Lot-et-Garonne

Quand la fiscalité oriente la désertification médicale

Publié le 03/12/2021
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En passe de perdre tous ses médecins, le petit bourg du Mas d’Agenais (Lot-et-Garonne) voit son officine menacée.

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La Maison de santé du Mas d'Agenais bientôt privée de médecin
Crédit photo : P. Jayat

Il y a quelques mois encore, l’avenir médical du Mas d’Agenais semblait assuré. Deux généralistes exerçaient dans la Maison de Santé flambant neuve de ce bourg lot-et-garonnais de 1 500 habitants. Et si le plus âgé devait prendre sa retraite en fin d’année, sa remplaçante était pressentie pour sa succession.

Mais ce tableau idyllique a volé en éclat avec le départ du plus jeune médecin qui a quitté la commune pour s’installer à 16 km de là, à Casteljaloux, une ville plus grande (4 600 habitants) et plus attractive. Surtout fiscalement, comme le soulignait Claude Lagarde, maire du Mas d’Agenais, dans la presse locale : « Je suis scandalisé. Tout ceci n’est qu’une histoire d’argent. » En effet, contrairement au Mas d’Agenais, Casteljaloux est située en zone de revitalisation rurale (ZRR). Ce qui confère à ceux qui s’y installent d’importantes exonérations fiscales.

Dans le même temps, la remplaçante du généraliste proche de la retraite, a opté pour une installation dans une autre commune, plus proche de ses racines familiales. « Au bout du compte, mes administrés n’auront plus de médecin au village, peste Claude Lagarde, tout un écosystème sera fragilisé et en premier lieu l’activité des pharmaciens. »

Vers une cabine de téléconsultation

« Cette situation va impacter notre officine, la commune, et surtout les patients âgés qui ont du mal à se déplacer », confirment Cécile Dubourg et Anne Louvion-Oudille, titulaires de l’unique pharmacie du Mas d’Agenais. Face à un avenir sans médecin, elles envisagent de s’équiper d’une cabine de téléconsultation : « Nous y pensons, indique Cécile Dubourg. Mais, même avec les aides existantes, une cabine risque ne concerner que les personnes qui ne peuvent pas se connecter de chez elles. » Bref un petit nombre de patients, nécessitant un accompagnement, donc du temps.

Cherchant une solution, la mairie a fait appel à un chasseur de têtes, pris contact avec des médecins étrangers, et trouvé une généraliste espagnole prête à s’installer. Malheureusement l’Ordre s’y est opposé, car il manquait un module de formation à son cursus… Aussi, c’est la désillusion qui prévaut : « La commune est prête à recevoir tous types de médecin, en libéral ou en salarié, mais à part la hotte du Père Noël, je ne vois pas d’où il peut arriver », conclut la pharmacienne Anne Louvion-Oudille.

Patrice Jayat

Source : Le Quotidien du Pharmacien