Le Quotidien du Pharmacien. – Comment cerner un problème de brûlures d’estomac au comptoir ?
Véronique Sonnois. – Pour évoquer ces manifestations, les patients parlent souvent d’aigreurs d’estomac ou tout simplement de brûlures d’estomac. Ces déclarations appellent à bien identifier le problème en amenant la personne à décrire ses symptômes et leur fréquence. Si les brûlures sont régulièrement ressenties depuis quelques semaines, par exemple, il faut inciter le patient à aller consulter. D’autres signes d’alerte comme la persistance des symptômes malgré la prise d’antiacide ou leur reprise dès l’arrêt du traitement, une toux persistante et bien sûr la présence de sang dans le reflux sont des motifs de consultation.
Dans tous les cas, interrogez la personne pour savoir si elle suit un traitement habituel, ce qui pourra orienter le conseil par la suite. Si les symptômes sont apparus depuis quelques jours, on peut affiner le questionnement pour savoir ce qu’a mangé le patient récemment ou s’il est particulièrement stressé en ce moment, deux facteurs en cause dans les brûlures d’estomac.
Comment orienter son conseil ?
On peut tout d’abord rappeler les indispensables mesures hygiéno-diététiques à suivre : éviter les repas abondants, riches en graisse ; limiter la prise de café, thé, alcool, boissons gazeuses, jus de tomates ou d’agrumes, vinaigrette et tout ce qui est acide… Le tabac, parce que la nicotine augmente l’acidité gastrique, doit également être réduit ou proscrit et la prise d’AINS, en particulier l’ibuprofène en automédication, est déconseillée à moins que le traitement ne soit prescrit.
Ensuite, on peut conseiller un médicament d’automédication afin de soulager les brûlures. Les antiacides d’action locale à base de sels d’aluminium, de magnésium ou de calcium calment rapidement les symptômes mais ont des effets de courte durée. En cas de remontées acides dans l’œsophage (souvent quand la personne s’allonge), on peut conseiller un antiacide antireflux à base d’alginate de sodium. Ce type de formule va créer un gel visqueux dans l’estomac qui empêche les remontées acides (décaler de 2 heures la prise d’un autre médicament sous peine d’inefficacité de ce dernier). Enfin, parmi les antisécrétoires, trois molécules IPP, inhibiteurs de la pompe à protons (oméprazole, ésoméprazole, pantoprazole) sont à disposition dans le champ du conseil. Elles agissent en réduisant la production d’acide dans l’estomac. On les proposera dans un second temps, après un antiacide local.
Quels sont les profils de patients pour lesquels ces traitements sont contre-indiqués ?
Sont contre-indiqués, les antiacides qui contiennent des sels d’aluminium chez les insuffisants rénaux et les dialysés, le saccharose chez les diabétiques et l’aspartame en cas de phénylcétonurie. Les personnes qui suivent un régime sans sel éviteront les compositions à base d’alginate de sodium. Il faut également signaler que les IPP ont des interactions médicamenteuses avec certains antirétroviraux ainsi que le clopidogrel souvent prescrit par les cardiologues.