- Je ne comprends pas pourquoi vous ne voulez pas me donner ce médicament !, s'énerve la cliente en regardant Marion droit dans les yeux.
- Madame, ce n'est pas que je ne veux pas, c'est que je ne peux pas, répond l'adjointe de plus en plus rouge.
- Cet été, en vacances, j'ai fait une infection urinaire. Je suis allée à la pharmacie et on m'a donné ce médicament, vous savez celui qu'on prend en une seule fois. Alors pourquoi ce n'est pas possible ici ?
- Je viens de vous l'expliquer Madame.
Marion respire profondément puis reformule ses propos différemment :
- Pour délivrer la fosfomycine sans ordonnance médicale, il faut avoir signé un protocole avec un médecin. À ce jour, nous…
La pharmacienne hésite à dire la vérité, à savoir que les médecins de la CPTS ont rejeté le protocole de dispensation protocolisée.
- Bon, épargnez-moi les détails. Je ne comprends rien à ce charabia. Tout ce que je constate c'est que c'est terriblement compliqué. Et quand bien même vous n'avez pas signé le protocole, la Première ministre a dit que le pharmacien pouvait donner des médicaments contre les infections urinaires…
- Que le pharmacien pourrait donner, bientôt… Pour le moment, rien n'est acté officiellement.
Marion soupire puis poursuit :
- Votre médecin peut vous recevoir rapidement ?
- Rapidement ? Vous êtes au courant qu'il faut une semaine d'attente pour voir un médecin ?
- Nous pouvons vous proposer une consultation à distance mais avant cela, essayez quand même de prendre rendez-vous avec votre médecin. Il vous connaît et comme vous avez tendance à faire des récidives rapprochées, ce serait bien de le consulter.
- De LA consulter : c'est une femme. Je l'appelle. Attendez-moi.
Au comptoir d'à côté, Emmanuel tente de faire comprendre à son patient qu'il ne peut pas le vacciner aujourd'hui contre le Covid :
- Monsieur, je vous le répète : nous ouvrons des créneaux en fonction des flacons que nous recevons. Et là, nous sommes à sec. Donc je ne peux pas vous vacciner tout simplement parce que je n'ai pas de vaccin à disposition.
De l'autre côté, c'est une mère qui supplie Kenza de lui prescrire le vaccin HPV pour sa fille. Comme le reste de l'équipe, Kenza n'a pas encore suivi sa formation pour être habilitée à prescrire :
- Il nous faut une ordonnance Madame. Votre fille peut consulter le médecin, et avec l'ordonnance, nous pourrons donner le vaccin et même l'injecter. Mais il faut l'ordonnance.
- Pourtant il y a une pub à la radio qui dit que le pharmacien peut prescrire ce vaccin. Pourquoi pas vous ?
- On va dire que cette pub est un peu… précoce. Oui les pharmaciens ont le droit de prescrire, mais ils doivent suivre une formation pour cela. Et pour ma part, ma formation est prévue la semaine prochaine.
La cliente à l'infection urinaire revient vers Marion :
- C'est bon, il vous envoie l'ordonnance par mail.
Dans le back-office, Christèle et Maëlys déballent des cartons de médicaments récemment reçus, suite à une commande directe. Rapidement, la préparatrice remarque quelque chose d'inhabituel :
- Pourquoi est-ce qu'il y a autant de ceftriaxone injectable ?
(À suivre…)