Longtemps au cœur du métier de pharmacien, la préparation magistrale (PM) a été reléguée au second plan avec l'industrialisation du médicament. Cependant, elle reste essentielle pour répondre aux besoins spécifiques des patients : pénuries, allergies, formes adaptées en pédiatrie, aux personnes âgées ou aux soins palliatifs, ainsi que formulations dermatologiques et cosmétiques sur mesure.
L'essor de la production de masse au XXe siècle a amélioré l'accessibilité aux traitements standards mais restreint l'usage des PM. Des réglementations strictes, des coûts élevés et la baisse de la formation en pharmacie d'officine ont accéléré leur déclin. Pourtant, la réhabilitation de la PM ne peut être envisagée de manière restrictive. Elle doit couvrir toutes les formes galéniques afin d'offrir des solutions adaptées à chaque patient. Les formes orales ajustées aux besoins individuels, qu'il s'agisse de dosages spécifiques, de l'absence d'excipients à risque ou d'une adaptation aux troubles de la déglutition. Les formes nasales, rectales et vaginales permettent une administration ciblée selon les besoins thérapeutiques. Enfin, les formes topiques à visée dermatologique et cosmétique offrent des formulations personnalisées adaptées aux pathologies cutanées ou aux demandes cosmétiques spécifiques.
Pistes pour une réintégration efficace en officine
Un cadre réglementaire plus souple, sans compromettre la qualité, faciliterait la mise en œuvre des PM. L'harmonisation des bonnes pratiques (BPP) et un cadre clair pour la production locale en cas de pénuries sont essentiels. Investir dans des équipements adaptés (mélangeurs, balances connectées, logiciels de suivi…) optimiserait cette activité. Mutualiser la production avec des laboratoires spécialisés renforcerait l'efficacité.
L'enseignement des PM doit être renforcé. Des formations continues et certifications permettront aux pharmaciens d'affiner leur expertise.
Un ajustement tarifaire est nécessaire pour assurer la viabilité économique de cette activité. Une meilleure communication auprès des prescripteurs favorisera l'intégration des PM dans le parcours de soins.
Privilégier des fournisseurs locaux réduirait la dépendance aux importations et stabiliserait l'approvisionnement. Des partenariats avec des laboratoires spécialisés garantiraient la qualité des substances actives et excipients. Un réseau de pharmacies spécialisées assurerait un accès homogène aux traitements personnalisés.
La nécessaire réhabilitation de la PM nécessite une approche globale : allègement réglementaire, formation, modernisation, valorisation économique et optimisation des circuits d'approvisionnement.
Il est également essentiel de repenser et rétablir les préparations « maison », autrefois élaborées au sein des officines. Ces formulations, issues d'un savoir-faire spécifique, répondaient aux besoins récurrents des patients tout en renforçant la relation de confiance avec eux.
En modernisant cette pratique, en formant les pharmaciens et en sécurisant la production, l'officine peut retrouver un rôle central dans l'accès aux traitements personnalisés et renforcer la résilience du système de santé. Repenser la PM, c'est permettre au pharmacien d'exercer pleinement sa mission, dans l'intérêt du patient… et de la santé publique.