Autour de l’ordonnance

Hypertension artérielle : des nouvelles recommandations ambitieuses

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Publié le 09/01/2025
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L’hypertension artérielle constitue un facteur de risque de développement de complications cardiovasculaires, rénales ou neuropsychiques. Une élévation même modérée de la pression artérielle est aujourd’hui à considérer. L’occasion de réviser des recommandations thérapeutiques devenues ainsi plus exigeantes.

Les recommandations dans l’HTA prennent désormais en compte une élévation modérée de la pression artérielle

Les recommandations dans l’HTA prennent désormais en compte une élévation modérée de la pression artérielle
Crédit photo : BURGER/PHANIE

Les points clés

- Les recommandations les plus récentes posent un regard plus exigeant sur la prise en charge de l’hypertension artérielle (HTA) et même de la simple élévation de la pression artérielle.

- L’hypertension constitue en effet un problème majeur en termes de santé publique par ses complications cardiovasculaires, rénales et neurologiques.

- Une pression artérielle optimale est < 120 mmHg (systolique) et < 80 mmHg (diastolique). Il y a hypertension sitôt que la pression systolique est ≥ 140 mmHg et la pression diastolique est ≥ 90 mmHg (valeurs mesurées en cabinet médical).

- La prise en charge actuelle d’une HTA repose généralement sur une bithérapie fixe associant deux molécules issues de trois groupes possibles : ARA2 ou IEC, inhibiteur calcique, diurétique thiazidique. Si les valeurs cibles ne sont pas atteintes, le traitement passe à une trithérapie fixe associant souvent un ARA2, un inhibiteur calcique et un diurétique thiazidique. Dans tous les cas, il est possible de moduler aussi les doses.

- Une hypertension résistante pose toujours un problème thérapeutique et invite à diversifier le panel des molécules prescrites, en envisageant notamment le passage à une quadrithérapie.

Les mots du patient

- « Mon père a une pression artérielle élevée mais pas véritablement d’hypertension. »

- « En quoi l’hypertension est-elle dangereuse ? Je ne ressens rien… »

- « Le médecin a modifié mon traitement, en associant trois antihypertenseurs ! »

- « Quel mode de vie pour lutter contre l’hypertension ? »

- « Doit-on traiter ma mère très âgée pour son hypertension ? »

Un facteur de risques important

L’hypertension artérielle (HTA) est une maladie que caractérise une élévation morbide de la pression artérielle (PA), résultante physique de l’éjection du sang par le cœur dans les vaisseaux.

Elle a une origine complexe, relevant de l’âge, de facteurs de prédisposition génétique, d’une dysrégulation entre les nombreux facteurs physiologiques de contrôle de cette pression, de maladies comme le diabète, de l’obésité, du style de vie (sédentarité, consommation de sel, de nourriture ultratransformée, d’alcool, stress, etc.) et de facteurs environnementaux (pollution atmosphérique, bruit, etc.). Elle constitue une variable continue de risque morbide, cardiovasculaire, rénal ou neurologique notamment, et elle s’impose comme le premier facteur de risque de mortalité dans le monde.

Sa prise en charge ne peut désormais se réduire au seul abaissement des chiffres tensionnels. Les recommandations médicales et thérapeutiques ont été actualisées par l’European Society of Hypertension (ESH) en 2023 et par l’European Society of Cardiology (ESC) en 2024 : un condensé est proposé ici de données intéressant la pratique officinale.

Des hypertendus qui s’ignorent

En France, l’étude ESTEBAN 2014-2016, en population générale, a montré qu’environ 30 % des adultes étaient hypertendus, soit environ 17 millions de personnes.

Pour autant, la connaissance par la population de la maladie comme des modalités de son contrôle restent sous-optimaux. Pire : les indicateurs suggèrent une dégradation récente de sa prise en charge, probablement liée à la crise du Covid-19. Ainsi, en France, 6 millions d’adultes ignorent être atteints et 75 % des patients, soit plus de 4 millions de personnes, sont traités sans contrôle effectif de l’affection : ces chiffres sont moins bons que dans la plupart des pays de niveau socio-économique comparable.

4 millions de personnes sont traitées pour HTA en France, sans contrôle effectif

Deux chiffres clés

La PA s’évalue par deux chiffres : la valeur haute mesurée lors de la contraction du cœur (systole) qui propulse le sang dans l’aorte, et la valeur basse mesurée lors de sa relaxation (diastole), période où les ventricules cardiaques se remplissent du sang arrivant dans les oreillettes. Les valeurs tenues pour « normales » ont évolué avec l’avancée des concepts et des connaissances en cardiologie. Elles correspondent à une PA mesurée en consultation médicale, les recommandations donnant des équivalences pour la PA mesurée en ambulatoire. Au sens strict, l’HTA est définie par une PA ≥ 140/90 mmHg. On considère toutefois qu’il y a élévation de la PA pour des valeurs moindres, très légèrement différentes entre elles selon les recommandations considérées.

(tableau)

Dépistage et bilan médical

En règle générale, aucun symptôme ne suggère l’existence d’une HTA. Dite alors « silencieuse », elle reste ignorée, est découverte fortuitement lors d'un examen médical ou par automesure tensionnelle, ou est révélée par une complication cardiovasculaire (infarctus, angor, insuffisance cardiaque), rénale (insuffisance rénale) ou cognitive (AVC, démence). Il arrive toutefois qu’une HTA puisse induire des signes et ce d’autant plus que son grade est élevé : maux de tête, vertiges, douleurs thoraciques, oppression respiratoire, nausées et vomissements, troubles de la vision, anxiété, etc.

Dépistage d’une HTA ou d’une PA élevée

La stratégie de dépistage de l’HTA ou de chiffres tensionnels élevés dépend du patient et du risque cardiovasculaire. Une mesure est réalisée a minima tous les 3 ans, au cabinet médical, avant l’âge de 40 ans. Au-delà, la mesure est annuelle lorsque le risque est faible ou modéré, plus fréquente sinon. Une PA élevée avec un risque cardiovasculaire faible ou modéré justifie un dépistage opportuniste annuel quel que soit l’âge. Une situation de risque haut fait recommander un suivi tensionnel à domicile. Toute HTA repérée au cabinet médical impose une confirmation ambulatoire.

Mesure de la PA

La mesure de la PA lors d’une consultation est réalisée dans un environnement calme sur un sujet assis depuis au moins 5 minutes, le brassard, validé et adapté à la circonférence du bras du patient, étant correctement positionné ; le bras repose sur un support afin d’éviter toute perturbation induite par des contractions musculaires. La moyenne de trois mesures est prise en compte. Il est également intéressant de mettre en évidence une différence de PA entre les deux bras. La recherche du pouls permet d’exclure une éventuelle arythmie et d’évaluer la fréquence cardiaque - la plupart des appareils de mesure ne sont pas validés en cas d’arythmie, contexte qui fait privilégier une mesure auscultatoire (avec un stéthoscope et un brassard muni d’un manomètre). Les dispositifs sans brassard (« cuffless ») ne sont pas agréés, pas plus que les appareils de mesure au poignet - mais tous pourraient constituer un outil prometteur dans le futur.

Comme il est rare que le médecin puisse respecter ces conditions, il est souvent pertinent de mesurer la PA en dehors du cabinet médical pour obtenir des données exploitables et représentatives : la mesure, de type oscillométrique, est réalisée par le patient, à domicile, avec un appareil agréé automatisé.

Les appareils de mesure de PA sans brassard ne sont pas agréés

PA cible

Les recommandations ESC 2024 définissent des valeurs seuils au-delà desquelles un traitement s’impose. Elles précisent aussi les valeurs cibles devant être atteintes de façon à minimiser le risque de survenue d’événements cardiovasculaires.

Le constat d’une HTA, quel qu’en soit le grade, indique l’instauration immédiate d’un traitement antihypertenseur, indépendamment du risque cardiovasculaire, avec règles hygiénodiététiques (cf. plus bas).

Une pression élevée normale peut faire indiquer un traitement chez un patient à haut ou très haut risque cardiovasculaire sitôt que l’élévation persiste malgré trois mois d’application rigoureuse des règles hygiénodiététiques.

Une fois le traitement mis en place et suivi correctement durant un à trois mois, les cibles à atteindre sont exigeantes, même si, là aussi, elles peuvent différer légèrement selon les diverses recommandations : pour donner un exemple, celles de l’ESC 2024 visent une PAS comprise entre 120 et 129 mmHg et une PAD comprise entre 70 et 79 mmHg, avec une cible idéale de 120/70 mmHg. Une PAS de 120 mmHg associée à une PAD > 80 mmHg peut inviter à optimiser le traitement pour réduire le risque cardiovasculaire.

Évaluation du risque cardiovasculaire global

L’évaluation du risque cardiovasculaire global constitue une pierre angulaire dans la prise en charge d’un patient présentant une élévation de la tension artérielle et a fortiori une HTA car l’objectif du traitement est, précisément, de le réduire au maximum : ce dernier sera pour cela précoce et intensif et d’autant plus bénéfique que le risque est élevé. Cette évaluation repose sur l’outil SCORE 2 (Systemic Coronary Risk Evaluation), permettant de prédire en % le risque de survenue d’un événement cardiovasculaire létal ou non létal à 10 ans, chez un sujet de 40 à 69 ans présumé sain, sans antécédent de maladie cardiovasculaire, non diabétique, sans maladie rénale chronique ; les variables cardinales prises en compte sont le sexe, l’âge, le tabagisme, la PA, le cholestérol total. Il permet de catégoriser les patients selon un risque bas, modéré, haut et très haut. Cet outil n’est pas applicable en dessous de l’âge de 40 ans (car en deçà la prévention primaire joue un rôle essentiel) ; le SCORE-2OP s’applique après 70 ans.

Bilan complémentaire

Le bilan accompagnant un diagnostic d’HTA ou d’élévation de la PA inclut un électrocardiogramme (12 dérivations) et un check-up biologique intégrant hémoglobine et hématocrite, ionogramme, créatininémie (filtration glomérulaire), rapport albuminurie/créatinurie (RAC), glycémie +/- HbA1c, bilan lipidique, TSH. Depuis cette année, les recommandations proposent un dosage de l’aldostérone et de la rénine chez tout sujet hypertendu confirmé car la prévalence de l’hyperaldostéronisme primaire est alors importante (entre 6 et 11 % des patients, avec retentissement sur la prise en charge).

D’autres examens sont proposés : échographie cardiaque si anomalie de l’ECG (mais souvent réalisée de façon systématique par le cardiologue), scintigraphie cardiaque au repos et à l’effort, score calcique coronaire (par scanner thoracique), bilan angiologique complet (recherche ultrasonore de plaques athéromateuses carotidiennes ou fémorales), échographie rénale, index de pression à la cheville, mesure de la rigidité artérielle, dépistage d’anévrismes abdominaux, examens ophtalmologiques, mesure des BNP (marqueurs d’insuffisance cardiaque) et de la troponine ultrasensible (marqueur d’infarctus du myocarde). Le bilan peut également inclure d’autres examens en cas d’HTA précoce, résistante ou encore secondaire (par exemple induite par une cause intercurrente).

Bithérapie voire trithérapie

Correctement adapté et suivi, le traitement antihypertenseur limite de façon importante le risque cardiovasculaire : il réduit notamment le risque d’insuffisance cardiaque de 50 % au moins, de survenue d’accidents vasculaires cérébraux (AVC) de 35 % à 40 %, celui d’infarctus du myocarde de 15 % à 20 %, celui de démence de 10 % à 15 %. Une réduction, même modeste, de la pression artérielle systolique se traduit par une réduction parallèle du risque : ainsi, une diminution de 5 mmHg la PSA réduit d’environ 10 % le risque de survenue d’un événement cardiovasculaire majeur, et ce quel que soit le niveau de la PA initiale et l’existence ou non d’une atteinte cardiovasculaire préalable, tous âges confondus. L’objectif vise un contrôle tensionnel aussi rapide que possible (3 à 6 mois), ce qui améliore le pronostic.

La complexité des mécanismes physiopathologiques à l’origine de l’HTA expliquant le fréquent recours à plusieurs classes de médicaments, la difficulté à obtenir un contrôle satisfaisant chez de nombreux patients et une observance du traitement souvent médiocre justifient l’évolution des recommandations depuis une dizaine d’années en faveur de traitements plus drastiques et d’un recours systématique à des associations fixes diminuant le nombre de prises et simplifiant les schémas thérapeutiques, notamment chez des sujets présentant de multiples comorbidités. De plus, les exigences plus strictes en termes d’objectifs d’abaissement de la PA ont entraîné parallèlement une augmentation du nombre moyen d’antihypertenseurs devant être administrés pour obtenir un contrôle satisfaisant, avec une moyenne actuelle ≥ 3 molécules.

Bithérapie fixe d’emblée

Le traitement repose désormais généralement sur un recours d’emblée à une bithérapie fixe, en un comprimé incluant deux molécules choisies parmi un inhibiteur du système rénine-angiotensine-aldostérone (SRAA), un inhibiteur calcique ou un diurétique. Plus efficace que la monothérapie, cette bithérapie permet d’obtenir un contrôle plus rapide (car lutte contre l’inertie thérapeutique, ou échec du médecin à entreprendre ou intensifier un traitement pourtant indiqué) et persistant (meilleure observance) sans pour autant induire d’iatrogénie significative.

De fait, une monothérapie ne sera guère préférée que chez un sujet très âgé (> 85 ans), présentant une vulnérabilité gériatrique modérée à sévère, une hypotension orthostatique ou chez un patient présentant une élévation de la pression artérielle (comprise entre 130/80 et 140/90 mmHg).

L’HTA implique la mise en place d’emblée d’une bithérapie fixe (parmi ARA2 ou IEC, inhibiteur calcique, diurétique thiazidique) indépendamment du risque cardiovasculaire, avec règles hygiénodiététiques

Trithérapie pas toujours remboursée

En cas de contrôle tensionnel insuffisant passé un à trois mois d’une bithérapie correctement suivie, une trithérapie associant un bloqueur du SRAA (ARA2 ou IEC), un inhibiteur calcique et un diurétique thiazidique, sera prescrite à demi-dose, puis, si le contrôle n’est pas suffisamment amélioré, elle le sera à pleine dose. L’idéal est de recourir à une administration sous forme d’un comprimé unique : l’observance passe d’environ 30 % (3 comprimés) à 55 % (un comprimé).

Le recours à une trithérapie a été promu dès les années 1960-1070 aux États-Unis ; il y a vingt-cinq ans, la FDA a agréé deux trithérapies antihypertensives associant de l’amlodipine, un ARA2 (valsartan ou olmésartan) et un diurétique thiazidique (hydrochlorothiazide). Une trithérapie fixe est plus efficace sur le contrôle tensionnel qu’une bithérapie, avec une réduction plus importante des valeurs de la PAS et de la PAD, et elle est également plus efficace qu’une trithérapie en association libre. Elle permet de contrôler jusqu’à 90 % des sujets, vs 33 % à 60 % sous bithérapie, ce quel que soit le profil du patient et la sévérité de l’HTA, et sans iatrogénie sévère (asthénie éventuelle, légère augmentation de l’incidence des vertiges, globalement estimée à 5 % des cas). De plus, elle est associée à un meilleur pronostic, avec réduction de la masse et de l’hypertrophie ventriculaire gauche à 14 mois, réduction des événements cardiovasculaires, des hospitalisations et de la mortalité totale, et à une amélioration de la qualité de vie du patient vs association libre de traitements en raison de la moindre quantité de comprimés/gélules à prendre quotidiennement. La trithérapie fixe constitue donc un gold standard dans la prise en charge de l’HTA résistante.

Plusieurs spécialités sont agréées aux États-Unis par la FDA : amlodipine/telmisartan/indapamide, amlodipine/valsartan/HCT (Exforge), amlodipine/olmésartan/HCT (Tribenzor), amlodipine/aliskiren/HCT (Amturnide), etc. Cependant, anomalie pouvant constituer une perte de chance pour de nombreux patients, ces associations (Exforge-HCT, Triplixam) ne sont pas prises en charge par l’assurance-maladie en France : elles bénéficient d’une AMM mais leur service médical rendu (SMR) reste insuffisant au prétexte qu’elles ne répondent pas à la nécessité d’adapter souvent et étroitement le schéma posologique. Les sociétés de cardiologie sollicitent désormais leur remboursement, à l’image de ce qui est réalisé dans la plupart des pays européens.

Surveillance du traitement

La surveillance du traitement, qui peut être administré le matin ou le soir, sera mise en œuvre en ambulatoire, les valeurs recueillies étant exploitées pour la titration thérapeutique plutôt que les valeurs de la PA obtenues lors d’une consultation en cabinet. Si le traitement ne permet pas d’atteindre les valeurs cibles de PA en un à trois mois, un diagnostic d’HTA (apparemment) résistante pourra être posé.

Prise en charge d’une hypertension artérielle résistante (HTAR)

L’hypertension artérielle résistante (HTAR) correspond à une hypertension artérielle non contrôlée malgré une trithérapie antihypertensive adaptée et dont le pronostic est plus sévère. Certains facteurs conduisant à l’HTAR sont amendables, au premier rang desquels des défauts d’observance du traitement et/ou de respect des règles hygiénodiététiques. Ces « pseudo-résistances » constituent une part significative des HTAR mais certains malades (soit 5 % à 10 % des cas d’HTA) ne rentrent pas dans ce cadre et présentent une HTA intrinsèquement résistante dont les mécanismes physiopathologiques - et donc les cibles pharmacologiques spécifiques - restent mal connus.

5 % à 10 % des cas d’HTA sont résistants aux traitements

Si l’observance du traitement (vérifiée par dosage pharmacologique) s’avère satisfaisante, il faut réaliser un bilan d’HTA secondaire et traiter alors ses causes - si possible. Face à une HTAR essentielle, primaire, le cardiologue complète la trithérapie par un antagoniste des récepteurs aux minéralocorticoïdes : spironolactone ou, si mauvaise tolérance, éplérénone. L’inefficacité de cet ajout invite à substituer le diurétique par un bêta-bloquant, puis, finalement, à remplacer ce dernier par un alpha-bloquant, par un antihypertenseur d’action centrale ou par un autre diurétique. La prescription d’un bêta-bloquant peut toutefois avoir été réalisée dès le début de la prise en charge du patient en cas d’hypertension associée à un autre trouble cardiaque (insuffisance cardiaque, angor, etc.).

Allant plus loin dans cette logique, des quadrithérapies fixes sont testées. Ainsi, l’essai QUADRO a montré la supériorité de l’association de quatre antihypertenseurs (périndopril, indapamide, amlodipine, bisoprolol) vs trithérapie sans bêta-bloquant chez des patients présentant une HTAR, avec un profil de tolérance satisfaisant.

De nouveaux antihypertenseurs visant les résistances sont également en cours d’étude clinique voire de commercialisation. L’aprocitentan, un inhibiteur des récepteurs de l’endothéline, contribue ainsi à réduire la PA chez les sujets traités par trithérapie pour HTAR.

Dénervation rénale

Pour la première fois, la dénervation rénale est intégrée aux recommandations de l’ESC. Cette technique consiste à interrompre les connexions nerveuses sympathiques entre les reins et le cerveau pour bloquer certains des mécanismes vasoconstricteurs et des mécanismes impliqués dans la rétention hydrosodée, tous contribuant à la résistance aux antihypertenseurs. En pratique, un radiologue ou cardiologue interventionnel soumet la paroi des artères rénales à un courant électrique de faible intensité (ondes de radiofréquence) délivré par un cathéter introduit sous sédation par voie endovasculaire (artère fémorale). Cette stratégie, qui ne se suffit pas à elle seule (la prise de plusieurs antihypertenseurs s’impose toujours) mais contribue chez certains patients à améliorer la PA, est proposée après évaluation multidisciplinaire.

Situations particulières

Grossesse

Les divers types d’HTA observée durant une grossesse (HTA chronique de la femme enceinte, HTA gestationnelle) sont traités sitôt que la PA est > 140/90 mmHg, avec un objectif de PA < 140/90 mmHg. Sont alors indiqués en première ligne les inhibiteurs calciques non bradycardisants (nifédipine, etc.), le labétalol ou la méthyldopa ; les inhibiteurs du système rénine-angiotensine sont évités. Les mesures hygiénodiététiques revêtent une importance cruciale. Une PAS ≥160 mmHg ou une PAD ≥110 mmHg font parfois indiquer une hospitalisation.

Âge compris entre 18 et 40 ans

La précarité sociale, des facteurs économiques, l’obésité - des paramètres souvent liés - expliquent que la prévalence de l’HTA, notamment secondaire, augmente actuellement dans cette tranche d’âge. Un dépistage systématique des causes sera réalisé, notamment celui d’un syndrome d’apnées obstructives du sommeil (SAOS). Le traitement pose souvent des problèmes d’observance chez le sujet jeune et dans ces milieux sociaux.

Âge > 85 ans

En l’absence de vulnérabilité, le traitement est recommandé sitôt le diagnostic d’HTA confirmé (> 140/90 mmHg), mais non en cas de simple élévation de la PA. Les objectifs tensionnels sont moins stricts, visant par exemple une PAS < 140 mmHg ; une mauvaise tolérance du traitement (épisodes d’hypotension orthostatique par exemple) fait viser une PAS aussi basse que « raisonnablement » possible. Sont alors privilégiés les inhibiteurs calciques non bradycardisants d’action prolongée et les antagonistes du système rénine-angiotensine ; les diurétiques passent au second plan et sont prescrits à faible posologie ; alpha- et bêta-bloquants sont évités autant que possible. Ce traitement est poursuivi aussi longtemps qu’il est bien toléré, il est réduit en cas de développement de fragilités gériatriques tout comme est réduite l’administration de médicaments potentiellement hypotenseurs (ex : alpha-bloquants pour l’adénome de la prostate ou sédatifs).

Hygiène de vie

Les mesures hygiénodiététiques reposent sur une réduction de la sédentarité, avec une activité physique régulière et adaptée (a minima 2,5 heures d’exercice modéré/semaine ou 75 minutes d’activité vigoureuse réparties sur 3 jours/semaine en complément d’une activité quotidienne faible à modérée), sur une réduction drastique de la consommation de sucres libres, de boissons sucrées et d’alcool, sur l’arrêt du tabagisme, et, également essentiel, sur l’adoption d’un régime alimentaire méditerranéen avec apports importants de fruits, légumes et fruits secs (noix, etc.) et enrichissement relatif en potassium (bananes).

S’impose une restriction sodée rigoureuse (sodium < 2 g/j, soit sel de cuisine < 5 g/j), tout en ménageant la possibilité de recourir à des sels de substitution enrichis en potassium (si absence de pathologie rénale chronique avancée ou d’hyperkaliémie).

Questions sur ordonnance

M. Ernest P., 54 ans

Monsieur Ernest P., 54 ans

Sitagliptine 50 mg/metformine 1 g : 1 cp x 2/jour, au cours du repas

Acarbose 50 mg : 1 cp x 3/jour, au début de chaque repas

Irbésartan 300 mg/HCT 25 mg : 1 comprimé le matin

Tamsulosine 0,4 mg LP : 1 gélule/jour

QSP deux mois

Traité pour une hypertension artérielle (HTA) essentielle de grade 2 ainsi que pour un diabète de type 2, monsieur P., patient en surcharge pondérale, se relève une à trois fois par nuit pour uriner et se voit prescrire pour la première fois un traitement symptomatique de l’hypertrophie bénigne de la prostate. Le dosage de son anti-hypertenseur a aussi été augmenté.

Quels principes actifs ?

L’association fixe antidiabétique est composée de metformine, un biguanide antihyperglycémiant, et de sitagliptine, un inhibiteur de la DPP-4 qui augmente les taux des incrétines.

L’acarbose, un inhibiteur de l’alpha-glucosidase, diminue l’hyperglycémie postprandiale, associé ou non à d’autres antidiabétiques.

L’association fixe d’un antagoniste des récepteurs à l’angiotensine II (ARA II, sartan), l’irbésartan, et d’un diurétique thiazidique, l’hydrochlorothiazide (HCT), correspond aux recommandations actuelles de prise en charge de l’hypertension par une bithérapie.

La tamsulosine est un alpha-1 bloquant indiqué dans le traitement de l’hypertrophie bénigne de la prostate.

Y-a-t-il des insuffisances et des interactions ?

Le dosage de l’association antihypertensive a été adapté, avec augmentation de la dose d’HCT de 12,5 à 25 mg pour améliorer le score tensionnel. Prudence : les diurétiques thiazidiques peuvent induire une intolérance au glucose susceptible de la déséquilibrer.

La prudence s’impose aussi chez un patient bénéficiaire d’un traitement anti-hypertenseur et d’un traitement alpha-bloquant compte tenu du risque d’hypotension orthostatique et de malaise. Le médecin aurait pu - une sorte de compromis - choisir de ne pas augmenter la posologie de l’antihypertenseur lors de l’introduction de la tamsulosine afin de ne pas courir le risque de manifestations d’orthostatisme. Ce médicament s’administre à la fin d’un repas consistant.

Et les posologies ?

Elles sont correctes.

Le conseil du pharmacien

Les principes hygiénodiététiques sont répétés, surtout s’il s’agit d’un sujet à risque cardiovasculaire élevé : toute réduction pondérale apporte un bénéfice glycémique et tensionnel ; une réduction de la consommation des lipides, surtout saturés, entraîne un effet bénéfique rapide sur la glycémie et sur la dyslipidémie ; les glucides doivent représenter 45 à 50 % des apports caloriques journaliers (privilégier les glucides complexes) ; les apports sodés sont réduits drastiquement ; essayer de ne pas consommer d’alcool ni de tabac.

Le risque de vertiges, d’évanouissement et de malaise (orthostatisme) invite à la prudence au volant.

Par Nicolas Tourneur, pharmacien

Source : Le Quotidien du Pharmacien