmaceutique, voulu, conçu et financé par les pharmaciens eux-mêmes, est indéniablement un succès, l’heure est venue de l’amélioration et de l’extension du système pour le plus grand bénéfice des patients.
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Crédit photo : DR

Depuis la généralisation du dossier pharmaceutique (DP) en décembre 2008, on mesure le chemin parcouru. D’autant plus remarquable que le DP est né de la seule volonté des pharmaciens, que ceux-ci l’ont eux-mêmes élaboré et qu’ils le financent en très grande partie. Mais ce sont sans doute ces particularités qui expliquent son succès : les pharmaciens l’ont conçu en s’appuyant sur leur pratique et leurs besoins. Aujourd’hui, cet outil professionnel est incontournable parce que, comme le souligne Isabelle Adenot, présidente du Conseil national de l’Ordre des Pharmaciens de 2009 à 2017, « il répond aux grands enjeux sanitaires actuels : le bon usage du médicament, la coordination entre professionnels de santé, le décloisonnement ville-hôpital, la gestion de crises sanitaires, les ruptures d’approvisionnement, l’amélioration de la couverture vaccinale… ».

Accessible aux médecins hospitaliers

De fait, comme l’a montré un sondage réalisé fin 2017, les pharmaciens le jugent très utile : pour identifier les interactions médicamenteuses (61,4 %), les redondances (55,4 %) et les contre-indications (43,1 %). Et lorsqu’un risque est signalé au médecin, des modifications sont apportées à la prescription dans 96,4 % des cas. Un chiffre qui montre bien l’intérêt du DP pour mieux prendre en charge le patient en collaboration avec le prescripteur.

Concernant la sécurité, les pharmaciens, très satisfaits, accordent une note de 4,26 sur 5 pour le rappel de lots, une fonctionnalité également appréciée par les industriels et les grossistes-répartiteurs « pour son caractère d’immédiateté ». Le « DP rupture d’approvisionnement » est surtout salué par les laboratoires pour la transparence qu’il introduit dans le système.

Le DP ne se contente donc pas de recenser tous les médicaments qu’un patient s’est vu délivrer au cours des 4 derniers mois (3 ans pour les médicaments biologiques et 21 ans pour les vaccins) et il s’améliore d’année en année. Dernière étape franchie en décembre dernier, 10 ans après son lancement : le DP est désormais accessible à tous les médecins hospitaliers. Jusqu’ici, seuls les pharmaciens de PUI y avaient accès dans deux cas : la rétrocession et la conciliation médicamenteuse. Dorénavant, les médecins exerçant en établissement de santé pourront le consulter, sauf opposition du patient. Et à condition de s’y raccorder via un logiciel compatible et d’avoir signé une convention avec l’Ordre des pharmaciens. Le DP peut ainsi être utile en pédiatrie, en médecine interne ou encore en hospitalisation à domicile. Mais il est particulièrement précieux pour les médecins urgentistes, les anesthésistes et les gériatres, comme l’a montré une expérimentation auprès de ces professionnels entre 2013 et 2016. Ainsi, aux urgences, il représente dans 1 cas sur 4 la seule source d’information disponible.

Plus globalement, cette avancée devrait contribuer au décloisonnement ville-hôpital et améliorer la coordination entre professionnels de santé ainsi que la sécurité des patients.

Nouveaux développements en vue

Cela dit, le DP est encore perfectible et appelle des extensions. Les pharmaciens d’officine, mais aussi les autres utilisateurs - pharmaciens de PUI, médecins hospitaliers, laboratoires, grossistes-répartiteurs - estiment par exemple le renseignement de l’automédication insuffisant. Un point qui mérite de nouveaux développements, en premier pour les médicaments de prescription médicale facultative ; actuellement, seulement 14 millions de DP mentionnent la délivrance d’un produit de PMF. Et, dans un second temps, pour les médicaments de prescription pharmaceutique.

Autres pistes de réflexion : pouvoir mentionner le nom du prescripteur et du pharmacien qui a délivré le médicament et ouvrir le DP aux médecins biologistes pour qu’ils puissent tenir compte des molécules ingérées qui peuvent influencer les dosages, par exemple faire le lien entre transaminases et atorvastatine. Mais aussi aller plus loin dans les fonctions « rappel de lots » en intégrant une fonction blocage qui interdirait toute délivrance lorsque le numéro du lot à rappeler apparaît. Ce système vaudrait également pour la répartition. Selon Philippe Godon, président du Conseil central de la section C, « il ne serait ainsi plus possible de vendre un lot après son rappel. Ce système fonctionne aujourd’hui manuellement mais il est plus difficile à mettre en œuvre sur les automates ».

 

Ève Oudry

Source : Le Quotidien du Pharmacien: 3414