L’Autorité de la concurrence a infligé à Doctolib une amende de 4,6 millions d’euros pour avoir abusé de sa position dominante sur les marchés de la prise de rendez-vous médicaux en ligne et de la téléconsultation. L’entreprise aurait verrouillé le marché en imposant des clauses d’exclusivité à ses abonnés et en rachetant en 2018 son concurrent principal, MonDocteur. Doctolib fera appel de la décision.
Doctolib devra verser au Trésor public un peu plus de 4,6 millions d’euros pour avoir abusé de sa position dominante sur deux marchés : celui de la prise de rendez-vous en ligne (service Doctolib Patient) et celui de la téléconsultation (service Doctolib Téléconsultation). Suivant une plainte déposée en 2019 par Cegedim santé (fournisseur des services Maiia agenda et Maiia téléconsultation), et des saisies menées en 2021 dans les locaux de Doctolib, l’Autorité de la concurrence estime que, sur ces deux marchés, la start-up a fait disparaître la concurrence par des pratiques abusives. Ce positionnement lui a permis de devenir ce qu’elle représente aujourd’hui : 80 millions d’utilisateurs en Europe, 50 millions en France dont 400 000 professionnels de santé, et un chiffre d’affaires de 438 millions d’euros.
Sur le marché des rendez-vous médicaux en ligne, Doctolib était en position dominante dès 2017, renforcée par la gestion des rendez-vous de la campagne de vaccination contre le Covid-19. « Que ce soit ses parts de marché, son nombre de clients ou ses chiffres d’affaires, ils sont supérieurs à ceux des concurrents de 50 % en 2017 à 90 % ou plus en 2022 », a souligné la vice-présidente, Fabienne Siredey-Garnier. De même pour le marché de la téléconsultation, Doctolib Consultation s’est trouvé, dès le lancement en 2019, en position dominante avec des chiffres supérieurs de 40 % à ceux des concurrents. « La position dominante n’est pas interdite en soi, c’est la responsabilité de l’entreprise de ne pas en abuser », a rappelé le président de l’Autorité de la concurrence, Benoît Coeuré. Mais Doctolib a mis en œuvre des stratégies anticoncurrentielles : obligation pour les médecins souhaitant utiliser le service de téléconsultation de s’abonner au service de prise de rendez-vous, interdiction de recourir à des services concurrents entre 2017 et 2023. Enfin, acquisition de MonDocteur entraînant la bascule de 92 % de ses praticiens vers Doctolib (soit 100 000 professionnels de santé), une opération qualifiée de « prédatrice ».
La sanction de 4,6 millions d’euros imposée à la société inclut une première : une amende forfaitaire de 50 000 euros pour avoir procédé à cette « acquisition prédatrice » sur le fondement de l’arrêt Towercast.
Doctolib a immédiatement annoncé, au matin du 6 octobre, faire appel de la décision, néanmoins celui-ci n’est pas suspensif. L’entreprise devra s’acquitter de l’amende. « Le montant a été provisionné et il ne sera en aucun cas répercuté sur les abonnements ou le service quotidien » des personnels de santé, assure un porte-parole de la société. L’ancienne start-up conteste la décision sur le fond en se plaçant sur un autre marché que les deux retenus par l’Autorité de la concurrence. « Notre marché est celui des logiciels pour les soignants », commente le porte-parole. Sur ce marché, Doctolib « n’est en aucun cas en position dominante face à ses principaux concurrents européens, dont Cegedim, et n’équipe que 30 % des soignants français (10 % en 2019 au moment du dépôt de la plainte) ». Quant à l’acquisition de MonDocteur en 2018, qui n’équipait que 2 % des personnels de santé au moment du rachat, « c’est une décision d’une banalité absolue dans la vie d’une start-up ».
L’examen de l’appel ne devrait pas avoir lieu avant 2027, voire 2030 si l’entreprise se pourvoit en cassation. Si la décision de l’Autorité de la concurrence n’était pas validée, « le Trésor public rembourserait l’amende avec ses intérêts » à Doctolib.
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