Cas de comptoir
Le contexte
Mme H, anxieuse : « Mon fils de 2 ans vient de se cogner la tête sur un mur. Regardez sa bosse ! Qu’est-ce que je mets dessus ? »
Votre réponse
« Vous pouvez mettre tout de suite de la glace sur la bosse afin de calmer la douleur et diminuer l’œdème, soit avec une poche ou alors des glaçons dans un tissu. Du paracétamol peut être donné, à raison d’une dose poids toutes les 6 heures. Une pommade antalgique comme Arnigel ou Hémoclar pourra être suite appliquée sur la bosse. Il faudra surveiller l’état général de votre enfant pendant au moins 48 heures. »
Physiopathologie
L’ecchymose, ou « bleu » dans le langage courant, est une tache bleue liée à un échappement de sang des vaisseaux sanguins vers les couches les plus superficielles de la peau. Elle se distingue de l’hématome, collection de sang saillante sous la peau due à un épanchement de sang plus profond et avec une régression plus lente. Au cours de leur évolution, l’ecchymose et l’hématome changent de couleur : bleue, noire ou violacée pour virer au vert et au jaune. Les deux ne sont pas douloureux sauf s'ils sont comprimés.
D’un point de vue physiopathologique, un choc plutôt violent est à l’origine de la rupture des capillaires vasculaires irriguant le tissu cutané. Le sang se libère et s'infiltre alors dans les environs comme la peau. S’en suit une inflammation puis une asphyxie des tissus à l’origine de la contusion. Cela se traduit par une bosse au niveau de la tête ou du tibia, en raison de l’absence de tissu mou absorbant le choc, ou bien, au niveau des bras ou des cuisses, par une ecchymose ou hématome qui peut se répartir dans les tissus mous. Les ecchymoses ou hématomes peuvent siéger sur toutes les parties du corps, selon la location du traumatisme.
Quelques exemples :
- L’œil au beurre noir correspond à une ecchymose autour de l’œil avec la paupière éventuellement enflée. La coloration peut également atteindre la joue ;
- L’oreille en chou-fleur est due à un choc au niveau du pavillon de l'oreille se traduisant par un gonflement violet mais sans impacter sur l’audition ;
- Un hématome au niveau de l’ongle, formé après un coup sur l’extrémité d’un doigt, est connu pour provoquer une douleur lancinante. L’hématome est aussi particulièrement long à se résorber ;
- La bosse ou œuf de pigeon est un gonflement à la surface de la peau, souvent localisé au niveau du front ou du cuir chevelu, résultant de l'éclatement d'un vaisseau sanguin. La bosse est douloureuse mais bénigne, se résorbant au bout de plusieurs jours, en changeant de couleur. Les bosses apparaissent plus fréquemment sur le crâne car la peau est richement vascularisée. En outre, l’os crânien empêche que la poche de liquide aille en profondeur et l’absence de muscle dans cette zone ne peut absorber le choc, contrairement au niveau des bras ou des cuisses.
Les causes
Chez le jeune enfant, notamment en période d’acquisition de la marche, les ecchymoses sont fréquentes, ainsi que chez le sportif. Le nouveau-né peut également avoir des ecchymoses au niveau du visage si l’accouchement fut long et laborieux (forceps, ventouse…). Ces bleus disparaissent rapidement.
L’âge (fragilité des vaisseaux) et le sexe féminin (peau plus fine) sont aussi des facteurs de risque de survenue d’hématomes.
La cause iatrogène est aussi à prendre en compte. Anticoagulants, antiagrégants plaquettaires, corticoïdes au long cours et chimiothérapies anticancéreuses, tous ces traitements sont connus pour provoquer des hématomes spontanément ou après un choc, même le plus minime. Les maladies entraînant des troubles de la coagulation favorisent également la survenue d’ecchymoses et d’hématomes : hémophilie, troubles de la coagulation, les maladies des plaquettes du sang, leucémie, certaines maladies infectieuses, insuffisance hépatique.
Anticoagulants, antiagrégants plaquettaires, corticoïdes au long cours et chimiothérapies anticancéreuses augmentent les risques d’hématomes
Conduite à tenir
Le protocole G.R.E.C
Le protocole G.R.E.C (Glace, Repos, Élévation, Compression) peut s’appliquer à la suite d’un choc. En effet, l’application de froid permet de limiter l’œdème et la douleur à la suite d’un traumatisme musculaire ou articulaire. Attention de ne pas poser un glaçon directement à même la peau sous risque de brûlure. Il faut ainsi appliquer les glaçons contenus dans une poche ou un linge pendant 20 minutes. Les bombes de froid ou sprays réfrigérants peuvent aussi être utilisés, vaporisés à 15 cm de la peau en effectuant des mouvements de balayage. Il existe aussi des packs de froid et/ou des compresses refroidissantes à appliquer une vingtaine de minutes sur la zone douloureuse.
En association avec la glace, un pansement modérément compressif (ou bande) peut être mis en place au niveau de l’hématome pendant quelques minutes. Si l’hématome se situe au niveau de l’ongle, il peut être évacué.
20 minutes Appliquer du froid sur l’œdème pendant 20 minutes
La surveillance
Les ecchymoses et les hématomes sont bénins avec une évolution favorable et spontanée en quelques semaines. Une bonne évolution se traduit par un changement de couleur : rouge foncé au noir en 48 à 72 heures, puis violet au bout de la première semaine, enfin jaune à verte avant de disparaître.
En cas de complications il conviendra d’orienter le patient vers son médecin traitant : apparition spontanée de multiples bleus, hématome sous ongle de plus en plus douloureux, non-résorption de l’hématome, enkystement de l’hématome ou formation d’un hématome de Morel Lavallée, se traduisant par un épanchement persistant sous la peau de la cuisse ou du dos après un choc violent souvent tangentiel. Dans ce cas particulier, un bandage compressif devra être associé à des ponctions. Le traitement chirurgical doit être envisagé en cas de forme résistante.
En cas de chute ou traumatisme chez l’enfant, il faudra surveiller l’état général pendant au moins 48 heures. Une consultation aux urgences est obligatoire si l’enfant présente des vomissements, une perte de connaissance, des troubles du comportement, une somnolence, une perte d’appétit ou des difficultés de langage.
En cas de chute ou traumatisme chez l’enfant, il faudra surveiller l’état général pendant au moins 48 heures
Consultation urgente obligatoire
Selon la localisation, il convient d’orienter rapidement le patient victime d’un traumatisme vers un service d’urgences :
- Perte de connaissance, troubles de la conscience, fourmillements au niveau des extrémités à la suite d’un choc au niveau de la tête ;
- Ecchymose ou hématome en « lunettes » après un choc sur le crâne (fracture d’un os du crâne possible) ;
- Troubles de la vue à la suite d’un choc violent au niveau d’un œil ;
- Hématome au niveau des testicules ;
- Hématome au niveau de l’oreille ;
- Présentation d’un état de choc à la suite d’un choc au niveau du thorax ou de l’abdomen.
Attention aussi chez l’enfant avec la survenue de nombreux bleus localisés au niveau des oreilles, du dos ou des fesses, qui peut faire suspecter de la maltraitance.
Enfin, si en l’absence de chute ou de coups, des ecchymoses ou bleus apparaissent spontanément, un avis médical est recommandé.
Les produits du conseil
Les antalgiques par voie orale
Le paracétamol est à conseiller en première intention, chez l’adulte et l’enfant pour traiter la douleur et la fièvre. La posologie est de 60 mg par kilo de poids et par jour, en quatre ou six prises, sans dépasser 80 mg par kilo et par jour chez l’enfant. Chez l’adulte et l’adolescent de plus de 50 kg, à partir de 15 ans, la posologie est de 1 gramme toutes les 6 heures, sans dépasser 3 grammes par jour. Il est contre-indiqué en cas d’allergie au paracétamol et en cas d’insuffisance hépatique.
L’ibuprofène peut également être proposé pour calmer la douleur. La posologie est de 200 à 400 mg 3 fois par jour chez l’adulte ; 20 à 30 mg par kg et par jour chez l’enfant, répartis en 3 ou 4 prises, sans dépasser 30 mg par kg et par jour. Attention aux contre-indications : antécédents d’ulcère gastro-duodénal, grossesse à partir du 6e mois, allergie à la substance ou autres AINS dont l’aspirine, insuffisance rénale, insuffisance hépatique.
En complément
Les préparations à base d’Arnica montana (crème, gel, huile, spray) peuvent être appliquées pour atténuer la douleur. La souche homéopathique peut être prise en dose (une dose immédiatement après le choc) ou granules (3 à 5 granules toutes les heures à espacer selon l’amélioration).
D’autres pommades peuvent aussi être appliquées localement afin de réduire l’hématome et diminuer la douleur comme Hémoclar (polyester sulfurique de pentosane) à partir de 1 an ou Synthol, à partir de 7 ans. Des formules à base d’huiles essentielles (Baume Secours Végébom) ou de plantes (Solution contre-coups de l’Abbé Perdrigeon) peuvent aussi être appliquées.
Testez-vous
1. L’œuf de pigeon est :
a) Une bosse située au niveau du bras ;
b) Une bosse bénigne située généralement au niveau du front et du cuir chevelu ;
c) Une bosse disparaissant spontanément ;
d) Un grave hématome nécessitant une consultation en urgence.
2. L’orientation médicale, en cas de coup ou ecchymose, est recommandée en cas de :
a) Céphalées ;
b) Vomissements ;
c) Perte de connaissance ;
d) Perte de la vision.
3. Pour atténuer la douleur est conseillée :
a) L’application de pommades chauffantes ;
b) L’application de froid ;
c) L’administration d’aspirine en première intention ;
d) L’application de pommades anti-inflammatoires.
Réponses : 1.b) et c) ; 2. b), c) et d) ; 3. b).
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