Mycologie

À la recherche de l’origine des toxines des champignons

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Publié le 02/06/2022
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Pourquoi des champignons qui ne sont pas de la même espèce fabriquent-ils la même toxine, l'amanitine ? Selon les chercheurs, un champignon ancestral, partageant le même habitat que d'autres espèces mycologiques, leur aurait transmis les gènes de cette fameuse toxine.
Des espèces différentes, une même toxine

Des espèces différentes, une même toxine
Crédit photo : Phanie

Amanite phalloïde, galère marginée et lépiote crêtée : ces trois champignons forestiers produisent la même toxine mortelle, l’amanitine. Pourtant, ce sont des espèces différentes… Alors comment la production d’une même toxine est possible ?

Selon les chercheurs, il pourrait s’agit d’un transfert horizontal de gènes. En effet, l’amanitine est biosynthétisée sur les ribosomes. Elle serait apparue, il y a très longtemps, chez un champignon qui vivait dans les sols forestiers, en compagnie des ancêtres de ces trois espèces. Comme ces champignons vivaient sur le même sol, le champignon ancestral aurait transmis les gènes nécessaires à la fabrication de l’amanitine à ses voisins, non pas par voie sexuelle mais par transfert direct de matériel génétique. Pour vérifier cette hypothèse, des scientifiques de l’INRAE, en collaboration avec l’Institut de botanique de Kunming (Yunnan, Chine), ont comparé les génomes de 15 champignons producteurs d'amanitine. Avec ce travail, qui a été publié dans la revue « PNAS », les chercheurs ont ainsi identifié quatre gènes responsables de la fabrication de cette toxine létale.

1 000 cas d'intoxication chaque année

Ces quatre gènes sont présents en un seul exemplaire chez les amanites, les lépiotes toxiques et la galère marginée, ce qui conforte l'hypothèse du transfert direct de matériel génétique. Cependant les amanites mortelles, comme l’amanite phalloïde, ont ces quatre gènes, mais en dizaines d’exemplaires ! Plus il y a d’exemplaires, plus la toxine produite est abondante, aboutissant à une accumulation très élevée de la toxine dans cette amanite.

Cette étude permet d’en apprendre davantage sur les modes de production des toxines de champignons. Ce qui présente d’autant plus d’intérêt que les intoxications dues à l’ingestion de champignons ne sont pas si rares. Entre 2010 et 2017, les centres antipoison en ont recensé environ 1 000 cas chaque année. Reste maintenant à découvrir qui est ce fameux ancêtre à l’origine de l’amanitine.

Charlotte Demarti

Source : Le Quotidien du Pharmacien