En 2024, les pharmaciens ont travaillé plus pour… gagner moins, pour la grande majorité d’entre eux. La hausse d’activité enregistrée en 2024 se traduit par une augmentation de 5,03 % du chiffre d’affaires à 2,511 millions d’euros. Une progression supérieure à celle qu’a connue le réseau un an auparavant (+ 2,72 %).
Dans un contexte où le prix du médicament a baissé de 2,25 %, cette performance s’explique en grande partie par une augmentation de 7,78 % des ventes de médicaments remboursables (TVA 2,1 %), provenant essentiellement des molécules chères. Certes, les ventes de produits d’un prix supérieur à 150 euros progressent moins rapidement qu’en 2023 : + 13,83 % contre 20,18 % mais elles n’en constituent pas moins 42,13 % du chiffre d’affaires de TVA à 2,1 %, contre 39,48 % un an auparavant. Le médicament conseil (TVA à 5,5 % ) connaît, pour sa part, un regain à +2,40 % après une baisse en 2023. De manière générale, ce segment est en hausse constante depuis dix ans. Mais la plus forte poussée est exercée par les produits de TVA à 20 %. À +6,25 %, elle s’inscrit dans la tendance de ces quatre dernières années, à laquelle cependant les effets de l’inflation ne sont pas étrangers.
Moins 10 000 euros en un an
Portée pour un tiers par les honoraires de dispensation et à l’ordonnance, la marge brute globale progresse en moyenne de 1,7 %, soit 8 200 euros en valeur, sur l’ensemble du réseau officinal, à l’exception des pharmacies d’un chiffre d’affaires inférieur à 1,5 million d’euros,
Face à ces indicateurs à la hausse, le constat est amer, car ils ne se reflètent en rien dans la rentabilité des officines. À 254 400 euros, l’excédent brut d’exploitation (EBE) recule de 3,80 %, pour atteindre 10,13 % du chiffre d’affaires, contre 11,06 % un an auparavant, et même 14,94 % au sortir de la pandémie. En valeur absolue, cette chute est encore plus explicite. Les pharmaciens ont perdu en moyenne 10 000 euros d’EBE en un an.
Ces statistiques présentées le 6 mars par les experts-comptables du réseau CGP* font état d’une baisse générale sur le marché officinal. Elles sont toutefois à relativiser en fonction de la taille de l’officine, comme le présente Bastien Legrand, président du réseau : « les officines d’un chiffre d’affaires inférieur à 1 million d’euros subissent un recul de 11 % de leur EBE tandis que leurs homologues d’un chiffre d’affaires de 4 millions d’euros n’enregistrent qu’une baisse de 1 %, soit 5 000 euros en valeur absolue. » Pour expliquer ce décrochage du réseau officinal, le président de CGP poursuit son analyse. « Entre 2014 et 2024, l’EBE des pharmacies a progressé de 5 %. Cependant, sur la même période l’inflation cumulée est de 23 %. Par conséquent, en euro constant, la rémunération du pharmacien a baissé. »
De fait, au cours des dernières années, rapportée au coût de la vie, la rémunération officinale n’a cessé de s’amoindrir. La hausse des charges est la première responsable de ce phénomène. En 2024, elles ont augmenté sous la pression des charges externes (+5,94 %) (facture énergétique mais aussi contrats de leasing) et des frais de personnels (+ 5,61 %). Ceux-ci connaissent une hausse de 14 700 euros pour représenter 10,99 % du chiffre d’affaires contre 10,93 % l’année dernière, ou encore 38,8 % de la marge brute globale. Deux hausses que n’a pu, par conséquent, compenser l’évolution de 8 200 euros de la marge brute en valeur.
« Cette explosion des frais de personnels est-elle à mettre au compte de l’évolution de la grille tarifaire (+ 2 % en 2024) ou de l’augmentation du nombre d’équivalents temps pleins ? », interroge Philippe Besset, président de la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF). Pour le réseau CGP, ce n’est pas tant l’augmentation du nombre d’équivalents temps plein au sein des équipes officinales qui explique l’explosion des coûts salariaux que les évolutions de la grille tarifaire en 2023 répercutées sur l’année dernière. « Sans compter, insiste Bastien Legrand, que la protection sociale, sous l’influence de la hausse des complémentaires santé et de la prévoyance, coûte aujourd’hui plus cher. » Autant d’arguments qui n’ont pas manqué de peser sur les négociations salariales qui se sont ouvertes lundi entre les syndicats de salariés et les représentants des titulaires.
* Statistiques professionnelles de la pharmacie, Édition 2025, sur un échantillon de 1 853 pharmacies
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