Lévothyroxine

La formule qui sème la discorde

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Publié le 18/06/2018
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Le 14 juin, l’Association française des malades de la thyroïde (AFMT) a dénoncé des anomalies graves sur la nouvelle formule du Lévothyrox, qui pourraient expliquer, selon elle, les effets secondaires rencontrés par certains patients. Ces accusations ont fait vivement réagir le Laboratoire Merck – qui dénonce leur absence de fondement scientifique — mais aussi les autorités sanitaires françaises, qui ont déclaré ne pas pouvoir se prononcer sur ces études dont aucun détail n’a été fourni par l’association.

« Enfin nous avons peut-être une explication rationnelle à la crise sanitaire du Lévothyrox », a annoncé en grande pompe, le 14 juin, l’Association française des malades de la thyroïde (AFMT), qui a mené de nouvelles analyses sur le Lévothyrox nouvelle formule (NF). Un laboratoire, dont le nom n’a pas été révélé, aurait effectué pour le compte de l'association une analyse chromatographique sur une boîte de Lévothyrox ancienne formule (AF) et sur 2 boîtes de Lévothyrox nouvelle formule (NF), issues de lots différents. Les résultats ont montré que « la teneur en lévothyroxine dans la nouvelle formule est gravement inférieure aux spécifications en vigueur », et ont également permis de constater « la présence très anormale de dextrothyroxine (forme dextrogyre de la lévothyroxine, N.D.L.R.) », selon l’AFMT. Face à ces résultats sur un nombre peu élevé de boîtes (deux), l’AFMT repasse le bébé à l’Agence nationale de sécurité sanitaire des produits de santé (ANSM), l’exhortant à « faire expertiser en urgence par des laboratoires indépendants un nombre significatif » de boîtes, afin de confirmer cette étude.

Merck contre-attaque

Mais ces nouvelles révélations ont rapidement fait réagir le Laboratoire Merck, qui a fermement contesté ces déclarations qui sont, pour lui, infondées scientifiquement. « Nous démentons de façon formelle la présence de forme dextrogyre dans les comprimés de Lévothyrox, qu’il s’agisse de l’ancienne ou de la nouvelle formule », déclare Valérie Leto, pharmacien responsable de Merck, en rappelant que la substance active utilisée pour Lévothyrox NF est strictement identique à celle présente dans l’ancienne formule (forme dite lévogyre). D’ailleurs, « contrairement à certaines allégations, le procédé de fabrication du Lévothyrox (AF ou NF) ne permet en aucun cas une transformation de la forme lévogyre à la forme dextrogyre de la lévothyroxine. Cela a été scientifiquement documenté », ajoute le laboratoire. Quant au taux de lévothyroxine, « de nombreuses études réalisées par les autorités compétentes n’ont pas identifié la moindre non-conformité », précise Merck. Le laboratoire indique que « dans ce contexte devenu délétère, il va prendre les mesures nécessaires pour faire cesser les diffusions de prétendues déclarations non scientifiquement fondées, qui ne font qu’inquiéter les patients et déstabiliser la communauté médiale ».

L'ANSM dubitative

Dans la foulée, l’ANSM a confirmé avoir réalisé dans ses laboratoires plusieurs contrôles sur la composition du Lévothyrox NF qui ont confirmé sa bonne qualité et sa conformité. Par ailleurs, l’ANSM est restée très prudente quant à l’interprétation des études avancées par l’AFMT. « Les résultats de ces analyses ne sont ni détaillés, ni accompagnés d’informations sur le laboratoire ou la méthode utilisée. Aussi, il n’est pas possible, à ce jour, de se prononcer sur leur validité. »

Charlotte Demarti

Source : Le Quotidien du Pharmacien: 3445