Cession des pharmacies : l’émergence de deux marchés

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Publié le 21/04/2022
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La crise sanitaire n’a eu aucun impact négatif sur les ventes de pharmacies. Bien au contraire, comme le démontre l’étude « Prix de cession des pharmacies » menée par Interfimo en partenariat avec OCP, le marché des transactions établit un nouveau record, tandis que les prix restent étales, qu’ils soient calculés en multiple de l’EBE ou en pourcentage du chiffre d’affaires. Néanmoins, cette apparente stabilité peine à cacher la scission du marché des cessions.

L’officine se vend mieux que jamais avec 1 600 mutations enregistrées en 2021 contre 1 503 en 2020. Le taux de mutation tend à s’accroître à 79 pour 1 000 officines, contre 73/1000, il y a encore un an. Avec des Pays de la Loire en pointe à 91/1 000, tandis que le réseau en Bourgogne Franche Comté fait preuve d'une étonnante stabilité à 56 cessions pour 1 000 pharmacies.

Phénomène observé depuis plusieurs années, les cessions de titres en nom propre ou par le biais de SPFPL gagnent du terrain pour représenter aujourd’hui 42 % des opérations. Elles sont d’ailleurs majoritaires dans les cessions de biens d’un chiffre d’affaires supérieur à 2 millions d’euros. Pour autant, rien ne permet d’affirmer que cette tendance perdurera en raison d’une nouvelle mesure introduite par la loi de Finances pour 2022 (voir interview ci-contre).
Autre phénomène marquant du marché de transaction, la dispersion des prix s’amplifie. En bas de l’échelle, des petites pharmacies (chiffre d’affaires inférieur à 1,2 million d’euros) qui se cèdent à 5,2 fois leur EBE* (5,3 en 2020) tandis que celles d’un chiffre d’affaires de plus de 2,4 millions d’euros sont valorisées à 7,2 fois leur EBE, contre 6,8 il y a encore un an. Abstraction faite des petites officines, dans ce contexte où les écarts types se creusent, le prix de vente moyen du marché progresse de 6,5 à 6,7 fois l’EBE (voir tableau ci-contre).

Un chiffre d'affaires déterminant

Mais la taille n’est pas le seul critère de valorisation. Ainsi, le prix des officines de centre-ville gagne 0,1 point à 6,4 fois leur EBE, tandis que les pharmacies rurales sont cédées à 5,8 fois leur EBE (soit un retrait de 0,2 point). Néanmoins, comme le souligne Jérôme Capon, directeur du réseau Interfimo, « cette dernière typologie de pharmacies est moins valorisée en multiple de l’EBE en raison de leur bonne rentabilité, l’EBE important entraînant une baisse mathématique du multiple ». Face à ce constat, Jérôme Capon, observe que « deux marchés sont en train de se créer. La taille devient un critère déterminant avec une pression très forte sur les grandes pharmacies, tandis que les plus petites voient leur prix baisser, a fortiori selon leur lieu d’implantation ».

Cette observation se confirme à l’étude du prix de vente rapporté en pourcentage du chiffre d’affaires. Car si le niveau reste stable avec une valorisation à 78 % du chiffre d’affaires, cette moyenne cache des écarts de 30 points entre les petites officines dont le prix tombe de 62 % à 60 % du chiffre d’affaires et celles d’un chiffre d’affaires de 2,4 millions d’euros, valorisées à 90 % de leur activité (87 % en 2020). « Plus le chiffre d’affaires est important et plus le prix de vente en pourcentage du chiffre d’affaires est élevé », analyse les experts d’Interfimo. Une observation qu’il faut toutefois relativiser avec une prise en compte des activités « Covid » qui ont dopé l’activité de ces deux dernières années.

* EBE reconstitué, avant rémunérations et cotisations sociales des titulaires cédants.

Marie Bonte

Source : Le Quotidien du Pharmacien