L’aventure guyanaise du pharmacien trentenaire, originaire de Seine-et-Marne, débute presque par hasard. Venu à Cayenne pour suivre sa compagne en stage à l’Institut Pasteur, Médéric Chauveau découvre, lors de vacances à Maripasoula, la pharmacie Kangkangtii, tenue par Christophe Martinez. Ce dernier l’invite à le remplacer et l’introduit à l’exercice pharmaceutique singulier sur le fleuve Maroni. « Travailler à Maripasoula m’a donné l’envie de rester, explique-t-il. Au bout de cinq remplacements, je me suis dit : autant m’y installer ! »
C’est ainsi que Médéric pose ses valises à Grand-Santi, une commune de 8 000 à 10 000 habitants, en aval sur le fleuve. L’absence d’officine obligeait jusque-là les patients à faire parfois 5 heures de pirogue pour se procurer leurs traitements, révélant « un réel besoin d’ouvrir une pharmacie ». Il lui faudra pourtant patienter un an et demi pour obtenir les autorisations nécessaires et en concrétiser l’ouverture.
Pour les produits parapharmaceutiques lourds ou volumineux, comme les couches, la pirogue reste l'option la plus économique
Aujourd’hui, Médéric gère seul la pharmacie : dispensation, logistique, gestion, avec tous les aléas inhérents à une zone aussi reculée, accessible uniquement par pirogue ou par avion. L’acheminement des médicaments s’est amélioré, passant de livraisons toutes les trois semaines à un fret aérien quasi quotidien. Pour les produits parapharmaceutiques lourds ou volumineux, comme les couches, la pirogue reste l'option la plus économique. « C’est un peu la roulette russe, les colis arrivent parfois un peu mouillés », confie-t-il. La précarité locale l'incite toutefois à ajuster son offre de parapharmacie en la concentrant sur des produits essentiels et peu chers, comme des thés, des savons, des vitamines, et des soins pour bébés. Passionné de langues, le pharmacien a aussi appris le N'djuka tongo, la langue locale, et le portugais, « indispensables » pour répondre aux attentes des habitants.
Un rôle social
Au-delà de la dispensation, Médéric joue également un rôle social et s’attache à sensibiliser les habitants à l’importance d’ouvrir leurs droits pour bénéficier de la gratuité des traitements. Beaucoup n’ont jamais fait leur demande de rattachement à la Sécurité sociale, en raison de la complexité des démarches administratives, et du manque de maîtrise du français. « Autant les habitants sont très contents que je sois ici, autant expliquer que le dispensaire ne peut plus distribuer les médicaments gratuitement comme il le faisait auparavant, ce n’est pas facile… ».
L’aventure n’est pas sans heurts. L’absence de contrôle policier sur le Maroni, frontière avec le Suriname, expose la pharmacie à une concurrence déloyale et informelle : « Des magasins chinois installés en face vendent les mêmes produits trois fois moins chers. J’ai même vu mes propres médicaments revendus de l’autre côté. » Sans exonérations fiscales spécifiques, ni statut de zone franche, l’équation économique à Grand-Santi s’avère compliquée.
Pourtant, un an après l’ouverture, le bilan reste positif. La pharmacie Wacapou est devenue un maillon essentiel du système de santé local, et Médéric continue d’avancer avec une conviction : rapprocher les soins des populations isolées en Guyane.
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