Même s’il peut piquer différents vertébrés, Aedes albopictus possède une nette préférence pour l’homme. Seule la femelle pique, car les repas sanguins sont nécessaires à l’ovogenèse. Elle dépose ensuite ses œufs dans les récipients d’origine anthropique aux alentours des maisons (gouttières, abreuvoirs, soucoupes de pots de fleurs, etc.). Dans ces eaux stagnantes, les larves trouvent le milieu propice à leur développement.
À la conquête du monde
Initialement originaire des forêts d’Asie du Sud-Est, Aedes albopictus a progressivement gagné les différents continents en une trentaine d’années. Comment ? Les œufs de cette espèce de moustique ont la particularité d’être pondus non pas dans l’eau mais à proximité. Leur éclosion est alors déclenchée par le contact avec le milieu aqueux formé par les pluies ou les arrosages. De plus, ces œufs ont la capacité d’entrer en diapause. Cette propriété permet à l’insecte de résister à de longues périodes de sécheresse ou à des températures moins favorables. C’est ainsi que, bien caché sur la paroi de pneus usagés, le moustique tigre a pu entamer ses longues traversées par bateau, au gré des transports commerciaux internationaux. Il a successivement gagné l’Europe (Albanie) dès 1979, puis les États-Unis (Texas) en 1985, l’Amérique du Sud en 1986 (Brésil)… En Europe, il a d’abord essaimé depuis l’Albanie vers l’Italie en 1990, avant d’être repéré en Normandie et en Belgique en 1999. La tolérance des œufs de ce moustique adulte aux températures en dessous de 0 °C et sa capacité d’adaptation à des habitats variés lui ont conféré la possibilité d’hiberner et de survivre une fois arrivé à destination dans ces régions plus tempérées.
Il s’installe durablement en France et en Europe
Son implantation durable dans le sud-est de la France, à Menton, a débuté en 2004. Depuis, il s’est rapidement propagé à de nombreux départements français par les axes routiers (20 départements étaient concernés en 2014, 30 en 2015 !). Sa présence récemment signalée en région parisienne (à Créteil) devrait, à terme, encore accélérer la colonisation du territoire métropolitain, le pourtour méditerranéen étant déjà largement infesté. Sa dissémination vers le nord de l’Europe, dont les températures sont moins propices à son développement, pourrait cependant être facilitée par le réchauffement climatique.
Un vecteur compétent pour la dengue, le chikungunya et le virus Zika
En zone tropicale, le moustique tigre ainsi que son « cousin » l’Aedes aegypti sont vecteurs de nombreuses arboviroses – dont la dengue, le chikungunya et la fièvre Zika, transmissibles à l’homme. Mais le risque de ces maladies vectorielles est également bien réel en Europe. Des cas autochtones*** de dengue et de chikungunya ont été signalés en France métropolitaine en 2010. Depuis 2013, des cas sont observés chaque année dans les régions où le vecteur est présent. Ils surviennent le plus souvent à la suite d’épisodes de circulation des virus dans les départements français d’Amérique (Guadeloupe, Guyane et Martinique).
Une nuisance très importante
Pour l’heure, la principale problématique sanitaire en métropole reste la nuisance. Le fait que le moustique soit actif durant la journée, notamment avec un pic d’activité entre la fin d’après-midi et le coucher du soleil, favorise l’exposition de l’homme à cette espèce. Tout au long de sa période d’activité, de mai à novembre en France, les femelles piquent de multiples personnes. Elles se caractérisent par leur agressivité et harcèlent littéralement leur hôte jusqu’à avoir pris un repas complet. De façon très claire, Pascal Delaunay explique qu’il y a un « avant » et un « après » moustique tigre pour les habitants vivant dans les départements colonisés par l’insecte, tant la nuisance est importante et altère la qualité de vie.
La lutte antivectorielle au niveau collectif et la protection personnelle antivectorielle au niveau individuel constituent les seuls moyens dont on dispose à ce jour pour se protéger à la fois contre ces nuisances et la propagation d’épidémies.
- G. L’Ambert
* Pascal Delaunay, parasitologue et entomologiste médical, Praticien Hospitalier au sein du service de Parasitologie-Mycologie du CHU de Nice.
** Gregory L’Ambert, entomologiste médical, responsable de la cellule Méthodes et Recherche au sein de l’Entente Interdépartementale de Démoustication du littoral méditerranéen (EID Med), Monpellier.
*** Personnes piquées en France par un moustique local infecté à partir d’une personne virémique de retour d’une zone d’endémie.
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