Cette troisième version sera-t-elle la bonne ? Après la V1 en 2016, puis la V2 en 2018, voici un nouveau projet du code de déontologie des pharmaciens, adopté par l'Ordre le 4 octobre, qui a été adressé à Olivier Véran, ministre de la Santé. Ce nouveau texte prend en compte les adaptations du métier de pharmacien aux nouvelles missions et intègre également les conditions d'utilisation par les pharmaciens des nouveaux outils et services numériques, notamment dans leur participation aux structures de coopération, tel que l'exercice coordonné.
Mais c’est essentiellement sur le volet « communication et publicité » que l’Ordre était attendu. Car jugée trop frileuse par la Direction générale de l’offre de soins (DGOS) notamment sur ces thématiques, la mouture précédente avait été retoquée. Pour autant, la copie revue et corrigée par l’Ordre ne semble toujours pas adaptée aux besoins des pharmaciens soucieux de communiquer sur leurs missions et leurs services. Pire même, les officinaux déplorent un statu quo tant ce nouveau texte est peu explicite sur les moyens qui leur sont donnés. Et ce en dépit de l’art. R.4235-45 qui prévoit « (..) le pharmacien peut, par tout support, communiquer des informations sur son officine, sa compétence (…) sur la gamme et la qualité des prestations qu’il délivre (…) ». Pour ceux qui ont eu lecture du texte, le flou demeure alors que des avancées déterminantes sont nécessaires. Ceci d’autant plus que, comme le rappelle Alain Grollaud, président de la chambre syndicale des groupements et enseignes, Federgy, « notre métier change et il est appelé à l’avenir à être de plus en plus centré sur les services ».
Épée de Damoclès
De son côté, Laurent Filoche, président de l’Union des groupements de pharmaciens d’officine (UDGPO), regrette que ce projet ne tienne aucunement compte de l’environnement concurrentiel dans lequel évoluent les officinaux. Car, dénonce-t-il, au-delà des acteurs étrangers, ce sont aujourd'hui des start-up qui utilisent les brèches et communiquent dans des conditions refusées aux pharmaciens. Le président de l’UDGPO ne mâche pas ses mots : « Au lieu de prendre de l’avance et de préparer la profession à la concurrence qui arrive, on ne nous donne pas les moyens pour nous défendre, cela est préjudiciable au réseau. »
Autre déception, le flou qui entoure les règles propres à la publicité et tout particulièrement l’art. R.4235-49. Celui-ci énonce que « la publicité (…) s’effectue avec tact et mesure dans le respect de la santé publique et des principes déontologiques et professionnels ». Selon Laurent Filoche, cette mention du « tact et mesure » agit comme une épée de Damoclès, les pharmaciens n’étant pas fixés sur le cadre réel qui leur est assigné en matière de publicité.
Constater que la lassitude gagne les pharmaciens est peu dire. La profession, qui a attendu trois ans la parution de ce nouveau projet, sait qu’il lui faudra encore patienter au moins un an pour qu’il soit entériné, comme le craint Alain Grollaud. À condition cependant que, dans ce contexte de crise sanitaire, la DGOS puisse se pencher sur ce texte et le valide. Ce qui est loin d’être gagné. Car, rappellent les services du ministère interrogés par « Le Quotidien du pharmacien », le gouvernement français doit également tenir compte dans sa décision des pressions de l’Union européenne, bien décidée, elle, à libérer les règles de communication.