« Le métier de pharmacien est un métier adolescent » avait déclaré Philippe Besset, président de la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF), au cours de son intervention aux Entretiens de Galien, en janvier, à Lyon. De fait, alors que ses prérogatives étaient dans leur majorité organisées autour de la dispensation de médicaments, les nouvelles missions du gardien des poisons le placent chaque jour un peu plus comme un acteur de services de santé, d’autant plus dans un contexte où la démographie médicale s’écroule. Et, lorsque le champ de compétences d’une profession évolue, il est impératif que la formation dispensée aux futurs professionnels lui emboîte le pas. Mais alors, est-ce le cas dans les universités ? Les enseignements dispensés dans les facultés françaises sont-ils à la hauteur des nouveaux enjeux ? Dans le Grand entretien 3.0, les étudiants semblent répondre par la négative. Ce sont 88,20 % des répondants qui estiment que leur formation ne les prépare pas totalement à leur exercice professionnel. Parmi les informations que contient ce document produit par l’ANEPF et publié lundi 3 janvier à l’occasion d’une conférence de presse au ministère de la Santé, se trouvent les retours de plusieurs milliers d’étudiants. Cette vaste enquête avait pour objectif d’évaluer les conditions de vie et d’études des étudiants en pharmacie. Cette collecte d’opinions, l’ANEPF l’a entreprise pour la première fois en 2014, puis réitérée en 2018 et en 2024. Les résultats offrent donc à la fois un panorama du quotidien des étudiants, mais aussi une perspective inédite sur les tendances et les problématiques persistantes rencontrées par les intéressés. Cette année, ce sont les avis de pas moins de 3 786 répondants qui ont été rassemblés, provenant de l’ensemble des 24 Unités de formation et de recherche (UFR) de pharmacie et des différentes années du cursus.
Un format dépassé
Bonne nouvelle pour la démographie officinale, la filière officine a le vent en poupe. Ce sont 41 % des répondants qui ont choisi cette filière ou souhaitent s’y spécialiser, soit 11,2 points de plus qu’en 2018. Cependant, près de la moitié des étudiants (44,7 %) s’estiment insatisfaits des cours magistraux et ils sont près d’un tiers (27,16 %) à ne pas y assister du tout. Ces derniers sont jugés monotones, trop longs, pas assez interactifs et offrant un apport pédagogique insuffisant : « Je trouve que les cours magistraux sont pertinents lorsque le professeur enrichit le cours par des éléments personnels, comme des anecdotes liées au métier, des cas pratiques, des explications supplémentaires ou des actualités. En revanche, si le cours se limite à un diaporama, autant le travailler seule chez moi », juge une étudiante Clermontoise de 4e année. Résultat, 69,07 % souhaitent diminuer le volume de ce format de cours. À l’inverse, six étudiants sur dix souhaitent augmenter le volume des enseignements dirigés.
Les sondés considèrent que des thématiques cruciales pour l’exercice officinal manquent à l‘appel
Ces enseignements dirigés supplémentaires, les étudiants les voudraient axés sur des problématiques bien spécifiques. Psychologie, conseil au comptoir, gestion des outils numériques ou encore management d’entreprise. Les sondés considèrent que des thématiques cruciales pour l’exercice officinal manquent tout simplement à l‘appel. « Ces thématiques sont acquises de manière informelle, lors des stages ou d’emploi étudiant », souligne le rapport. En 6e année, ils seraient même 71,90 % à considérer que leurs cours sont trop éloignés des différents aspects de la profession. Proactive, l’association propose un certain nombre de mesures pour accompagner les universités vers une offre de formation renouvelée, qui répondrait mieux aux besoins des étudiants et des officines. Parmi ces propositions, l’ANEPF pousse pour la création d’un statut de professeur des Universités – pharmacien d’officine (PU-PO) et, sur le modèle de la médecine générale, à la création de départements de pharmacie officinale dans les UFR de pharmacie, afin d’accueillir au mieux les PU-PO. « Ce grade, supérieur à celui de maître de stage universitaire, dont nous demandons aussi la création, offrirait non seulement un cadre aux officinaux pour enseigner mais aussi flécher des financements et poursuivre le développement de la recherche officinale à l’université, argumente Valentin Masseron, le porte-parole de l’association. Ce statut doit passer par la voix législative, ce ne sera donc pas pour tout de suite. Les deux ministères de tutelle ont évoqué la rentrée 2026-2027. » Affaire à suivre, donc.
Plus de stages, la solution ?
Colonne vertébrale de la transition des bancs de l’université au comptoir, c’est en forgeant que les étudiants estiment devenir pharmaciens. Toutefois, au sein de la cohorte des répondants, près des trois quarts (72,69 %) estiment que le nombre de stage durant le cursus devrait être plus important. De plus, ils sont plus de la moitié (50,48 %) à estimer que c’est parce qu’il n’intègre pas suffisamment de stages, que le cursus pharmaceutique ne prépare pas correctement à l’entrée dans la vie professionnelle. Face à ce constat, l’ANEPF demande « la construction d’un modèle pédagogique progressif permettant à l’étudiant d’avoir lors de son cursus une visibilité sur l’entièreté de la pratique officinale, industrielle et hospitalière. »
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