Ambiance sonore
Invisible et pourtant bien présent, le son fait désormais partie de l’expérience consumériste. Créateur d’ambiances, il pourra tour à tour, apaiser, émouvoir, exciter ou énerver la personne qui l’entend, saturer ses oreilles par son volume, sa répétition, ou même être perçu sans s’en apercevoir par trop de discrétion. Mais il sera toujours porteur d’un effet capable d’influencer peu ou prou l’humeur et donc le comportement d’un client dans un commerce. Une faculté qui n’a pas échappé au circuit pharmaceutique, lieu de conseil mais aussi de vente, dont certains espaces disposent aujourd’hui d’ambiances sonores. C’est le cas du réseau COS (Coopérative Objectif Santé) dont toutes les officines diffusent une bande-son. Pour Julian Benwaïche, directeur réseau, « le flux sonore fait partie des codes du commerce moderne, c’est un incontournable ! Il n’y a pas un circuit de distribution qui n’en soit pas équipé aujourd’hui ». Le proposer à ses sociétaires permettait aussi de répondre à la demande du réseau. « Nos 275 officines sont sonorisées. » Elles diffusent la radio COS, une programmation musicale propre au groupement, incluant des spots promotionnels liés aux mises en avant des produits, des annonces sur les services que propose l’officine et des campagnes d’information sur des thèmes de santé publique.
Le contenu sonore est dispensé durant toute la période d’ouverture de l’officine mais son contenu est adapté aux différentes plages horaires en fonction du flux de clientèle : aux heures creuses, la musique est plutôt dynamique mais elle devient plus calme au moment des pics d’affluence. Les extraits doivent cependant s’enchaîner sans répétition, de façon à pouvoir écouter une programmation variée. « Côté clientèle, les retours sont excellents concernant l’ambiance et les messages diffusés qui suscitent régulièrement des demandes de conseil et peuvent déclencher une vente associée. » C’est donc un sans-faute pour la solution sonore « clef en main », mise au point par un concepteur spécialisé et dont le coût est évalué à quelques dizaines d’euros par mois (en plus des droits d’auteur Sacem). « La diffusion d’une radio FM reste une autre possibilité de sonorisation mais le contenu ne sera ni personnalisé ni adapté au circuit officinal. »
Equipement clef en main
Autre avantage en faveur d’un flux sonore « personnalisé », il peut être conçu en cohérence avec les différents supports de communication du lieu, écrans digitaux, site Internet… Pharmedisound, diffuseur de contenus sonores spécifiques au circuit pharmaceutique, propose des solutions « clef en main » qui peuvent inclure l’équipement, enceintes ou tablettes connectées par WiFi. Le flux est largement dédié à la musique – play-list proposée par le diffuseur ou choisie par l’officine – mais intègre des messages de santé et des annonces promotionnelles liées à la mise en avant d’une marque ou en relais d’un partenariat avec un laboratoire. « Le circuit pharmaceutique est un écosystème de santé qui nécessite d’adapter le contenu sonore qui est diffusé dans ses murs », précise Sandrine Montoya, dirigeante de Pharmedisound. « Les messages de santé y sont particulièrement importants et de natures diverses, campagnes de santé publique (dépistage, vaccination, sevrage tabagique…), campagnes saisonnières (pathologies hivernales, saison des moustiques, allergies, protection solaire…), thématiques et services propres à l’officine. »
Ce qui ne doit pas minimiser l’importance de l’empreinte musicale dans les programmes dédiés au circuit. « Le flux musical reste majoritaire dans la journée. Pour une heure de musique diffusée, on compte 3 spots promotionnels et 1,30 minute de chronique santé. » Le tout va contribuer à créer une ambiance sonore importante pour le parcours du visiteur car elle va rendre son expérience sur place plus agréable. Ainsi, 8 clients sur 10 déclarent préférer un magasin doté d’un environnement musical (LSA Étude pour Sacem et Mood Media en 2017). « Les intentions de retour des primo-visiteurs atteignent quant à elles 72 %, contre 51 % lorsqu’aucune musique n’est diffusée », poursuit Sandrine Montoya. Côté employés, l’adhésion est encore plus forte puisque 96 % d’entre eux déclarent apprécier une ambiance musicale sur leur lieu de travail. 4 000 officines ont été sonorisées par Pharmedisound depuis sa création, fin 2019, relevant pour la plupart de groupements, partenaires majoritaires du diffuseur. Le service, qui coûte entre 40 euros et 70 euros par mois (sans compter les droits Sacem), est généralement inclus dans l’accord passé entre le groupement et l’officine. Quant au contenu des messages diffusés, il est soumis au même cadre réglementaire qui régit toute communication à l’officine. « Mise en avant d’un médicament prescrit et incitation à la surconsommation de produits de santé sont interdits. »
Influencer, fidéliser, mobiliser
D’autres fournisseurs de solutions sonores – Mood Media, Midiscom, la plateforme Music Source… - peuvent être sollicités, certains s’adressant spécifiquement à l’officine. Cédric Lefort des Ylouses, fondateur de Proradio, concepteur, éditeur et producteur de radios sur mesures dédiées aux acteurs majeurs de l’officine (groupements, répartiteurs…), a ainsi utilisé les ondes pour renforcer les liens avec le circuit aux débuts de la pandémie de Covid-19. Son programme, Pharmaradio Officine, a été élaboré dans le double objectif de délivrer un contenu informatif aux équipes et de prodiguer une ambiance sonore à destination des patients. Cinq minutes avant l’ouverture de l’officine, le programme d’information se déclenche automatiquement pour faire place, par la suite, à une session musicale étudiée pour convenir à tous les âges et entrecoupée de flashs santé. 2 800 pharmacies sont à ce jour à l’écoute de Pharmaradio Officine qu’elles diffusent pendant plus de 4 heures, un auditoire que le dirigeant de Proradio souhaite élargir à 5 000 officines d’ici à 2024 tout en exportant son modèle en Afrique. « Quand on s’est lancé, à peine 20 % des officines proposaient un contenu musical, alors que 70 % des commerces sont sonorisés. On sait que la musique contribue largement à la bonne ambiance d’un lieu, qu’elle fait diminuer la sensation d’attente et permet d’améliorer l’accueil du public. »
Autant d’arguments repris à la lettre par le réseau Totum Pharmaciens, dont les 200 pharmacies sont sonorisées. « On entre à l’officine avec cinq sens en éveil, rappelle Jean-Philippe Silvie, pharmacien responsable du déploiement du concept Totum Pharmaciens. Tous peuvent contribuer à ce que l’expérience du lieu soit agréable. Avec le son, on apporte un élément émotionnel supplémentaire qui joue aussi un rôle pour l’équipe dont le travail peut être rythmé par la plage musicale. » Difficile, en effet, de conserver le même niveau de concentration durant toute la journée de travail, mais la musique peut aider en mobilisant l’énergie, contribuant ainsi à une meilleure productivité. Elle pourrait aussi, côté clientèle, influer sur les comportements d’achat. « Dans son livre « 100 petites expériences en psychologie du consommateur », l’auteur, Nicolas Guéguen, établit notamment un lien entre la musique, le rythme cardiaque et la consommation. » Mais à l’officine, l’ambiance sonore sera surtout utilisée pour améliorer la qualité de l’accueil, fidéliser la clientèle et mobiliser l’équipe. Il faudra toutefois que le pharmacien, aidé du fournisseur, prépare en amont sa programmation, qu’il veille à bien composer sa play-list, à prévoir la fréquence des messages promotionnels (programmables par heure, jour ou mois) et à bien étudier la communication liée aux services de l’officine. « La pharmacie a toujours la possibilité de désactiver certaines annonces ou de couper le flux sonore quand elle le souhaite. » Une garantie pour elle de conserver la maîtrise de ce qu’elle diffuse.