« L’accent mis sur le contrôle des maladies chroniques, sur l’observance, la prévention ou le dépistage vont avoir des impacts positifs sur les volumes
Yann Rateau de Meursac, directeur des services conseil et analyses chez Iqvia
Comment va évoluer le marché du médicament d’ici à 2029 ? C’est à cette question qu’Iqvia, entreprise spécialisée dans le traitement des données de santé, a tenté de répondre dans cette étude, en se basant pour commencer sur les tendances actuelles. En volume, une croissance « stable » est premièrement attendue sur les produits de ville entre 2025 et 2029. « L’accent mis sur le contrôle des maladies chroniques, sur l’observance, la prévention ou le dépistage vont avoir des impacts positifs sur les volumes, explique Yann Rateau de Meursac, directeur des services conseil et analyses chez Iqvia. Dans le même temps, il y aura toutefois des effets limitants : les mesures d’économies supplémentaires, une baisse démographique et les pénuries. »
Un tassement en ville
En valeur, Iqvia prévoit dans le même temps « une diminution de la croissance des prix dans les prochaines années pour les produits de ville ». Si de nouveaux lancements, notamment de médicaments oncologiques, et l’amélioration de l’accès à l’innovation, doivent tirer cette croissance vers le haut, cela sera contrebalancé par deux autres facteurs : « Les baisses de prix et les pertes de brevets d’une part, qui vont entraîner une pression à la baisse sur les prix, et d’autre part la prescription et substitution des biosimilaires », détaille Yann Rateau de Meursac. En tenant compte des effets valeur et volume, « on prévoit une croissance stable autour de 4 % du marché des produits de ville à l’horizon 2029. Au total, le marché du médicament devrait croître de +5,4 % entre 2024 et 2029 mais cette croissance sera essentiellement portée par le marché hospitalier, ce qui n’est pas nouveau car les médicaments onéreux sont justement portés en majorité par l’hôpital », résume l’expert d’Iqvia. Si l’on regarde par ailleurs quelles aires thérapeutiques contribuent le plus à la croissance, on constate que les antinéoplasiques et les immunomodulants vont continuer à prendre une part de plus en plus importante. Alors que cette aire représentait déjà à elle seule 27 % des ventes (en euros) en 2019, cette proposition est passée à 36 % en 2024 et devrait même atteindre 42 % en 2029. « Logiquement, les autres aires vont baisser en proportion d’ici à quatre ans », complète Yann Rateau de Meursac.
Sur la période 2020-2024, on note par ailleurs une augmentation des demandes d’avis reçues par la commission de la transparence de la Haute Autorité de santé (HAS). Un phénomène essentiellement dû à l’accès précoce, système mis en place par la LFSS de 2022. « Il faut toutefois avoir en tête que l’une des conditions qui justifient une autorisation d’accès précoce est l’absence d’alternative thérapeutique. Comme nous en avons de plus en plus, l’accès précoce va se tarir », prévient Delphine Houzelot, directrice prix et accès au marché chez Iqvia. On remarque déjà une augmentation du nombre de refus concernant des demandes d’accès précoce, post ou pré-AMM, en 2024. En 2024, 129 avis ont été rendus en tout par la commission de la transparence de la HAS, avec un service médical rendu (SMR) important obtenu dans 71 % des cas. Cependant, seulement 15 % des médicaments ont été reconnus comme innovant (ASMR I à III) en 2024. Autre chiffre à retenir : le délai d’accès au marché est aujourd’hui de l’ordre de 475 jours en moyenne, allongé notamment par les négociations de prix.
Parmi les innovations les plus attendues en 2025 : un vaccin personnalisé à ARNm contre le cancer, un anticorps contre le cancer des voies biliaires, un antibiotique oral contre les infections urinaires causées par des bactéries multirésistantes…
L’effet changement climatique
Les données produites par Iqvia montrent par ailleurs que la recherche clinique reste très dynamique, tout particulièrement en Europe. Ce sont ainsi 660 nouvelles molécules qui sont potentiellement attendues d’ici à 2027, même si toutes ne parviendront pas sur le marché. Sur l’ensemble de ces molécules, 25 % concernent l’oncologie, 16 % entrent dans le champ de la neurologie et de la psychiatrie et 10 % se rapportent à des maladies infectieuses. On dénombre également 60 % de médicaments biologiques, en majorité des anticorps mais aussi des vaccins thérapeutiques ou des thérapies géniques et cellulaires. Parmi les innovations les plus attendues en 2025 : un vaccin personnalisé à ARNm contre le cancer développé par Moderna, un anticorps contre le cancer des voies biliaires (zanidatamab), un antibiotique oral contre les infections urinaires causées par des bactéries multirésistantes (sulopenem etzadroxil/probenecid) et de nouveaux traitements contre certaines maladies rares (fibrose kystique, syndrome de Barth…)
L’évolution du marché du médicament sera également soumise, outre les mesures apportées par les futures LFSS, à l’impact de l’intelligence artificielle et à celui du changement climatique. « Les événements climatiques graves entraînent une augmentation de la demande de médicaments spécifiques, perturbent les chaînes d’approvisionnement mais diminuent aussi l’efficacité de certains médicaments, sans compter la modification de la répartition et de l’intensité des vecteurs de maladie », détaille Delphine Houzelot, citant les exemples du paludisme ou de la dengue. Alors que le système de santé français représente 8 % de l’empreinte carbone de l’ensemble du pays, les pouvoirs publics voudront-ils également tenir compte de ce facteur pour fixer le prix d’un médicament ? « La direction générale de la santé va mettre en place une méthode d’évaluation qui va permettre aux exploitants pharmaceutiques de calculer de façon simple l’empreinte carbone des médicaments qu’ils commercialisent, précise tout d’abord Delphine Houzelot. Va-t-on tarifer les médicaments en fonction de leur empreinte carbone ? Ce n’est pas dans la LFSS donc ce ne sera mis en place cette année. Pour plus tard, on ne sait pas. En tout cas, cela soulève d’ores et déjà des questions », conclut-elle.
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