Dans un courrier adressé au gouvernement le 2 juin, la Conférence nationale des Unions régionales des professionnels de santé – médecins libéraux (URPS-ML) appelle à « actionner les leviers nécessaires afin de protéger les citoyens, sans plus attendre » contre cette exposition préoccupante.
La dangerosité du cadmium est bien établie. Par inhalation, il est classé comme cancérogène avéré pour les voies respiratoires (cancer du poumon) depuis 1993. Par voie orale, une exposition prolongée est suspectée d’augmenter le risque de cancer du pancréas, du sein, de l’endomètre, de la prostate. Ce métal est également mutagène, toxique pour la reproduction, et responsable d’atteintes rénales ainsi que de fragilité osseuse.
Une contamination loin d’être marginale
L’exposition de la population est loin d’être négligeable. « Chez les adultes français, l’imprégnation moyenne au cadmium a quasiment doublé entre 2006 et 2014. Elle est aujourd’hui trois fois supérieure à celle des adultes américains, et plus de deux fois à celle des Italiens », alerte le Dr Pierre Souvet, cardiologue et président de l’Association santé environnement France (ASEF). Chez les enfants, la situation est pire en raison de leur consommation élevée de céréales. Une étude de l’alimentation des Français réalisée en 2011 estimait que 36 % des enfants de moins de trois ans et 14 % des enfants de 3 à 17 ans dépassaient la valeur toxicologique de référence (VTR) fixée à 0,36 microgramme de cadmium par kilo de poids corporel et par jour. Chez les adultes, 0,6 % dépassait également ce seuil.
Le cadmium est naturellement présent dans les sols, mais certaines activités humaines – notamment agricoles (engrais phosphatés) et industrielles (métallurgie) – en accentuent la concentration. Il se retrouve ensuite dans les aliments que nous consommons. Principalement dans les pains et produits de panification, les pommes de terre et leurs dérivés, les mollusques et crustacés, les légumes à feuilles vertes (salades, choux, épinards), les céréales (notamment le blé) et le riz. À cela s’ajoute l’exposition des fumeurs, chaque cigarette contenant environ 2 µg de cadmium.
Quelles solutions ?
L’ANSES recommande de varier son alimentation pour limiter l’exposition, et de réduire la consommation d’aliments à forte teneur en cadmium comme les pommes de terre, les épinards et certaines céréales. Le Dr Souvet conseille aussi de privilégier les produits issus de l’agriculture biologique, qui n’utilise pas d’engrais phosphatés.
Mais une action à la source est également nécessaire. L’ANSES rappelle que les engrais phosphatés sont en partie responsables de l’enrichissement des sols en cadmium. Or, en France, le taux de cadmium autorisé est actuellement de 90 mg/kg d’engrais, bien supérieur à la norme européenne de 60 mg/kg. L’agence recommande de réduire ce seuil à 20 mg/kg, soit 2 g par hectare et par an. Une préconisation qui, pour l’heure, reste lettre morte. « Rien ne bouge, pour des raisons financières et politiques », déplore le Dr Souvet.
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