- On ne pourrait pas installer ce frigo en hauteur, râle Nicole Bertin en se penchant péniblement pour attraper un vaccin contre la grippe.
Comme d’habitude la préparatrice ajoute « vivement la retraite ».
- Ça fait huit ans que je connais Nicole, et huit ans qu’elle attend la retraite, plaisante Julien.
- Et le jour où je serai enfin libérée, je vais vous manquer, répond la préparatrice.
Autour d’elle, tout le monde s’active. En ce premier jour de campagne de vaccination, beaucoup de patients se présentent avec leur bon de prise en charge. La salle Pasteur est constamment occupée depuis l’ouverture de la pharmacie.
– Voilà Monsieur, dit Christèle en déposant la seringue dans la boîte jaune.
- Je suis protégé pour l’hiver. On dit que la grippe s’annonce coriace cette année, c’est vrai ?
- Si elle est aussi sévère qu’en Australie, il faut s’attendre à une saison difficile en effet.
- Mon petit-fils est parti vivre un an en Australie, dit l’homme avec fierté.
- C’est super. Est-ce que vous irez le voir ? demande la préparatrice en invitant le patient à la suivre au comptoir.
- Ah non, ou alors il faudrait que j’y aille en bateau.
Christèle et son patient sont à peine sortis de la salle de vaccination que Kenza y entre avec Madame Chapovski.
- Donc ce n’est pas encore gagné totalement si je comprends bien ? dit la patiente en retirant son chemisier.
- Non effectivement. Le texte qui réduisait le plafond des remises est suspendu, mais ce n’est qu’un sursis. Et avec ce qu’il se passe au niveau politique, les syndicats n’ont plus d’interlocuteurs…
- Ne m’en parlez pas. Si mon père était encore de ce monde, il dirait que la classe politique est bonne à rien. Je ne vous ai jamais dit que mon père connaissait très bien Mendès France ?
- Mais non, répond Kenza intriguée.
Tout en écoutant la suite de l’histoire, la pharmacienne enfonce l’aiguille dans le bras de la patiente.
- Il était dans l’armée et au fil du temps, il est devenu chauffeur dans divers ministères sous la quatrième République.
- Il a dû en croiser des personnalités ! Voilà je vous libère.
- Vous ne me piquez pas ?
- Mais c’est fait Madame Chapovski. Ne me dites pas que vous n’avez rien senti ?
- Rien du tout. Donc c’est le vaccin super puissant que j’ai reçu ?
- Super-puissant, c’est peut-être un peu exagéré, mais il s’agit effectivement d’une dose plus élevée, donc un vaccin plus protecteur pour les personnes plus âgées.
La pharmacienne et sa patiente retournent au comptoir en discutant. Emmanuel les interrompt :
- Kenza, j’ai besoin de ton avis s’il te plaît, dit le préparateur en lui montrant une ordonnance.
- Beyfortus ?
- Oui mais il se trouve que la femme pense avoir été vaccinée pendant la grossesse.
- Dans ce cas, il n’y a pas besoin d’immuniser l’enfant…
- Elle n’est plus très sûre. Elle ne sait plus si c’est contre la coqueluche ou contre la bronchiolite.
- Et dans l’historique ?
- Je ne retrouve ni l’un ni l’autre. Cette patiente va dans deux pharmacies différentes.
- Pour le VRS, c’est soit la vaccination pendant la grossesse, soit l’immunisation après la naissance, mais pas les deux, sauf cas exceptionnel.
- Je ne commande pas Beyfortus avant de savoir si elle a reçu le vaccin, conclut Emmanuel.
(À suivre…)
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