Les premiers signaux perçus en 2009 ont conduit les autorités françaises à surveiller ce dérivé antiandrogénique de la progestérone (et ses génériques), utilisé (depuis les années 1980) dans l'hirsutisme chez la femme, et dans certaines formes de cancer de la prostate chez l'homme. Moins de 10 ans plus tard, en 2018, l'assurance-maladie quantifie le risque de méningiome : il est multiplié par 7 pour les femmes traitées par de fortes doses (≥ 5 mg/jour) sur une longue période (plus de 6 mois), et par 20 après 5 années de traitement.
Dès les premiers résultats à l'été 2018, l'ANSM met en place une batterie de mesures pour réduire le risque de méningiome associé à l'acétate de cyprotérone : rappel des indications autorisées (traiter le moins longtemps possible à la dose la plus faible, pas de hors AMM), surveillance par imagerie cérébrale avant et tout au long du traitement et mise en place d’une « attestation annuelle d’information », à cosigner chaque année par le médecin prescripteur et la personne traitée, indispensable pour la délivrance en pharmacie. Ces deux dernières mesures sont propres à la France, tandis que l'Europe (via l'Agence européenne des médicaments) restreint l'indication de l'Androcur à l'hirsutisme sévère. En juin et juillet 2019, la Caisse nationale d'assurance-maladie (CNAM) envoie des courriers ciblés et nominatifs aux 39 000 médecins libéraux qui ont prescrit au moins une fois de l'Androcur, aux directeurs d'établissements, et aux 72 000 patients majeurs et 2 500 mineurs concernés.
Baisse globale de 85 % du nombre de personnes sous Androcur
« Nos actions ont eu un impact considérable avec une baisse globale de l'utilisation de l'acétate de cyprotérone de 85 % en moyenne entre 2018 et 2021 », se félicite le Dr Alain Weill, au regard de l'étude du GIS EPI-Phare (dont il est directeur adjoint) rendue publique le 1er décembre, conduite à partir des données du Système national des données de santé (SNDS) sur la période 2010-2021. Fin 2021, le nombre de personnes traitées par acétate de cyprotérone à forte dose a considérablement diminué par rapport à août 2018, avec une baisse plus marquée pour les femmes (-88 %, de 47 000 à 5 500) que pour les hommes (-69 %, de 33 000 à 2 500). Au total, en décembre 2021, 7 900 personnes utilisaient l’acétate de cyprotérone à forte dose contre 85 000 en janvier 2010 et 55 000 en août 2018. Cette baisse est liée aux arrêts de traitement (92 % des personnes traitées en juin 2018 avaient arrêté leur traitement en 2021) et à la diminution des initiations de traitement (- 94 %). L'étude met aussi en lumière la nette diminution (-93 %) des méningiomes liés à l'acétate de cyprotérone.
Enfin, 35 % des personnes se sont tournées vers des œstrogènes et progestatifs classiques, et seulement 5 % vers l'acétate de nomégestrol (Lutényl, pour 3,9 %) et l'acétate de chlormadinone (Lutéran, 2,1 %), et 5,3 % des femmes et transgenres vers la spironolactone. Des études sont en cours pour surveiller le risque de méningiome lié au Lutényl (multiplié par 3 au-delà de 6 mois, et par 12,5 pour 5 ans) et au Lutéran (multiplié par 3,4 au-delà de 6 mois et par 7 pour 3,5 ans), qui concerne 450 000 femmes.