Les MDD, ou marques de distributeurs, semblent avoir trouvé leur place dans les rayons… Et dans le cœur des consommateurs. C’est en tout cas ce que suggèrent les chiffres de la catégorie en grandes et moyennes surfaces. Ainsi les MDD occuperaient plus du tiers (près de 33 % en 2020) du chiffre d’affaires en grande distribution, suivant en outre une tendance dynamique. Le secret de leur succès ? Un prix attractif, une certaine qualité des produits et un habillage de plus en plus élaboré. Un peu plus récent à l’officine, le concept n’en est pas moins effectif et de nombreux groupements ont encouragé le développement de gammes, notamment cosmétiques, conçues spécifiquement pour leurs réseaux d’adhérents. Ces produits misent principalement sur les mêmes arguments que ceux avancés par les MDD du circuit GMS : le prix et la qualité.
Une cinquantaine de produits cosmétiques disponibles sous quatre gammes (soins visage et corps Xermatis Bio, soins pour bébés Baby Look Bio, crèmes mains et sticks lèvres Yzoar Bio, savons de Marseille liquides Améos) sont dispensés par les officines Évolupharm. « L’idée est d’offrir aux pharmaciens une alternative de qualité aux marques cosmétiques leaders grâce à des produits de forte rotation comme les formules de soin cutané et d’hygiène qui génèrent de gros volumes de vente », explique Virginie Tisserand, directrice de la centrale produits Évolupharm. Une offre permettant de dégager une marge confortable – environ 50 % - pour l’officine et présentée à prix attractif – en moyenne 25 % moins cher qu’une marque historique – aux consommateurs. « Il est très important que les ménages, dont le pouvoir d’achat est aujourd’hui restreint, puissent trouver des soins de qualité accessibles en termes de coût. » D’autres critères sont mis en avant par le groupement, la filière de production, l’origine des ingrédients entrant également en lice. « Nos formules sont composées d’ingrédients d’origine naturelle, elles sont certifiées Cosmos Organic par Ecocert, fabriquées en France et issues d’une chaîne de production engagée dans le développement durable. Elles bénéficient aussi d’une bonne notation sur les applications comme Yuka et QuelCosmetic/QuelProduit de l’UFC-Que Choisir. »
Marqueurs de l’enseigne
Le réseau Pharmactiv, pour sa part, vient de lancer une courte ligne de soins d’hygiène pour hommes en son nom, qui s’ajoute aux trois gammes développées par les enseignes Pharmactiv et PHR du groupe OCP. Concurrencer la GMS en proposant une alternative en termes de qualité et de prix est un des objectifs que partagent les offres Dermasoin (derrmo-cosmétique technique), Solero (protection solaire) et Pharmactiv Bio (soin et hygiène cutanés, bébé) qui comptent une soixantaine de références. Pour chacune d’elles, une stratégie « consommateurs » est définie : viser la clientèle des circuits concurrents grâce à des prix publics conseillés à moins de 20 euros (pour concurrencer la GMS) et plus bas de 30 % comparés aux marques nationales en pharmacie pour Dermasoin ; offrir à toute la famille une protection optimale à moins de 10 euros et concurrencer des marques nationales pour Solero ; surfer sur l‘évolution moyenne de 22 % du chiffre d’affaires du segment bio en GMS en s’alignant sur les prix de vente du circuit pour Pharmactiv Bio… Le tout en assurant un coefficient de marge moyen multiplié par deux aux officines du groupe. « Ces marques sont également des marqueurs de l’enseigne qui agissent comme un élément de fidélisation de la clientèle, ajoute Charlotte Gasné, directrice marketing au sein du groupe McKesson. Leur implantation dans les pharmacies de nos réseaux est encadrée par de la formation et des outils de PLV. »
Plus récent sur le marché de la cosmétique MDD, Giropharm a présenté sa marque il y a moins d’un an. Sous le nom de La Gamme, elle signe une dizaine de cosmétiques dédiés au soin et à l’hygiène du visage et du corps qui, eux non plus, n’avancent pas que le prix comme argument. « On s’est aperçu que les pharmaciens n’avaient pas assez de produits à petits prix à proposer, précise Anne-Hélène Manchette, responsable de la gamme chez Giropharm. Il fallait aussi que nous puissions répondre aux besoins d’une clientèle qui ne s’adresse habituellement pas à l’officine mais plutôt au circuit GMS pour ses soins cosmétiques. » Outre un positionnement attractif sur les prix et une marge intéressante, La Gamme mise sur la naturalité de ses formules et une filière française de fabrication. 75 % des officines du réseau ont à ce jour décidé de référencer l’offre cosmétique signée Giropharm, « et ils en sont satisfaits », poursuit Anne-Hélène Manchette. « En juillet dernier, nous avons organisé une opération promotionnelle sur un shampoing douche, « Le tube de l’été », qui a réalisé des ventes aussi élevées qu’une marque d’envergure nationale. » Un succès qui a conforté le lancement de 8 nouvelles références dans la gamme en 2023.
La marque Santalis Mes Essentiels Bio du groupement Santalis n’est pas moins performante selon sa responsable marketing, Oana Catalin Crepin. Amorcée en juillet 2021 à l’aide de quelques basiques de l’hygiène et du soin cutané, elle a accueilli depuis 13 nouvelles références et une gamme Bébé, une offre que compléteront l’an prochain des dispositifs médicaux et des compléments alimentaires. « Le positionnement des prix, réduit de 20 % par rapport aux marques des laboratoires, n’est pas l’axe de communication principal pour notre gamme, qui met plutôt en avant la qualité des formules – naturelles, certifiées bios, made in France – et les valeurs de l’officine », souligne Oana Catalin Crepin.
Du sur-mesure
L’officine peut cependant aller plus loin dans sa démarche identitaire et référencer non pas la marque d’un groupement mais sa propre gamme. C’est le principe de la marque blanche, ou marque aux couleurs de l’officine, que proposent certains fabricants comme Unifarco par le biais de son projet Pharmaciens Préparateurs. L’entreprise propose ainsi aux officines indépendantes de développer, en leur nom et selon leurs propres critères, toute une gamme de produits dermocosmétiques. Soins pour peaux sensibles, formules anti-âge, nettoyants visage, produits de soin et d’hygiène corporelle, soins capillaires, protection solaire, ligne pour hommes, pour bébés sont élaborés pour une officine particulière et portent son identité visuelle. La promesse d’Unifarco est simple mais singulière : offrir un produit unique dans sa zone de chalandise. La flexibilité des commandes, l’accompagnement marketing et l’expertise pharmaceutique sont d’autres arguments avancés par le fabricant, qui annonce avoir développé pour l’Europe plus de 16 millions de produits en partenariat avec les pharmaciens en 2021.
Cette logique du sur-mesure peut être déclinée à un autre échelon, celui de la clientèle. Dans ce contexte, la marque s’efface au profit d’une formule cosmétique répondant aux besoins spécifiques d’une personne. C’est le concept développé par la start-up Abbi, filiale de Boiron, qui propose de réaliser, grâce à un miroir connecté et au module d’intelligence artificielle Skan My Skin, un diagnostic de peau permettant d’obtenir des soins sur-mesure. Une fois son profil cutané défini, il n’y a plus qu’à élaborer la formule qui répondra aux besoins d’un seul visage. L’officine reste un lieu central – en plus du site abbi.care - pour effectuer son diagnostic de peau et obtenir ses produits. « 400 pharmacies sont, à ce jour, équipées de cette technologie, indique Joanna Ifergan, fondatrice de la start-up. Le conseil officinal joue un grand rôle dans le développement de notre concept car la clientèle a souvent besoin d’être encadrée dans sa démarche. » L’outil diagnostic peut également constituer, pour le circuit, un moyen de se différencier en dépassant les frontières de la marque.