Des pharmaciens syriens en Allemagne

À Hanovre, l’Ordre se mobilise pour l’intégration des pharmaciens réfugiés

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Publié le 19/01/2017
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Parmi les centaines de milliers de réfugiés qui se sont installés en Allemagne ces dernières années, quelques centaines de pharmaciens, en particulier syriens, ont eux aussi tenté de refaire leur vie dans ce pays. Leurs chances d’intégration y sont plutôt bonnes, mais les procédures sont souvent longues et complexes, notamment en raison de la difficulté de la langue pour les étrangers… et de la complexité de l’administration et du système de santé allemands.
Syriens en Allemagne

Syriens en Allemagne
Crédit photo : dr

Pharmaciens syriens en Allemagne

Pharmaciens syriens en Allemagne
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Plutôt bien accueillis par les pharmaciens allemands qui voient en eux une réponse à la crise démographique, les pharmaciens réfugiés doivent s’enregistrer auprès de l’Ordre régional du Land où ils résident. L’Ordre de Basse-Saxe, vaste région regroupant le quart Nord-Ouest de l’Allemagne, a choisi de gérer lui-même l’ensemble des procédures d’intégration des pharmaciens étrangers, alors que celles-ci, dans toutes les autres régions, dépendent de plusieurs administrations différentes.

Occupant un pittoresque immeuble ancien d’un quartier résidentiel de Hanovre, l’Ordre de Basse-Saxe y dispose d’une spécialiste qui, depuis 2015, a vu arriver plus d’une trentaine de pharmaciens syriens. Cette dernière, Katharina Hafner, consacre désormais une large part de son temps à accueillir puis orienter les pharmaciens désireux de travailler dans la région : en effet, une fois qu’ils ont fait la preuve de leur diplôme, ce qui est en général relativement simple, les pharmaciens réfugiés peuvent faire une demande d’exercice provisoire… mais qui ne sera valable, pendant deux ans, que dans le Land où elle a été déposée. « Je m’assure d’abord que ces pharmaciens veulent rester en Basse-Saxe, car je ne pourrai leur donner qu’une autorisation régionale… qui perdra toute validité s’ils partent ensuite à Berlin ou à Cologne », explique-t-elle. Mais cette autorisation provisoire implique de réussir une épreuve autrement difficile, l’examen de langue. Beaucoup de réfugiés passent une ou plusieurs années à apprendre l’allemand, dans des écoles subventionnées par les régions. Ils n’ont pas le droit de travailler pendant ce temps, mais peuvent aller dans les pharmacies en tant qu’ « hospitants », c’est-à-dire comme observateurs, sans la moindre activité pharmaceutique, technique ou de délivrance…

Une chance inespérée

Ce n’est que lorsqu’ils ont atteint un niveau suffisant qu’ils peuvent demander une autorisation régionale provisoire, qui leur sera décernée à l’issue d’un test de connaissances pratiqué par l’Ordre. Ensuite, les pharmaciens ont deux ans pour préparer l’Approbation, qui leur donnera le droit d’exercer entièrement et totalement la pharmacie, comme n’importe quel diplômé. Pendant ces deux ans, il leur est vivement conseillé de se trouver une place de stage, toutefois non obligatoire. Les pharmaciens en stage pourront alors travailler, sous la surveillance de titulaires, comme le ferait un étudiant en fin d’études. À l’issue des deux ans d’autorisation provisoire, les pharmaciens peuvent tenter l’Approbation : celle-ci, très complète, inclut des questions scientifiques, pharmaceutiques et juridiques, ces dernières étant souvent, pour les étrangers, bien plus difficiles que les épreuves pharmaceutiques proprement dites. L’Approbation est décernée par un jury de trois pharmaciens, constitué d’un universitaire, d’un officinal et d’un représentant ordinal. Ensuite, ils auront les mêmes droits et devoirs que n’importe quel pharmacien travaillant en Allemagne.

Pharmacien à Goslar et membre du bureau de l’Ordre régional, Jens Kloppenburg soutient personnellement plusieurs pharmaciens syriens et les assiste dans leur progrès. « Notre région souffre d’une pénurie de jeunes pharmaciens, et ces professionnels qui arrivent chez nous sont une chance inespérée », explique-t-il. Il a récemment pris un pharmacien syrien en stage pendant 18 mois, et l’a accompagné pour améliorer sa formation linguistique, mais aussi scientifique et professionnelle. À l’issue de son Approbation, prévue très prochainement, le pharmacien syrien continuera à travailler dans la même pharmacie : « Nous sommes heureux qu’il ait trouvé chez nous sa nouvelle patrie, et j’espère qu’il restera longtemps fidèle à sa pharmacie d’adoption », conclut M. Kloppenburg.

Denis Durand de Bousingen

Source : Le Quotidien du Pharmacien: 3318