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Pastilles de réhydratation : un succès commercial, mais quel intérêt pour la santé ?

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Publié le 21/08/2025
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Crédit photo : GARO/PHANIE

Les produits de réhydratation font partie du top 5 des meilleures ventes de l’été en officine, selon les chiffres communiqués par le Gers Data au « Quotidien du pharmacien ». Accompagnées d’une publicité intense et galvanisées par les fortes chaleurs de l’été, les pastilles de réhydratation ont-elles cependant l’effet revendiqué ?

Elles avaient déjà connu le succès au cours de l’été 2024, dynamisées par l’effet JO, mais cette année, avec les épisodes de canicule qui se sont abattus sur la France entre mi-juin et mi-août, les pastilles de réhydratation (Hydratis, Waterdrop, Lxir…) ont explosé les scores de vente en pharmacie.

Sur les 12 dernières semaines (du 26 mai au 17 août), les produits de réhydratation ont généré 13,2 millions d’euros TTC de chiffre d’affaires uniquement sur les ventes conseil en officines, selon le Gers Data, soit 1,47 million de boîtes vendues et une croissance de 85 % par rapport à la même période en 2024. Tout confondu (conseil + prescriptions), le marché représente un CA de 14,3 millions d’euros, soit 1,64 million de boîtes vendues (+ 72 %). La courbe des ventes fournie par le Gers data se superpose avec les vagues de chaleur de l’été, avec un pic (1,88 million d’euros de CA) la semaine du 30 juin.

Un effet marketing ?

Un succès commercial pour ces pastilles aux différents arômes, enrichies en minéraux, électrolytes et parfois en glucose et qui promettent « d’optimiser » l’hydratation en toute occasion : effort physique, fortes chaleurs, mal de tête, fatigue, gueule de bois, crampes et même pour « rester au top en altitude » ou encore pour ceux qui « n’aiment pas le goût de l’eau ». Elles revendiquent aussi des bienfaits sur l’environnement en réduisant la consommation de plastique des eaux en bouteille. Autant de vertus relayées par des « ambassadeurs », le plus souvent des sportifs, ou une « communauté », mais aussi par les officinaux. Il n’a fallu que quelques minutes sur les réseaux sociaux pour trouver des posts de pharmacies : « Accro aux sodas ? Et si on passait à mieux ? », promeut une pharmacie alsacienne sur son compte Instagram. Ou encore : « Les fortes chaleurs sont là ! Joignez l’utile à l’agréable avec Hydratis », vante une autre pharmacie des Pays de la Loire.

Pour autant, ces pastilles ont-elles un intérêt pour la santé ? Non, selon plusieurs spécialistes qui se sont exprimés auprès de l’AFP. Arnaud Cocaul, médecin nutritionniste, affirme que ce n’est « que du marketing pur et simple » et un « mauvais signal de santé publique ». « En prenant l'habitude d'ajouter des arômes, les gens ne savent plus boire de l'eau, et ça, c'est un problème », poursuit-il. Pour la diététicienne Violette Babocsay, ajouter du sucre et du sel dans de l'eau « alors que les gens en consomment déjà trop, ça n'a aucun sens », indique-t-elle. De plus, prétendre optimiser l’hydratation brouille le message, selon Basile Chaix, directeur de recherche à l'Inserm. « Les gens peuvent penser qu'un verre d'eau avec une pastille est plus efficace et donc moins faire attention à s'hydrater », complète-t-il. Selon ces professionnels de santé, pour s’hydrater ou se réhydrater, le grand public peut se satisfaire d’un verre d’eau.

Et dans les cas particuliers ? En cas d’effort ou de chaleur, lorsque ces pastilles prétendent compenser les pertes électrolytiques, « cela peut être utile pour les marathoniens qui courent pendant 4 heures et qui ne peuvent pas manger, mais une personne normale récupère les électrolytes dans son alimentation », démontre encore Violette Babocsay. Ces pastilles de réhydratation pourraient-elles cependant être utiles pour certains profils de patients ? C’est ce que veut faire savoir le leader des ventes en pharmacie Hydratis, qui se défend en assurant que ses pastilles « reposent sur des principes physiologiques approuvés », avec un mécanisme « similaire » à celui des solutions de réhydratation orale. Le fabricant revendique aussi sur son site, avec Hydratis 50 +, être la « première solution de réhydratation adaptée aux personnes de 50 à 99 ans ».

Agir en cas de déshydratation

Pour rappel, les besoins quotidiens en eau sont de 1,5 à 2 litres (30 ml/kg). L’eau est également apportée par l’alimentation, y compris les fruits, les légumes ou la viande.

Lorsque la déshydratation s’installe chez un adulte ou un enfant, les signes sont la soif, des lèvres sèches, un moindre besoin d’uriner, une perte de poids (inférieure à 5 % du poids du corps), une fatigue anormale, des vertiges ou des étourdissements et une perte de force. L’eau sucrée et les bouillons salés peuvent réhydrater, selon les recommandations des autorités de santé. Une déshydratation grave (perte de poids de plus de 5 % ; soif intense avec une bouche et une langue sèches ; un regard terne et des yeux enfoncés ; peau sèche, froide et pâle avec l'apparition d'un pli cutané ; fièvre ; urines en faible quantité, foncées et à l'odeur forte ; maux de tête ; désorientation, vertiges, voire troubles de la conscience ; modification du comportement) est une urgence médicale.

Des solutés de réhydratation orale (SRO) sont inscrits sur la LPP (liste des produits et prestations remboursables). Seuls sont pris en charge les SRO ne contenant que des glucides (à l'exclusion du lactose), des électrolytes (sodium, potassium, chlore) et des agents alcalinisants (citrates ou bicarbonates), selon des doses bien définies. Ils ne sont pris en charge que pour les enfants de moins de 5 ans atteints de diarrhées aiguës.


Source : lequotidiendupharmacien.fr