À l’heure du numérique, tous les segments de la société prennent le pli. Et le papier reste de plus en plus souvent au casier. D’autant que, d’un point de vue commercial, le digital brille par son efficacité à en croire certaines statistiques. D’après le baromètre Ipsos sur la croissance digitale, daté de 2019, celui-ci impacte directement la croissance d’une entreprise : 87 % des sociétés interrogées estiment que le digital induit une croissance des ventes, 78 % qu’il améliore la satisfaction client. Et 69 % des sondés pensent qu’il renforce la satisfaction client et 38 % le chiffre d’affaires.
Générer du trafic à l’intérieur
Au vu de ces données, la croissance des supports digitaux à des fins commerciales a de beaux jours devant elle dans le monde de l’entreprise. Et l’officine ne fait évidemment pas exception. Si les publicités fixes sur le lieu de vente sont encore la norme en vitrine, les supports digitaux commencent à prendre leur part du gâteau. Car loin d’être uniquement un gadget, ils répondent à un objectif commercial bien défini et sont complémentaires de l’affichage à l’intérieur de la pharmacie.
Mélanie Brugnacchi est responsable marketing et communication chez Futuramedia, une entreprise du groupe Cegedim, spécialisée dans l'affichage dynamique sur les points de vente Santé et Beauté. Elle explique : « L’idée consiste à être plus visible et attractif en extérieur afin de générer du trafic à l’intérieur de l’officine. » Marketing oblige, l’objectif premier en vitrine est d’interpeller sur des produits qui ne sont visibles qu’à l’intérieur. Alors qu’à l’intérieur justement, il s’agit logiquement de révéler en détail lesdits produits et d’inciter le client à l’achat. Campagne promotionnelle, descriptif succinct, vidéo… L’avantage du digital est sa capacité à supporter tous les formats. Mais là encore, il existe des règles. « Pour une vidéo diffusée en vitrine, nous allons plutôt tabler sur des formats de 10 à 12 secondes, contre 25 secondes dans l’officine. En intérieur, les écrans sont placés à des points stratégiques, où le client est en situation d’attente et donc, a le temps de se focaliser dessus. Alors qu’en vitrine, il faut capter cette attention et aller à l’essentiel avec quelque chose de dynamique, car le potentiel client ne fait que passer », détaille Mélanie Brugnacchi. Sur le contenu même, au même titre qu’une PLV, il convient de s’attarder en priorité sur le prix « s’il est un argument intéressant », ou sur le bénéfice que confère le produit mis en avant.
En théorie, les fabricants visent quatre grandes étapes via ces supports en vitrine pour inciter l’éventuel client à entrer dans l’officine : optimiser la visibilité grâce à de l’affichage dynamique ; générer plus d’attractivité en attirant les regards grâce à des contenus dynamiques ; booster la mémorisation du potentiel client ; générer du trafic à l’intérieur de l’officine grâce à des contenus impactants.
Réactivité et adaptabilité
Alors qu’une affiche papier restera toute une semaine en vitrine et sera retirée une fois obsolète. La vitrine lumineuse regroupe des arguments de rapidité, de gain de temps, et donc d’efficacité selon les professionnels. « Les avantages du digital sont nombreux. C’est d’abord une hyperproximité et la promesse d’un meilleur ciblage. C’est plus de réactivité et de flexibilité. Un écran sera quatre fois plus vu qu’une PLV fixe (statistiques de Futuramedia NDLR) », développe Mélanie Brugnacchi.
Une affiche en vitrine restera toute la semaine et sera retirée une fois obsolète. Avec une vitrine digitalisée, il va être possible d’adapter le contenu des écrans en fonction de l’horaire, du quartier et/ou du public qui évolue dans la rue. « À la sortie des écoles, les écrans diffuseront plutôt des publicités pour les antipoux. Avant les vacances ? Une communication pour de la crème solaire. À la sortie du travail ? Une publicité pour des boosters d’énergie », énonce François-Xavier Crozet, dirigeant, de Rubex-pharma, concepteur de supports de communication et des solutions d'équipement pour l'officine.
Mélanie Brugnacchi se risque même à dire que l’affichage digital est une démarche plus écologique que le support papier. « Nos écrans sont basse consommation (LED, NDLR), et ils sont allumés en fonction des horaires d’ouverture de la pharmacie. » Quant à savoir si l’ensemble des fabricants et des officines se plie à ces règles afin de faire baisser la facture énergétique ? C’est une autre histoire…
Un support qui évolue
Format 16/9, paysage… Il n’existe pas vraiment de limites en termes de typologie de support pour des vitrines lumineuses. La luminosité des différents supports peut même être pensée en fonction de la situation géographique de l’officine. Un écran intégré dans un centre commercial sera moins lumineux qu’un support donnant sur l’extérieur. CQFD.
Reste que tous ces supports digitaux souffrent d’un défaut. Ils sont occultant et nuisent donc à la visibilité de l’intérieur de la pharmacie, visibilité qui est un argument commercial pour certaines pharmacies. Un point négatif que les responsables marketing cherchent à transformer, notamment grâce à des écrans LED ajourés. Encore très anecdotiques sur le marché, ils présentent des capacités d’affichage de fait plus limitées. Et cette limite, les fabricants veulent la compenser par l’originalité même du support, qui réorganise à lui seul la manière de communiquer sur un produit. Il s’agira plutôt ici de diffuser des campagnes vidéo animées sur un produit avec des éléments textuels, tout en laissant passer la lumière via la transparence.
Quel rapport au médical ?
Au-delà de l’effet « wow » de l’écran, les entreprises du secteur développent généralement des offres clé en main à destination du pharmacien pour se démarquer. Celles-ci comportent généralement un service de création de contenus, une plateforme personnalisée embarquant généralement une base de données avec des références produits, un service de gestion pour les mises à jour, du support et de la maintenance. « Futuramedia fournit, par exemple, une diffusion mensuelle au pharmacien, qui, lui, dispose d’un espace personnel afin de réaliser ses propres diffusions et sélections, en mettant à jour, par exemple, ses promotions », détaille Mélanie Brugnacchi.
François-Xavier Crozet est catégorique : « Vendre un écran seul n’a aucun intérêt. Il faut vendre un écosystème. C’est, par exemple, la base de données réglementaire sur le médicament (Vidal) qui va fournir toutes les informations sur les produits de parapharmacie, les photos, les mentions légales, c’est le software (logiciel, NDLR)… » Certains fabricants dispensent également une formation, afin que le pharmacien puisse s’emparer de cet écosystème. Si lui seul peut accéder à son espace personnel, les fabricants peuvent néanmoins vérifier ce qui est intégré et se réservent le droit d’effectuer de la modération pour éviter toute diffusion de support anti-éthique, par exemple.
Au-delà de l’éthique, le pharmacien doit répondre à certaines obligations légales lorsqu’il s’agit d’affichage (digital ou non). La première, sans grande surprise, consiste à ne mettre en avant que des produits de parapharmacie. « On ne peut communiquer que sur des produits non remboursables par la Sécurité sociale », rappelle François-Xavier Crozet, de Rubex-pharma. En France, la publicité pour les médicaments est contrôlée par l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM). Dans les faits, les publicités pour des médicaments, en vitrine ou ailleurs, ne doivent pas représenter de danger pour la Santé publique ni être trompeuse. Elles doivent, en outre, respecter l'autorisation de mise sur le marché du médicament et les stratégies thérapeutiques recommandées par la HAS (Haute Autorité de santé). Quoi qu’il arrive, les publicités doivent faire l’objet d'une autorisation préalable à la diffusion, délivrée par l’ANSM.
Les vitrines lumineuses se prêtent aussi à un tout autre type de communication : la prévention. « Nous avons beaucoup de demandes de communications dynamiques sur ce volet depuis la pandémie du Covid-19. Le contexte a changé depuis cette crise. Les pharmaciens doivent faire connaître leur expertise et les services rendus. Que ce soit pour les masques, le gel hydroalcoolique, la livraison à domicile, les tests, la vaccination… La vitrine ne répond pas qu’à un aspect commercial, mais aussi à tout un aspect déontologique qui est le but premier de la profession de pharmacien », conclut François-Xavier Crozet.