Impuissants, Karine et J-C voient Madame Mazarin s'étaler sur le sol en hurlant de douleur sous les coups incessants des grêlons.
Marion arrive près des titulaires avec des caisses de livraison du grossiste.
- Il faut qu'on sorte pour l'aider. On peut se protéger avec ces caisses. J'y vais…
Se servant de ce bouclier de fortune pour protéger sa tête, l'adjointe sort de la pharmacie et rejoint la cliente en pleurs. Elle est suivie de près par Karine et Théo munis du même équipement.
- Ne vous inquiétez pas Madame, nous allons vous protéger avec ces caisses, crie Marion.
- J'ai mal, j'ai mal. Et mon chien, allez voir mon chien…
Rapidement, les trois collègues forment une voûte de caisses au-dessus du corps de la cliente imprudente. Pour soutenir cette structure, ils appuient les briques improvisées sur des arceaux de lit placés les uns à côté des autres pour former un tunnel.
Dans la pharmacie, les autres clients observent les opérations de secours. La cliente de passage qui, dix minutes plus tôt, s'étonnait de devoir payer le médicament prescrit par le médecin (voir l'épisode précédent), ne bronche pas.
- Si vous avez besoin d'aide, je peux me rendre utile…
- Non merci, n'accumulons pas les catastrophes. Restez tranquille jusqu'à ce que l'orage soit passé, lui répond Damien, tout en faisant glisser une colonne de caisses du grossiste vers la porte d'entrée.
J-C est en ligne avec les secours :
- Je pense qu'elle s'est effectivement blessée. La cheville, le poignet ? Je ne sais pas. Vous arrivez quand ? Oui, j'imagine bien que vous êtes débordés. Dites-moi juste si nous pouvons la bouger pour la rentrer à l'intérieur ?
En aparté, il glisse à Gisèle :
- Manquerait plus qu'elle nous fasse un procès si en la déplaçant, on aggrave une fracture ou une lésion. Elle est tellement… Oui, oui, je vous écoute. D'accord. Couverture de survie et protection de son environnement proche. Mais on ne mobilise pas la patiente. J'ai compris.
Sur le parking, la grêle a laissé place à une pluie abondante. Marion s'éloigne de ses collègues pour vérifier l'état de la voiture de Madame Mazarin. Attirée par des aboiements, elle s'approche d'une berline noire. Le pare-brise est fissuré de haut en bas mais il n'a pas cédé. À côté, le toit ouvrant éventré, une autre voiture est inondée de grêlons et d'eau.
- Le chien va bien. C'est toujours ça. Toi, tu restes dans la voiture. Je n'ai pas envie de te courir après…
Accroupie près de Madame Mazarin, Karine replace la couverture de survie correctement :
- Nous en reparlerons plus tard, Madame ; ce n'est ni le moment ni l'endroit, répond sèchement la titulaire.
- Mais tout de même. Je ne serais pas tombée si votre parking était aux normes. Ouille, ça fait mal. J'ai mal à la cheville. Donnez-moi un antalgique au moins.
Voyant J-C arriver avec un parapluie, Karine se redresse sans répondre à Véronique Mazarin :
- Elle est blessée, elle se met dans cette situation toute seule, et maintenant elle nous accuse d'être responsables de son accident. Elle est incroyable, gronde la pharmacienne, excédée.
- Madame Mazarin, votre chien va bien. Il est à l'abri dans la voiture, ne vous inquiétez pas pour lui, dit Marion pour calmer la cliente.
(À suivre…)