- Alors, cette formation sur la vaccination, c'était comment ?, demande Christèle.
Depuis une heure, la préparatrice est plongée dans la facturation des dossiers de location. Marion lui répond, très enthousiaste :
- C'était très bien. J'y allais un peu à reculons. Tu sais, je travaillais dans un labo spécialisé dans les vaccins avant d'être à l'officine. Je croyais tout savoir sur le sujet, et c'est loin d'être le cas.
Les deux collègues sont interrompues par les ronchonnements de Nicole.
- Je ne comprends pas. J'ai refait le linéaire Pierre de Posé, et il faut que je le remplisse à nouveau.
- Tu l'avais si bien présenté que les clients ont acheté les produits, c'est tout, remarque Christèle.
- C'était hier en fin de journée. Et ce matin, à part des vaccinations, c'est plutôt calme. Non, moi je pense vraiment qu'on nous a volé des produits… entre hier soir et ce matin.
Les autres la regardent, dont Gisèle qui a rejoint le groupe. Cette dernière prend la parole :
- À l'accueil, j'observe tout. Et, sans vouloir dénoncer qui que ce soit, j'ai vu Maëlys près de ce rayon. D'ailleurs, je la vois rôder régulièrement dans les rayons bien-être.
- En même temps, c'est son travail. On lui a demandé de remplir les linéaires régulièrement, rétorque Marion.
- Sauf qu'elle ne le fait pas. Vous ne voyez jamais rien, vous les pharmaciens. Regarde celui-là !, s'exclame Nicole en pointant du doigt le rayon enfant mal ordonné.
- En clair, vous pensez que Maëlys vole, finit par dire Christèle. J'avoue que plus j'observe cette fille, plus je trouve qu'elle a des comportements bizarres. Ça a commencé avec les peluches qui se sont volatilisées dans le rayon des compléments alimentaires pour enfants (cf. épisode 202) …
- Déjà qu'elle n'a pas fait Saint-Cyr, si en plus elle est voleuse… Tu parles d'une recrue, lâche Nicole.
- On devrait peut-être en parler avec Emmanuel ? Il a Maëlys en cours, au CFA. Il la connaît dans un autre contexte, suggère Marion.
- On parle de moi ?, demande le préparateur alors qu'il vient chercher un paquet d'alèses et un paquet de couches.
- Emmanuel, nous avons de gros doutes sur Maëlys.
- Quel genre de doutes ?
- Genre capacités intellectuelles déjà, et genre voleuse aussi.
- Oh la ! Ce ne sont pas des doutes, mais des accusations. Sur le premier point, j'admets que Maëlys n'est pas une lumière. En cours, elle est à la traîne. Mais on en a vu d'autres réussir leur BP, alors qu'on aurait jamais parié sur elles. Pour le reste, c'est grave. Il faut des preuves pour accuser quelqu'un de vol.
- C'est simple, je vais aller au vestiaire regarder dans son casier, s'agace Nicole.
- Non, tu n'as pas le droit. Vous en avez parlé à J-C ou à Karine ?
- Non, pas encore. C'est même la première fois qu'on en parle entre nous, répond Gisèle. Mais on s'est toutes rendu compte de choses louches ces derniers temps, depuis son arrivée.
Emmanuel soupire. En tant que représentant syndical, il veut respecter point par point le droit du travail. Il se cache bien de révéler à ses collègues ses propres doutes sur l'honnêteté de l'apprentie.
(À suivre…)