L’American College of Rheumatology (ACR) a publié récemment des recommandations sur la prise en charge de la santé reproductive des patients atteints de maladie rhumatismale et/ou musculo-squelettique.
« L’objectif de ces recommandations est d’orienter la discussion entre cliniciens et patients, mais aussi d’encourager les relations entre rhumatologues, spécialistes de la gynécologie obstétrique, de la médecine maternelle et fœtale, de l’endocrinologie et de l’infertilité reproductive », notent les auteurs.
Syndrome des antiphospholipides
Au total, 131 recommandations fondées sur les preuves et 12 déclarations de bonnes pratiques ont été émises concernant la contraception, l’assistance médicale à la procréation, la préservation de la fertilité, la ménopause, la grossesse et les médicaments. « Jusqu’à il y a une vingtaine d’années, ces aspects n’ont pas été pris en compte par les rhumatologues du fait de la sévérité des maladies rhumatologiques. Les progrès médicaux permettent un contrôle bien plus satisfaisant de la maladie et ainsi aux patients de mener une vie quasi normale », précise au « Quotidien » le Pr Thierry Schaeverbeke, rhumatologue au CHU de Bordeaux.
En termes de contraception, la recherche d’anticorps antiphospholipides détermine la conduite à tenir. En effet, en cas de présence d’antiphospholipides ou d’un syndrome des antiphospholipides, le recours à une contraception œstroprogestative est à proscrire en raison du risque important de thrombose.
« Dans ces cas et lors d’un lupus actif, sont plutôt préconisés un progestatif pur ou bien un dispositif intra-utérin, même chez les femmes n’ayant jamais eu de grossesse, rapporte le rhumatologue. Au cours d’un lupus moins actif, une contraception locale, des progestatifs ou bien des œstroprogestatifs faiblement dosés en œstrogène seront plutôt conseillés ». Les autres maladies rhumatologiques ne font pas l’objet de préconisations particulières en matière de contraception.
Prendre en compte le désir de parentalité
Concernant l’AMP, « la question est de savoir si la maladie rhumatismale est stable et quels sont les traitements compatibles avec une grossesse », résume le Pr Schaeverbeke, précisant que la plupart des patientes obtiennent une grossesse sans recourir aux techniques d’AMP. Là encore, la société américaine souligne l’importance d’un test négatif pour les anticorps antiphospholipides avant la mise en route d’un traitement pour la fertilité. Pour les patients positifs, elle préconise des mesures spécifiques, et notamment une anticoagulation.
Certains médicaments peuvent par ailleurs être associés à une baisse de la fertilité. Les désirs de parentalité sont donc à prendre en compte au moment de la mise en route des traitements, aussi bien chez les hommes que chez les femmes afin de préserver la fertilité le cas échéant. En particulier, l’ACR déconseille fortement l’utilisation de cyclophosphamide et de thalidomide chez les patientes souhaitant avoir un enfant.
Pour la prise en charge de la ménopause, les traitements hormonaux substitutifs peuvent être utilisés, sauf chez les femmes présentant des anticorps antiphospholipides ou un syndrome des antiphospholipides.
Enfin, l’ACR recommande fortement de ne pas recourir aux anti-inflammatoires non stéroïdiens au cours du troisième trimestre de grossesse.
Rôle de conseil
« Avec l’élaboration de ces recommandations, l’ACR reconnaît le rôle clé des rhumatologues cliniciens non seulement dans la gestion de l’activité de la maladie, mais aussi dans la compréhension des interactions des maladies rhumatismales et musculo-squelettiques et de leurs thérapies dans le contexte de la santé reproductive », estiment les auteurs. Pour le Pr Schaeverbeke, les recommandations de l’ACR constituent en effet « un support indiscutable, étayé par une argumentation claire, pour accompagner les rhumatologues dans leur rôle de conseil auprès des patients, qui sont demandeurs ».
En France, il n’existe pas de telles recommandations à ce jour. « Mais l’ensemble des prescripteurs peut s’appuyer sur les informations du Centre de référence sur les agents tératogènes (CRAT), notamment en cas de grossesse », souligne le Pr Schaeverbeke.
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Françoise Amouroux
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