Le concept de responsabilité sociétale des entreprises (RSE) n'est pas récent. Créé en 2011 par la Commission Européenne, il implique, pour la structure qui décide de l'appliquer, d'adopter différents principes : être viable et rentable, d'une part, c’est-à-dire optimiser ses dépenses en économisant du temps et de l'énergie, en optant pour des équipements longue durée, en veillant au bien-être de l'équipe ; diminuer l'empreinte de l'homme sur l'environnement ; réduire l'impact sur la santé humaine en évitant de choisir des produits contenant des substances nocives ; faire des choix qui tiennent compte de la santé des individus. Autant d'objectifs qui, pour être atteints, nécessitent une certaine anticipation dès qu'un projet de transformation se décide à l'officine, qu'il s'agisse d'une rénovation du construit ou d'un simple rhabillage de l'espace intérieur.
« Chaque choix à faire lors d'un réagencement doit être envisagé sous un angle écoresponsable », explique un des agenceurs du secteur. L'ameublement est un poste important. S'il est renouvelé, le mobilier choisi doit pouvoir durer dans le temps donc faire preuve d'une certaine qualité. « Changer d'ameublement régulièrement va à l'encontre d'une démarche RSE. » Le mode de production et de fabrication des meubles est également concerné. « Nos usines sont équipées de panneaux photovoltaïques capables d'alimenter toute l'activité de menuiserie en électricité verte, ce qui permet une fabrication écoresponsable. »
Des choix durables
Les matériaux utilisés pour habiller l'espace peuvent aussi répondre à un engagement durable. « Pour chaque matériau, il existe une alternative écoresponsable : peinture ou papier peint sans composé organique volatil (COV), faux plafond en bois recyclé… », poursuit l'agenceur. L'éclairage, pour sa part, ne relève plus d'une démarche volontaire mais encadrée par les normes qui imposent aux commerces l'utilisation d'ampoules basse consommation. « Tout éclairage sur un lieu de vente doit viser à favoriser les économies d’énergie. »
Quant aux déchets que génère la vente de produits à l'officine, ils peuvent également relever d'une démarche RSE. Il suffit que l'officine s'équipe d'un bac de récupération des emballages au niveau du sas de sortie. Les étuis en carton qui renferment les produits délivrés au comptoir seront ainsi récupérés. « En matière de contenant, certaines pharmacies importantes mettent à disposition de la clientèle des petits paniers ou caddies en matériaux issus du recyclage (déchets de la mer par exemple). »
L'agenceur Splayce, pour sa part, a établi une longue liste d'actions à caractère durable et facile à mettre en place à l'officine. Il préconise notamment de créer un corner intérieur ou de s'équiper de mobilier sur-mesure afin d'encourager la collecte des médicaments usagés ou non. « Pour inciter au geste, un contenant éco-conçu (sac ou boîte réutilisable) précisant les consignes de tri peut être offert aux patients », précise Laureen Liagre, responsable RSE chez Splayce.
Lumière, sachets, présentoirs…
Par ailleurs, l'officine peut s'équiper d'éclairage intérieur/extérieur à détecteur de mouvements (pour le back-office) voire de programmateurs d'appareils (pour les ordinateurs) afin de limiter sa consommation d'énergie. « Une croix verte comportant un système d'horlogerie, évitant à l'enseigne d'éclairer en continu, viendra remplacer la croix existante, par exemple. » À la place des sachets distribués aux patients, des sacs réutilisables peuvent être proposés. Afin qu'ils servent le plus possible, un code-barres intégré au sac fait office de carte de fidélité aux yeux de la pharmacie qui récompense le visiteur en fonction du nombre des passages en caisse. « Dans l'objectif de réduire l'usage du papier, l'officine aura en outre l'occasion de revoir sa politique de communication envers la clientèle en développant les outils digitaux, écrans numériques, applications, réseaux sociaux, sites Web. » Dans l'espace de vente, au gré de son cheminement entre les linéaires, le public pourra, par ailleurs, remarquer les hauts de rayon en carton 100 % recyclable, en plexiglas issu de chutes de produits ou encore en PVC fabriqué à partir de restes de tuyauterie, qu'elle n'aura pas manqué d'installer…
5 postes à revoir
Pour Olivier Toma, responsable transformations durables au sein de l'agence de conseil Primum Non Nocere, l'officine a tout intérêt à rentrer dans une démarche RSE car opter pour la durabilité est un investissement qui rapporte : moins de consommation d'énergie, moins de déplacements, moins de mobilier à renouveler aboutissent forcément à faire des économies. Bien d'autres avantages résultent de cet engagement. « Les consommateurs, de plus en plus soucieux des impacts environnementaux, sont demandeurs de produits locaux ou issus de circuits courts (masques fabriqués en France, cosmétique locale…). » Toute action durable est, par ailleurs, un moyen de se différencier de la concurrence, d'améliorer son image de marque, d'impliquer ses salariés et d'augmenter son attractivité, spécialement aux yeux des jeunes pharmaciens qui arrivent sur le marché. « Une pharmacie engagée prendra des parts de marché. »
Pour répondre aux exigences d'une démarche RSE dans le cadre d'un éco-rénovation, l'officine devra revoir 5 postes d'équipement, selon Olivier Toma : « En investissant dans l'isolation et l'électricité verte, elle peut réduire de 40 % ses dépenses en énergie » ; l'officine doit opter pour des matériaux de décoration sains, sans COV, ce qui impliquera moins d'aération et de dépenses de santé ; elle doit promouvoir la qualité de vie dans ses murs en favorisant l'ergonomie du lieu de travail et d'accueil (18 % des arrêts de travail sont dus à des troubles musculosquelettiques dans le secteur de la santé) ; un local aménagé doit être prévu pour la collecte et le tri des déchets issus des MNU et périmés ; enfin, l'officine doit communiquer sur son engagement RSE et promouvoir les actions durables par tous les moyens, conseils sur l'importance du tri, distribution de fascicules sur les éco-attitudes, mesure de la qualité de l'air intérieur.